ARTISTES DIJO N NAIS DU XV> SIÈCLE.
175
l’occasion du dernier subside voté au duc par les États de Bourgogne.
— Imposé, en 1488 ou 1489, à la somme de 3 francs pour sa quote-part
d’un nouvel aide octroyé au roi, — la Bourgogne avait été réunie à
la couronne à la mort de Charles le Téméraire, — il se fait accorder
encore une réduction de 18 blancs, motivée par une situation peu
prospère. Il « tient maison et place que lui coste chier de louhaige
pour mectre ses pierres, et si tient des serviteurs de grant pris et
qui le destruisent, car jasoit ce qu’il ne face guières, si lui est il
force d’en tenir, à cause qu’il ne peut manier ne guères faire de son
mestier qu’il n’ait aide et pour les (sic) mener maintes fois bien loing
ses ouvrages. Finablement, il est povre homme, non marié, qui passe
le temps au mieulx qu’il peut, et si ne gaingne riens à ses voisins, car
il n’a besoingne qui ne lui vienne de loingt». — En mai 1494, autre
imposition et nouveau dégrèvement de 6 gros sur 3 francs. Avec
l’âge, sa position ne s’est pas améliorée, au contraire : il « n’a maison,
héritaiges, censes ne rentes, à la ville ne ailleurs, dont il puisse
vivre ne gaigner sa vye, fort seullement à son mestier, et avec ce,
pour gagner sadicte vye, combien qu’il soit vyez et ancien homme,
luy convient prandre grant peinne et travail à aler sur les champs
en loingtain pays hors cette ville pour trouver à besoingner ».
Le vieil artiste survécut-il longtemps à cette touchante supplique?
Les Archives de Dijon ne l’ont pas révélé jusqu’à présent, et il faut
arriver en 1511, — après sa mort, —pour trouver une nouvelle
mention de Le Moiturier dans « maistre Anthoniet », à qui Michel
Colomb, bon juge en la matière, décerne l’éloge de « souverain
tailleur d’imaiges » *.
Quelles sont les œuvres exécutées par Le Moiturier, de 1470 à
1494, en Bourgogne et « en loingtain pays » ? Le tombeau de Philippe
Pot se présente tout d’abord à la pensée; mais soyons discret : le
savant conservateur des Archives de la Côte-d’Or se réserve de nous
renseigner bientôt à cet égard.
1. Voici les termes mêmes de Michel Colombe, dans son marché du 3 décembre
1511 pour le tombeau de Philibert de Savoie, destiné à l’église de Brou : « ... Les
sépultures de feuz messeigneurs les ducs de Bourgoigne... faictes aux Chartreux
de Dijon... par maistre Claux et maistre Anthoniet, souverains tailleurs d’imaiges,
dont je, Michel Coulombe, a y autreffois eu la cognoissance ». Le Glay, Analecies
historiques (Paris, 1838, in-8’), p. 18. — C’est trop solliciter ce seul et unique texte
que vouloir en conclure que Michel Colomb a été un élève de Le Moiturier et un
continuateur de l’école dite bourguignonne, peut-être parce qu'elle est représentée
par deux Hollandais, un Espagnol et un Avignonais.
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l’occasion du dernier subside voté au duc par les États de Bourgogne.
— Imposé, en 1488 ou 1489, à la somme de 3 francs pour sa quote-part
d’un nouvel aide octroyé au roi, — la Bourgogne avait été réunie à
la couronne à la mort de Charles le Téméraire, — il se fait accorder
encore une réduction de 18 blancs, motivée par une situation peu
prospère. Il « tient maison et place que lui coste chier de louhaige
pour mectre ses pierres, et si tient des serviteurs de grant pris et
qui le destruisent, car jasoit ce qu’il ne face guières, si lui est il
force d’en tenir, à cause qu’il ne peut manier ne guères faire de son
mestier qu’il n’ait aide et pour les (sic) mener maintes fois bien loing
ses ouvrages. Finablement, il est povre homme, non marié, qui passe
le temps au mieulx qu’il peut, et si ne gaingne riens à ses voisins, car
il n’a besoingne qui ne lui vienne de loingt». — En mai 1494, autre
imposition et nouveau dégrèvement de 6 gros sur 3 francs. Avec
l’âge, sa position ne s’est pas améliorée, au contraire : il « n’a maison,
héritaiges, censes ne rentes, à la ville ne ailleurs, dont il puisse
vivre ne gaigner sa vye, fort seullement à son mestier, et avec ce,
pour gagner sadicte vye, combien qu’il soit vyez et ancien homme,
luy convient prandre grant peinne et travail à aler sur les champs
en loingtain pays hors cette ville pour trouver à besoingner ».
Le vieil artiste survécut-il longtemps à cette touchante supplique?
Les Archives de Dijon ne l’ont pas révélé jusqu’à présent, et il faut
arriver en 1511, — après sa mort, —pour trouver une nouvelle
mention de Le Moiturier dans « maistre Anthoniet », à qui Michel
Colomb, bon juge en la matière, décerne l’éloge de « souverain
tailleur d’imaiges » *.
Quelles sont les œuvres exécutées par Le Moiturier, de 1470 à
1494, en Bourgogne et « en loingtain pays » ? Le tombeau de Philippe
Pot se présente tout d’abord à la pensée; mais soyons discret : le
savant conservateur des Archives de la Côte-d’Or se réserve de nous
renseigner bientôt à cet égard.
1. Voici les termes mêmes de Michel Colombe, dans son marché du 3 décembre
1511 pour le tombeau de Philibert de Savoie, destiné à l’église de Brou : « ... Les
sépultures de feuz messeigneurs les ducs de Bourgoigne... faictes aux Chartreux
de Dijon... par maistre Claux et maistre Anthoniet, souverains tailleurs d’imaiges,
dont je, Michel Coulombe, a y autreffois eu la cognoissance ». Le Glay, Analecies
historiques (Paris, 1838, in-8’), p. 18. — C’est trop solliciter ce seul et unique texte
que vouloir en conclure que Michel Colomb a été un élève de Le Moiturier et un
continuateur de l’école dite bourguignonne, peut-être parce qu'elle est représentée
par deux Hollandais, un Espagnol et un Avignonais.