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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 36.1887

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Nr. 6
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Bouchot, Henri: Le portrait peint en France au XVIe siècle, 3: [Bourdichon. - Perreal. - Les Clouet. - Corneille de Lyon]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24190#0517

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LE PORTRAIT EN FRANGE AU XVI° SIÈCLE.

plus modestes attachés directement à la personne des rois avaient
une besogne moins relevée ; ils faisaient les gros ouvrages de pein-
ture que les idéalistes italiens eussent dédaignés ; ils s’ingéniaient
surtout à rendre, du mieux qu’ils pouvaient, la physionomie humaine,
dans ces cours polies où dames et seigneurs rivalisaient de luxe,
d’élégance et de galanterie. De même que les poètes ne composaient
pas toujours des pièces de vers sous leur nom, de même les artistes
dessinaient souvent ou peignaient un visage à la dérobée U D’autres
fois l’œuvre était plus humble encore, et nous trouverons des crayon-
neurs, assez habiles, s’éternisant dans des reproductions d’albums
mille fois recopiées sans y changer un trait1 2 3.

François Clouet fut un de ces artistes ; son père même sur la
fin de sa vie, en plein succès, n’avait point connu la grande fortune.
Il payait un champ en 1522 avec des cabochons et des joyaux, sans
doute de l’héritage de Jeanne Boucault, la fille de l'orfèvre. En 1535,
il touchait 200 livres de gages 3, un peu plus qu’un cordonnier, mais
beaucoup moins qu’un beau seigneur inutile, échanson ou panetier.
Il s’ensuivit que le jeune peintre se trouva de bonne heure dans une
condition aisée, eu égard à la situation de son père, mais assez peu
assurée dans l’avenir pour qu’il hésitât à prendre le même genre
de vie. Quand Jean Clouet mourut, François, âgé d’une trentaine
d’années, hérita à la fois de ses meubles, de sa charge et de son
nom artistique. De ses meubles, puisque le roi passa volontiers sur
la qualité d’étranger de Jean Clouet, ainsi que nous l’avons vu, pour

1. Ce n'étaient pas que les simples particuliers qui employaient les artistes à
des peintures d’amourettes, ou à la reproduction anonyme de portraits. Le compte
le plus circonstancié sur Jean Clouet porte à la date de 1529 : « A M> Jannet
Clouet, painctre et varlet de chambre ordinaire du Roy... la somme de cent deux
livres dix sols tournois... sur plus grande somme qui luy a esté deu pour plusieurs
ouvraiges et pourtraictures qu’il a cy-devant faictes de son mestier, et faict encores
présentement... desquelz ouvraiges et pourtraictures ledit seigneur n’a voulleu estre
cy autrement déclairées ne specifflées... » (De Laborde, Renaissance, p. 14 et 15.)

2. M. de Laborde explique très bien cette indolence des artistes : « Au xvie siè-
cle, il y avait encore non pas la modestie et la naïveté du moyen âge, mais une
sorte de nonchalance d’amour-propre, qui sans initiative, sans ambition, considé-
rait l'art comme un gagne-pain, et n'attachait pas plus d’importance à ses œuvres
que le maçon à sa muraille, le manœuvre à son mortier. » (Ibidem, p. 138.)

3. M. Leroux de Lincy a publié, dans le Moniteur du 17 avril 1851, deux quit-
tances qui attribuent aux Clouet des chiffres fantastiques. François Clouet eût
touché pour sa part 600 livres par trimestre, ce qui est de beaucoup supérieur aux
plus gros traitements de la cour. Ce devaient être là des quittances de sommes extra-
ordinaires dans le genre de celle que nous avons rapportée à la noie 1 ci-dessus.

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