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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
comparaison, à des artistes carolingiens des ixe et x° siècles. Enfin,
en dépit des sarcophages et sans parler nécessairement d’une
influence directe, j’aimerais à y reconnaître le sentiment et la tra-
dition byzantins et l’œuvre peut-être de moines grecs des monas-
tères de l’Italie méridionale.
Scliultze rapproche le diptyque de Milan des plaques de la Pas-
sion; il les trouve parents et les considère comme un spécimen de
l’art occidental à la fin du v° siècle. Molinier les croit byzantins, du
vi° au vn° siècle; Westwood et Stuhlfauth, carolingiennes du vm°
au ix° siècle, et Kraus penche pour la date la plus ancienne. On
sait que, habituellement, les encadrements étaient des bordures
de feuilles d’acanthe ou de palmier, empruntées aux sources clas-
siques : c’est une caractéristique des ivoires carolingiens sur laquelle
il n’est pas nécessaire de revenir. Une autre caractéristique du
diptyque de Milan, c’est que les anges, nimbés, n’ont pas d’ailes; si,
par conséquent il est démontré, — et je crois qu’on pourrait l’admet-
tre, — qu’après le ivc siècle les anges avaient toujours des ailes,
excepté pendant une période s’étendant du commencement du
vin0 siècle environ jusqu’au milieu du ix° siècle, la date de ce dip-
tyque se réduit au moins aux limites d’un siècle et demi. Les anges
au tombeau de la plaque de Munich n’ont pas d’ailes non plus, mais
certaines autorités soutiennent que la date de cette belle pièce est
réellement antérieure à la pratique de donner aux anges cet orne-
ment.
La charmante petite plaque représen tant l’Ascension qui se trouve
au Musée national bavarois est une des plus intéressantes que nous
ayons à étudier. J’ai déjà énoncé les nombreuses opinions contra-
dictoires à son sujet. Stuhlfauth — et Graeven également, je pense
— est convaincu qu’elle est l’œuvre du ive siècle et, par conséquent,
la plus ancienne parmi les ivoires de ce genre attribués à l’art chré-
tien primitif. Il affirme qu’elle doit avoir été faite à Rome. Pour
se convaincre, dit-il, qu’elle ne peut être d’origine carolingienne, il
suffît de jeter un coup d’œil sur la plaque du Crucifiement de Liver-
pool. Mais pourquoi cette plaque, avec laquelle elle n’a que peu de
parenté? Pourquoi pas celles de VAscension et du Tombeau partagées
entre les musées de Liverpool et de South Ivensington1? Pour moi,
et en continuation de mes théories, je penserais plutôt qu'elle doit
1. Dans la plaque du Crucifiement de Liverpool, la figure du Christ est sans
barbe, n’est pas nimbée, est drapée d’une jupe. Et il n’y a pas de scabellum; dans
la partie inférieure, les anges au tombeau ne sont pas ailés. Sur la feuille de dip-
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comparaison, à des artistes carolingiens des ixe et x° siècles. Enfin,
en dépit des sarcophages et sans parler nécessairement d’une
influence directe, j’aimerais à y reconnaître le sentiment et la tra-
dition byzantins et l’œuvre peut-être de moines grecs des monas-
tères de l’Italie méridionale.
Scliultze rapproche le diptyque de Milan des plaques de la Pas-
sion; il les trouve parents et les considère comme un spécimen de
l’art occidental à la fin du v° siècle. Molinier les croit byzantins, du
vi° au vn° siècle; Westwood et Stuhlfauth, carolingiennes du vm°
au ix° siècle, et Kraus penche pour la date la plus ancienne. On
sait que, habituellement, les encadrements étaient des bordures
de feuilles d’acanthe ou de palmier, empruntées aux sources clas-
siques : c’est une caractéristique des ivoires carolingiens sur laquelle
il n’est pas nécessaire de revenir. Une autre caractéristique du
diptyque de Milan, c’est que les anges, nimbés, n’ont pas d’ailes; si,
par conséquent il est démontré, — et je crois qu’on pourrait l’admet-
tre, — qu’après le ivc siècle les anges avaient toujours des ailes,
excepté pendant une période s’étendant du commencement du
vin0 siècle environ jusqu’au milieu du ix° siècle, la date de ce dip-
tyque se réduit au moins aux limites d’un siècle et demi. Les anges
au tombeau de la plaque de Munich n’ont pas d’ailes non plus, mais
certaines autorités soutiennent que la date de cette belle pièce est
réellement antérieure à la pratique de donner aux anges cet orne-
ment.
La charmante petite plaque représen tant l’Ascension qui se trouve
au Musée national bavarois est une des plus intéressantes que nous
ayons à étudier. J’ai déjà énoncé les nombreuses opinions contra-
dictoires à son sujet. Stuhlfauth — et Graeven également, je pense
— est convaincu qu’elle est l’œuvre du ive siècle et, par conséquent,
la plus ancienne parmi les ivoires de ce genre attribués à l’art chré-
tien primitif. Il affirme qu’elle doit avoir été faite à Rome. Pour
se convaincre, dit-il, qu’elle ne peut être d’origine carolingienne, il
suffît de jeter un coup d’œil sur la plaque du Crucifiement de Liver-
pool. Mais pourquoi cette plaque, avec laquelle elle n’a que peu de
parenté? Pourquoi pas celles de VAscension et du Tombeau partagées
entre les musées de Liverpool et de South Ivensington1? Pour moi,
et en continuation de mes théories, je penserais plutôt qu'elle doit
1. Dans la plaque du Crucifiement de Liverpool, la figure du Christ est sans
barbe, n’est pas nimbée, est drapée d’une jupe. Et il n’y a pas de scabellum; dans
la partie inférieure, les anges au tombeau ne sont pas ailés. Sur la feuille de dip-