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GAZETTE DES BEAUX-AltTS.
la découverte de la Victoire ont été publiés en 1880 par M. Chàmpoi-
seau l. Le rapport rédigé par lui au moment même serait plus
intéressant encore à connaître, mais en attendant qu’on l’exhume
des archives du quai d’Orsay, il faut nous contenter de celui qui a été
écrit, ou du moins publié dix-septans plus tard.
En 1862, M. Champoiseau était chargé du Consulat de France à
Andrinople. Des affaires de service l’appelèrent à Âenos, bourgade
malsaine située sur la côte en face de Samothrace. Frappé par les
récits qu’on lui faisait des antiquités de l’île, M. Champoiseau alla
y passer deux jours; puis, jugeant l’endroit propice à des fouilles, il
obtint à cet effet du ministère d’Etat une modeste allocation de
2,500 francs.
Les recherches commencèrent sous sa direction au mois de mars
1863. M. Champoiseau fit d’abord enlever plusieurs inscriptions et
bas-reliefs encastrés dans des constructions du moyen âge et les
expédia au Musée du Louvre; de ce nombre était le bas-relief signalé
par Cyriaque. Puis il fit déblayer le seuil d’un grand temple dorique
et creuser des tranchées le long d’un portique en pierre calcaire, cons-
truit sur une colline dominant les temples. Pendant que ce travail
s’effectuait, il aperçut, à 50 mètres environ au sud-est du portique,
un beau fragment de marbre blanc émergeant à peine du sol. C’était
un sein de femme. Aussitôt les ouvriers furent transportés sur ce point
et ils ramenèrent au jour la statue de la Victoire « couchée sous deux
pieds de terre et de cailloux >.
M. de Moustier, alors ambassadeur à Constantinople, fut avisé
sans retard; M. Champoiseau le priait de lui envoyer le stationnaire
Y Ajaccio, pour embarquer sa précieuse trouvaille. En attendant, les
fouilles continuèrent : on chercha vainement le moindre vestige de
la tête ou des bras, mais on exhuma « une douzaine d’énormes blocs
de marbre gris épars et un large soubassement formé de six plaques
de même marbre, le tout renfermé dans une enceinte à trois côtés ou
cella, ouverte au nord en regard de la mer, pavée en pierres calcaires,
et dont les murs étaient destinés, sans doute, à protéger le monument,
placé sur la pente d’une colline très raide, contre les éboulements du
sol supérieur2 ». M. Champoiseau reconnut que ces blocs, de coupes
bizarres, avaient servi de piédestal à la Victoire, mais il ne devina
point, du moins alors, ce que pouvait représenter leur assemblage.
1. Revue archéol., 1880, I, p. 1-17.
2. Champoiseau, Revue archéol., 1880, I, p. 12.
GAZETTE DES BEAUX-AltTS.
la découverte de la Victoire ont été publiés en 1880 par M. Chàmpoi-
seau l. Le rapport rédigé par lui au moment même serait plus
intéressant encore à connaître, mais en attendant qu’on l’exhume
des archives du quai d’Orsay, il faut nous contenter de celui qui a été
écrit, ou du moins publié dix-septans plus tard.
En 1862, M. Champoiseau était chargé du Consulat de France à
Andrinople. Des affaires de service l’appelèrent à Âenos, bourgade
malsaine située sur la côte en face de Samothrace. Frappé par les
récits qu’on lui faisait des antiquités de l’île, M. Champoiseau alla
y passer deux jours; puis, jugeant l’endroit propice à des fouilles, il
obtint à cet effet du ministère d’Etat une modeste allocation de
2,500 francs.
Les recherches commencèrent sous sa direction au mois de mars
1863. M. Champoiseau fit d’abord enlever plusieurs inscriptions et
bas-reliefs encastrés dans des constructions du moyen âge et les
expédia au Musée du Louvre; de ce nombre était le bas-relief signalé
par Cyriaque. Puis il fit déblayer le seuil d’un grand temple dorique
et creuser des tranchées le long d’un portique en pierre calcaire, cons-
truit sur une colline dominant les temples. Pendant que ce travail
s’effectuait, il aperçut, à 50 mètres environ au sud-est du portique,
un beau fragment de marbre blanc émergeant à peine du sol. C’était
un sein de femme. Aussitôt les ouvriers furent transportés sur ce point
et ils ramenèrent au jour la statue de la Victoire « couchée sous deux
pieds de terre et de cailloux >.
M. de Moustier, alors ambassadeur à Constantinople, fut avisé
sans retard; M. Champoiseau le priait de lui envoyer le stationnaire
Y Ajaccio, pour embarquer sa précieuse trouvaille. En attendant, les
fouilles continuèrent : on chercha vainement le moindre vestige de
la tête ou des bras, mais on exhuma « une douzaine d’énormes blocs
de marbre gris épars et un large soubassement formé de six plaques
de même marbre, le tout renfermé dans une enceinte à trois côtés ou
cella, ouverte au nord en regard de la mer, pavée en pierres calcaires,
et dont les murs étaient destinés, sans doute, à protéger le monument,
placé sur la pente d’une colline très raide, contre les éboulements du
sol supérieur2 ». M. Champoiseau reconnut que ces blocs, de coupes
bizarres, avaient servi de piédestal à la Victoire, mais il ne devina
point, du moins alors, ce que pouvait représenter leur assemblage.
1. Revue archéol., 1880, I, p. 1-17.
2. Champoiseau, Revue archéol., 1880, I, p. 12.