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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 36.1906

DOI issue:
Nr. 6
DOI article:
Jamot, Paul: Le salon d'automne, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24818#0496

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

gros bouquet sur une table, et, à côté, en buste, deux personnages
qui trahissent une curieuse influence de Manet, une femme avec
un homme coiffé d’un chapeau de paille. Les plus récents précèdent
de peu sa mort prématurée (1903).

C’est dans une si courte période qu’il a créé cet art à la fois
raffiné et sauvage, où cependant rien n’est factice, ni le raffine-
ment ni la sauvagerie, produit spontané d’un double atavisme péru-
vien et français. Dès le début, il sent que, sur cette terre immémo-
riale et pourtant sans passé, les formes de la Nature et les gestes
des êtres vont se prêter docilement aux ordres de son rêve. Tout
de suite il sait rendre, dans sa dignité animale et non domestiquée,
la noblesse et la grâce de cette race primitive, et il l’entoure de
décors où la Nature, réduite à ses éléments primordiaux, flamboie
en larges taches indépendantes, qui s’ordonnent comme les plus
imprévus et les plus somptueux des vitraux.

Qu’on n’improvise pas un style décoratif fondé sur les plus
hardies simplifications du dessin et les synthèses les plus
paroxystes des couleurs, cela nous est abondamment prouvé par les
témoignages ici rassemblés du double apprentissage de Gauguin :
les études, dessins, croquis et aquarelles d’une part, de l’autre les
magnifiques natures mortes où l’on voit se former peu à peu cette
palette aux splendeurs inédites. Pour celles-ci, il suffit de citer,
parmi les plus belles, deux toiles de la collection Fayet : la compo-
sition aux Tournesols, d’une superbe et riche harmonie en fauve, or
et vert, et celle que parent, devant un fond bleu, les ventres diaprés
de zinzolin, de rose et d’orange des Oiseaux des îles. N’est-il pas
instructif de trouver dans certains dessins, F Enfant nu à la sanguine
de la collection Fayet, le Portrait de femme brune de la collection
de Montfreid, la Glaneuse bretonne, pastel de la collection Durio,
des marques non douteuses de l’influence exercée sur Gauguin par
le plus illustre dessinateur de notre temps, par M. Degas? Et, malgré
la différence des modèles, des sujets, de l’esprit aussi, je crois que
M. Degas ne serait pas sans tendresse pour ces charmantes aqua-
relles de l’époque tahitienne : la femme nue, vue de dos, qui porte
un fruit rouge au bout d’un long bâton (coll. Fayet), ou cette autre
au visage encadré de boucles tombantes, dont la silhouette gracile se
détache sur un fond d’or, ou la délicieuse Femme à Céventail (appar-
tenant à M. Vollard), esquisse d’une des plus admirables composi-
tions exposées ici, ou L'Esprit veille (coll. Fabre), petit corps brun
de jeune fille étendu à plat ventre, première pensée du beau tableau
 
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