«JN PORTRAIT DU PERE DE REMBRANDT
AU BRÉSIL
« R E MBR A N D T
AUX TROIS MOUSTACHES
EAU-FORTE DU MAITRE
Les œuvres d’art ont parfois d’étranges
destinées, et leur histoire, leurs aventures,
réservent à la critique bien des surprises.
Il y a quelques mois, je recevais, datée
de Rio-Janeiro, une lettre contenant une
photographie d’après un portrait au sujet
duquel on sollicitait discrètement mon avis.
A première vue, cette photographie me
montrait le type bien connu du père de Rem-
brandt, et ce qui paraissait de l’exécution de
l’original ne semblait pas infirmer son attri-
bution au maître lui-même; mais, ainsi que
d’ordinaire en pareille occasion, je répondais qu'il était impossible
d’être plus affirmatif avant d’avoir vu l’original. Peu de temps après,
une nouvelle missive de M. J. Lias Carneiro — c’est le nom du pos-
sesseur— m’annonçait son voyage prochain en Europe. Dès son arri-
vée à Paris, il m’apportait la peinture en question. Avec une délica-
tesse charmante, M. Carneiro me faisait part de ses intentions :
l’œuvre lui avait semblé excellente, mais il avait besoin d’être ras-
suré à cet égard. Si elle l’était en effet, il la donnerait au musée de
Rio-Janeiro ; si elle était médiocre, il la garderait pour lui. La ren-
contre n’était pas commune, et d’ordinaire ce n’était pas dans ces
termes que pareil dilemme m’avait été'posé.
Le tableau à peine offert à mes regards, j’étais édifié à la fois sur
la valeur morale et sur le goût d’un amateur aussi généreux. C’était
bien là le portrait du père de Rembrandt; assez de documents posi-
tifs, eaux-fortes et peintures (nous reproduisons ici celle du musée
d’Innsbruck, où le vieillard est costumé en « Juif Philon »), me
renseignaient sur ce point. De plus, la beauté de l’œuvre et ses qua-
AU BRÉSIL
« R E MBR A N D T
AUX TROIS MOUSTACHES
EAU-FORTE DU MAITRE
Les œuvres d’art ont parfois d’étranges
destinées, et leur histoire, leurs aventures,
réservent à la critique bien des surprises.
Il y a quelques mois, je recevais, datée
de Rio-Janeiro, une lettre contenant une
photographie d’après un portrait au sujet
duquel on sollicitait discrètement mon avis.
A première vue, cette photographie me
montrait le type bien connu du père de Rem-
brandt, et ce qui paraissait de l’exécution de
l’original ne semblait pas infirmer son attri-
bution au maître lui-même; mais, ainsi que
d’ordinaire en pareille occasion, je répondais qu'il était impossible
d’être plus affirmatif avant d’avoir vu l’original. Peu de temps après,
une nouvelle missive de M. J. Lias Carneiro — c’est le nom du pos-
sesseur— m’annonçait son voyage prochain en Europe. Dès son arri-
vée à Paris, il m’apportait la peinture en question. Avec une délica-
tesse charmante, M. Carneiro me faisait part de ses intentions :
l’œuvre lui avait semblé excellente, mais il avait besoin d’être ras-
suré à cet égard. Si elle l’était en effet, il la donnerait au musée de
Rio-Janeiro ; si elle était médiocre, il la garderait pour lui. La ren-
contre n’était pas commune, et d’ordinaire ce n’était pas dans ces
termes que pareil dilemme m’avait été'posé.
Le tableau à peine offert à mes regards, j’étais édifié à la fois sur
la valeur morale et sur le goût d’un amateur aussi généreux. C’était
bien là le portrait du père de Rembrandt; assez de documents posi-
tifs, eaux-fortes et peintures (nous reproduisons ici celle du musée
d’Innsbruck, où le vieillard est costumé en « Juif Philon »), me
renseignaient sur ce point. De plus, la beauté de l’œuvre et ses qua-