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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 32.1885

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Nr. 6
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Mantz, Paul: Rubens, 14
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https://doi.org/10.11588/diglit.24593#0470

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RUBENS.

451

Devant les bois et les prairies, Rubens est un arrangeur. Il l’est
surtout lorsque son paysage, devant servir de fond à des figures, est
condamné au rôle do comparse et s’étudie à ne pas parler trop haut ;
l’horizon, d’ordinaire assez vaste, est alors une campagne sommaire,
où tout détail est supprimé et qui reste en réalité assez peu véridique :
mais le maître agit aussi en décorateur, singulièrement affranchi,
lorsque son tableau ne doit être qu’un paysage. Sa doctrine est celle
de Perrot d’Ablancourt : pourquoi le texte serait-il respecté? Rubens
n’entend pas rester un traducteur servile. A un motif pris à une
nature déterminée, et peut-être aperçu des fenêtres du château de
Steen, il ajoute dos éléments rencontrés ailleurs ; il change la place
des arbres, il transforme les ruisseaux en rivières, il invente des
éclairages inédits et, dans sa création libre et variée, il a toutes les
notes. Rubens a fait des paysages tranquilles, grandioses, familiers
ou terribles.

J’en citerai quelques-uns, en me bornant à mentionner les plus
caractéristiques, les plus personnels surtout, car il serait fâcheux de
prendre le change et d’admirer sous l’étiquette du maître un Jean
Wildens ou un Van Uden. L’Arc-en-ciel du Musée de Munich est un
des plus beaux paysages de Rubens. Les gaîtés de juin emplissent la
vaste campagne. On fait les foins. Au premier plan, des paysans et
un troupeau. Ici le parti pris est presque violent : dans ce frais
paysage où l’été n’a pas mis encore sa dorure, l’artiste a voulu insister
sur la note verte et elle s’écrit partout avec une incroyable audace.
Les esprits amoureux de la petite vérité de tous les jours considére-
ront sans doute comme inexacte cette verdure dont le principe est
cependant bien flamand, mais que Rubens a volontairement exagérée.
Dans Y Arc-en-ciel, il agit moins en témoin qu’en inventeur, et il
applique à un motif emprunté à la nature de son pays l’exaltation
qu’il a mise dans sa brûlante esquisse, le Tournoi.

L’Automne, de la National Gallery, où l’on voit le château de Steen,
est aussi un très beau paysage. Il faisait partie d’une série consacrée
aux Saisons et l’Angleterre possède les quatre pages du poème, car le
Printemps est chez sir Richard Wallace, les deux autres chez la reine.
Dans ses larges horizons, Y Automne est une œuvre grandiose; mais
les choses y sont poussées fort loin pour l’énergie de la couleur, et ce
n’est pas sans raison que M. Reiset a pu y reconnaître des « tons si
vigoureux qu’ils deviennent presque violents 1 ».

1. Une visite à la National Gallery, 2e partie, p. 23.
 
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