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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
tôt les remarquables portraits de MM. Onslow-Ford, Schilt'et Lânder,
1 ’Intérieur si intelligemment peint de Ml,e Lise Ullmann et le Coin
d'alelier de M"0 Wilkinson, où ces plâtres, ces cartables et ces
chevalets sont exprimés avec un naturel parfait, qui indique un
esprit attentif et délicat, de grandes qualités d’observation.
A tant d’éloges que, très sincèrement, j’ai cru devoir accor-
der à des femmes, je demande à ajouter un hommage plus général
aux qualités de la femme, si brillamment et si solidement exprimées
dans ces Salons. Ici, nulle complaisance n’intervient, même d’une
excusable galanterie. Je démêle assez bien qu’elle emprunte avec
beaucoup d’adresse et qu’elle s’arrête souvent en chemin. Ou,
mieux, je vivais avec ces impressions. Tant d’expériences ré-
centes me forcent aies corriger. J’ai remarqué pour vous, sur quel-
ques-unes de ces œuvres féminines, les plus attrayants alliages de la
conscience et du goût, des marques d’intransigeante volonté et des
élans de l'improvisation, à la fois le plus réfléchi, avec des preuves de
sang-froid, et le plus sensible, dans des manifestations où tout l’ètre
découvre et livre le meilleur de son émotion et de sa pensée. Si ses
forces ne la trahissent pas au milieu de l’entreprise et pourvu que
son attention ne bifurque pas vers un abus de l’attendrissement ou
vers quelque soudaine futilité, elle conduit à lin, à force de carac-
tère, des œuvres graves où se révèle une sorte de piété, ni pédante,
ni morose, parce qu’elle discerne et parce qu’elle aime les couleurs
comme des ornements faits pour elle. Le péril est qu’elle enveloppe
de l’inutile et du vent et qu’elle atteigne à peine à quelque joliesse
de lignes. Dès qu’elle a conquis la matière, maîtresse des plans et
des masses, ayant peut-être lutté davantage, non pour sentir mais
pour comprendre, voyez-la broder et faire son œuvre de parure, à la
suite des imaginations. Ingénieuse mais probe, s’entendant mal à
cacher le métier qu’il faut avoir et tenir au secret et qu’elle n’acquiert
qu’avec peine, elle me fait aimer surtout son courage, son ardeur à
la besogne et un miraculeux entêtement. Devant tant de belles
réussites, j’évoque gaiement l’art que, jadis, on lui permit, toutes
les aquarelles du pensionnat. Par la place que déjà elle s’est taillée,
je contrôle une évolution et des gains fort importants.
Aussi j’ai voulu que mon dernier compliment fût pour
Mllc Morstadt, qui peint des animaux dans des paysages, et que je ne
veux tenir ni pour un paysagiste ni pour un peintre animalier. C’est
qu’en fait elle est beaucoup plus que l’un Ou l’autre. Elle est tout
simplement un peintre, un beau peintre pénétrant, naturel, attentif
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
tôt les remarquables portraits de MM. Onslow-Ford, Schilt'et Lânder,
1 ’Intérieur si intelligemment peint de Ml,e Lise Ullmann et le Coin
d'alelier de M"0 Wilkinson, où ces plâtres, ces cartables et ces
chevalets sont exprimés avec un naturel parfait, qui indique un
esprit attentif et délicat, de grandes qualités d’observation.
A tant d’éloges que, très sincèrement, j’ai cru devoir accor-
der à des femmes, je demande à ajouter un hommage plus général
aux qualités de la femme, si brillamment et si solidement exprimées
dans ces Salons. Ici, nulle complaisance n’intervient, même d’une
excusable galanterie. Je démêle assez bien qu’elle emprunte avec
beaucoup d’adresse et qu’elle s’arrête souvent en chemin. Ou,
mieux, je vivais avec ces impressions. Tant d’expériences ré-
centes me forcent aies corriger. J’ai remarqué pour vous, sur quel-
ques-unes de ces œuvres féminines, les plus attrayants alliages de la
conscience et du goût, des marques d’intransigeante volonté et des
élans de l'improvisation, à la fois le plus réfléchi, avec des preuves de
sang-froid, et le plus sensible, dans des manifestations où tout l’ètre
découvre et livre le meilleur de son émotion et de sa pensée. Si ses
forces ne la trahissent pas au milieu de l’entreprise et pourvu que
son attention ne bifurque pas vers un abus de l’attendrissement ou
vers quelque soudaine futilité, elle conduit à lin, à force de carac-
tère, des œuvres graves où se révèle une sorte de piété, ni pédante,
ni morose, parce qu’elle discerne et parce qu’elle aime les couleurs
comme des ornements faits pour elle. Le péril est qu’elle enveloppe
de l’inutile et du vent et qu’elle atteigne à peine à quelque joliesse
de lignes. Dès qu’elle a conquis la matière, maîtresse des plans et
des masses, ayant peut-être lutté davantage, non pour sentir mais
pour comprendre, voyez-la broder et faire son œuvre de parure, à la
suite des imaginations. Ingénieuse mais probe, s’entendant mal à
cacher le métier qu’il faut avoir et tenir au secret et qu’elle n’acquiert
qu’avec peine, elle me fait aimer surtout son courage, son ardeur à
la besogne et un miraculeux entêtement. Devant tant de belles
réussites, j’évoque gaiement l’art que, jadis, on lui permit, toutes
les aquarelles du pensionnat. Par la place que déjà elle s’est taillée,
je contrôle une évolution et des gains fort importants.
Aussi j’ai voulu que mon dernier compliment fût pour
Mllc Morstadt, qui peint des animaux dans des paysages, et que je ne
veux tenir ni pour un paysagiste ni pour un peintre animalier. C’est
qu’en fait elle est beaucoup plus que l’un Ou l’autre. Elle est tout
simplement un peintre, un beau peintre pénétrant, naturel, attentif