50
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
nitions subtiles de Renoir, — un Drame au désert de M. Gardet.
Dans la double rangée de bustes qui bordent la grande allée, il en
est peu qui aient la flamme de la vie et la fermeté du caractère. Les
uns semblent morts et regardent vaguement de leurs yeux vides; la
plupart affectent la vie superficielle et caricaturale d’une photographie
instantanée. Exagérer le trait saillant pour imprimer plus fortement
la ressemblance est un procédé facile à la portée du premier venu.
Tout autre est le vigoureux réalisme qui scrute un visage, et subor-
donne le détail à une vérité dominante. Dans cette manière savante
et impérieuse le buste de 31. Eacquerie par Dalou, est une merveille
d’expression. Ironie et passion, verve du polémiste et religiosité de
l’écrivain qui est un crojmnt à sa manière, ce bronze, nerveux et
précis, résume ce qu’il y a de plus intime dans l'homme. On dirait que
les lèvres raillent et que le regard bénit. Tourmenté, volontaire, aussi
parlant qu’une tête d’orateur antique, le portrait de Paul Avenel par
le même artiste, frappe par l’intensité du caractère.
Sans atteindre à cette largeur magistrale, les bustes de 31. Ballu,
par Barrias, de 31. Achille Alartinet par Gautherin, deux marbres
délicatement travaillés, non sans quelque abus des petits moyens,
attestent par l’évidence de la vérité la plus attentive étude d’une
physionomie. Ajoutons le portrait de J. Lionnet par M. Rougelet.
Energique, maigre et nerveux tel qu’était ce maitre de la vie frémis-
sante, Carpeaux a été bien compris et traduit avec autorité par
M. de Saint-Vidal.
L’imagination de M. Baffier s’égare parfois au delà du possible
(témoin cette tête de Louis XI, couturée comme une face de vieille
femme, où le bronze se ride et se chiffonne outre mesure), mais il
retrouve devant la nature la franchise de sa conviction. Le Portrait
du père Baffier, d’un modelé ressenti, est curieux, très vivant, très
particularisé d’expression.
Parmi tant d’images figées ou grimaçantes, on est attiré par une
physionomie finement sentie dans sa bonhomie spirituelle, c’est le
Portrait de 31. F., par M. Turcan; la même qualité de juste observa-
tion recommande celui de 31. le docteur E. J., par M. Guillot.
L’affectation d’une ressemblance soudaine qui saute aux yeux et
ne charme pas l’esprit, est surtout choquante dans les portraits
féminins. C’est là qu’on trouve le meilleur et le pire. On admire sans
réserve le buste deMUo W. par M. Cariés, une œuvre noble, exquise-
ment virginale, distinguée sans prétention, où la pureté du marbre
fait valoir la grâce des formes sveltes et la délicatesse de l’expression.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
nitions subtiles de Renoir, — un Drame au désert de M. Gardet.
Dans la double rangée de bustes qui bordent la grande allée, il en
est peu qui aient la flamme de la vie et la fermeté du caractère. Les
uns semblent morts et regardent vaguement de leurs yeux vides; la
plupart affectent la vie superficielle et caricaturale d’une photographie
instantanée. Exagérer le trait saillant pour imprimer plus fortement
la ressemblance est un procédé facile à la portée du premier venu.
Tout autre est le vigoureux réalisme qui scrute un visage, et subor-
donne le détail à une vérité dominante. Dans cette manière savante
et impérieuse le buste de 31. Eacquerie par Dalou, est une merveille
d’expression. Ironie et passion, verve du polémiste et religiosité de
l’écrivain qui est un crojmnt à sa manière, ce bronze, nerveux et
précis, résume ce qu’il y a de plus intime dans l'homme. On dirait que
les lèvres raillent et que le regard bénit. Tourmenté, volontaire, aussi
parlant qu’une tête d’orateur antique, le portrait de Paul Avenel par
le même artiste, frappe par l’intensité du caractère.
Sans atteindre à cette largeur magistrale, les bustes de 31. Ballu,
par Barrias, de 31. Achille Alartinet par Gautherin, deux marbres
délicatement travaillés, non sans quelque abus des petits moyens,
attestent par l’évidence de la vérité la plus attentive étude d’une
physionomie. Ajoutons le portrait de J. Lionnet par M. Rougelet.
Energique, maigre et nerveux tel qu’était ce maitre de la vie frémis-
sante, Carpeaux a été bien compris et traduit avec autorité par
M. de Saint-Vidal.
L’imagination de M. Baffier s’égare parfois au delà du possible
(témoin cette tête de Louis XI, couturée comme une face de vieille
femme, où le bronze se ride et se chiffonne outre mesure), mais il
retrouve devant la nature la franchise de sa conviction. Le Portrait
du père Baffier, d’un modelé ressenti, est curieux, très vivant, très
particularisé d’expression.
Parmi tant d’images figées ou grimaçantes, on est attiré par une
physionomie finement sentie dans sa bonhomie spirituelle, c’est le
Portrait de 31. F., par M. Turcan; la même qualité de juste observa-
tion recommande celui de 31. le docteur E. J., par M. Guillot.
L’affectation d’une ressemblance soudaine qui saute aux yeux et
ne charme pas l’esprit, est surtout choquante dans les portraits
féminins. C’est là qu’on trouve le meilleur et le pire. On admire sans
réserve le buste deMUo W. par M. Cariés, une œuvre noble, exquise-
ment virginale, distinguée sans prétention, où la pureté du marbre
fait valoir la grâce des formes sveltes et la délicatesse de l’expression.