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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 14.1918

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Nr. 3
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Du Bus, Charles: L' art et le navire moderne
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https://doi.org/10.11588/diglit.24916#0325

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

304

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Et voici venir d’autres formes et d’autres mœurs, et ressusciter
des fantômes qui étonnent le monde d’hier : bateaux étranges, aplatis
en radeaux pour francbir le rapide et triompher des chenaux herbus,
gràce à cette hélice nouvelle qu’un mât sans hauteur mue en aile de
moulin; surmarin, navire glisseur intorpillabte à propulseur aérien;
bipont d’acier à roue arrière, toute une maison pour coloniaux en
tournée ; affût tlottant aux airs de charpente d’usine, pour la chasse
au sous-marin; chaland de mer à moteur; yacht dont l’essence fait
une autre automobile. Plus de cheminée : car le charbon coûte
cher ou se raréfîe. Plus de fer : car le ciment, tout comme à terre,
a raison du métal. Gette boue devient péniche, cargo, chalutier,
nid à sous-marins, en he'ritage des Foudres d’avant-hier qui por-
taient des torpilleurs. Sur cette machine il y a des màts, supports de
voiles ou de simples signaux; d’autres màts plus mobiles, à tribord,
à bâbord, embarquent et débarquent et se rient du gréviste. Le
voilier reparait plus grand, plus capable, discrètement doublé d’un
moteur auxiliaire à pétrole, pour la traverse'e des calmes. Verrons-
nous la rame resurgir au flanc de nouvelles galères, où l’animera
queique chiourme mécanique?

Aux yeux de nos descendants, le dernier siècle apparaitra sans
jioute comme un àge de transition dont nous-mêmes aurons vu la
fin. Siècle de désordre et de contrastes, cherchant sa voie parmi les
ruines ou dans le sang, dans la fumée où disparut d’abord le bleu
du ciel. Parti de lavoile souveraine, on aboutit à l’hydravion par
ces étapes : vapeur à aubes, vapeur à hélice, engins mixtes où
la chaudière s’affîrme avant de tout tuer autour d’elle et d’envahir
l’ampleur démesurée des carènes. Du ciel, le moteur est descendu
sur l’eau, puis sous les flots mêmes, et voici qu’il remonte au
zénith retrouvé, avee ses agrès rajeunis, décrassés du charbon,
éthérés d’ailes neuves, laissant demain la surface des mers aux trop
lents porteurs de marchandises. Affranchi des vents contraires et
désencombré de son usine, le navire voudra désormais voguer à son
gré dans l’abime ou dans la nue, vainqueur du loui’d et du noir,
maitre, par l’air, de l’eau et du feu, arche céleste ou gnome d’enfer.
Gontre ce demi-dieu, imprévu ou deviné des anciens joui’S, que vau-
draient les fureurs d’Adamastor?

G II AKLE S DU BU S
 
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