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Le Grelot: journal illustré, politique et satirique — 11.1881

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https://doi.org/10.11588/diglit.6800#0118
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11™ ANNEE. — N» 536

PARIS ET DEPARTEMENTS : 15 CENTIMES LE NUMERO

17 juillet 1881.

RÉDACTION

81, t ue des PetiU-Champt, 81
PARIS

ABONNEMENTS

PARIS ET DÉPARTEMENTS

Dn an...... •

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Trois mois...

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Lettres et Mandats à M. Madrb
directeur-gérant
81, tue des Petits-Champs, 81

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81, rue des Petits-Champ*, 81
PARIS

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PAYS DE L'UNION POSTALE

Un an....... ÎO fr. »

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Trois mois... SB KO

L'Agence Ewig, rue d'Amboise, 9
est seule chargée
de recevoir les annonces
pour le journal

Une Victime du 14 Juillet

La famille Cascaret de Fouilly-les-Canards,
est en grand liesse.

On a résolu d'aller à Paris fêter le 14 juillet.

Les billets sont pris ; les provisions entas-
sées dans les paniers, car od ne descendra pas
au buffet s'empoisonner à des prix ridicules.

M. Cascaret a revêtu son complet des grands
jours.

Mme Cascaret sa plus belle robe.

On pousse les enfants, ahuris dans un com-
partiment de seconde classe déjà occupé par
un voyageur, On monte, on se tasse, la ma-
chine siîfle.

On est parti.

Quelques mots sur le voyageur mystérieux.

C'est un homme vêtu de noir, la tète enfon-
cée dans une bonnet de soie, recouvert d'un
chapeau à large bord.

Quelque chose comme un sacristain mâtiné
de donneur d'eau bénite.

L'air rageur en-dessous.

Une fois le train en marche, M. Cascaret
s'adresse à sa femme qui fait une tartine de
confiture au petit dernier.

— Eh bien, bobonne, dit Cascaret, cà y est !
il n'y a plus à y revenir I Dans quelques
heures nous allons être à Paris !.. ohl Paris !
quelle joie de presser de mes semelles son as-
phalte 1

Grognement sourd du voyageur.
Hou ! hou ! hou 1

Cascaret, étonné regarde sa femme.

— Qu'est-ce qu'il a donc, ce monsieur? mur-
mure-t-il à demi-voix à sa moitié.

— Peut-être un cor qui lui fait mal, mon ami,
répood Mme Cascaret.

— Ça se voit en effet, par ces chaleurs...
oh ! Paris, reprend Cascaret avec lyrisme,
Paris qui nous a donné tant de fois le signal
de l'émancipation 1.. Paris auquel nous devons
la République et la liberté 1. quel tonheur de
revoir tes murs !..

Regrognement du voyageur, plus accentué,
cette fois.

— Hou 1 hou 1 hou !.. hou !..

— Ah 1 ça mais, il m'embête, ce particulier
là 1 dit Cascaret.

Qu'est-ce qu'il a donc avec ses : hou ! hou !
hou\

Mme Cascaret s'efforce de calmer son
époux.

— J'aime PiSis, moi, là!., s'écrie Cascaret...
c'est la seule ville de France qui ait flanqué
sa Bastille par terre et qui nous ait débarrassés
de ces rogatons de nobles et de jésuites !..
aussi je l'idolâtre, moi, ce Paris !.. et, j'y vais
voir le 14 juillet... la fête nationale !.. et ceux
qui ne seront pas contents !

A ce moment, le voyageur sombre sort de
son bonnet de soie noire et gémit d'une voix
creuse :

— J'en suis, monsieur, de ceux qui ne sont
pas contents !

— Vous?

— Moi.

Cascaret snffoqué comtemple le bonnet de
soie rageur.

— Votre Paris ?.. reprend celui-ci, ah 1 c'est
quelque chose de propre !..

— Monsieur !...

— Parlons-en. Une Sodome ! uneGomorrhe !
une Babylone !.. une ville qui a mis le feu aux
quatre coins du monde!., qui a chassé ses
bons rois, autant de fois qu'il s'en est pré-
senté... et fichu à la porte son bon empe-
reur!... un père pour elle et pour la France,
monsieur !.. une ville de philosophes, de libres-
penseurs, d'athées, de révolutionnaires, de
bandits, de....

— Si vous continuez !.. hurla Cascaret écu-
mant.

— Je continuerai, monsieur, reprend le
bonnet de soie. Et puissiez-vous m'envoyer
au martyre, comme ces pauvres capucins...

— Qui confessaient nos femmes !

— Et qui les confessaient bien, j'ose le dire!
Oui vous me chasserez de ce compartiment
comme vous avez fait des barnabites, des ma-
ristes, des jésuites, des dominicains et de tant
d'autres braves gens qui partis de rien, en
étaient arrivés à'posséder des millions sans
avoir jamais travaillé. Si çà n'est pas honorable,
ça!..

Passe-moi le pot de raisiné 1 crie Cascaret à
sa femme.

— Oui mon ami, fait Mme Cascaret... tiens...
le voilà., mais qu'est-ce que tu veux en faire?

— Passe-moi le pot de raisinée!

—Elvous, simple homme des champs, vous

allez à Paris avaler des bocks le 14 juillet et y
danser des rondes soi-disant patriotiques, au
lieu de porter votre argent à votre bon curé
qui l'expédierait immédiatement à son évèque
pour ajouter une pierre à l'Eglise de Mont-
martre !.. au lieu de célébrer Rome et le Sacré-
Cœur, vous vous livrez à d'infâmes saturnales
sur les places publiques ?.. au lieu de boire
quelques bonnes bouteilles d'eau de Lourdes,
vous vous soûlerez comme un portefaix en
l'honneur de yotre République sans foi, ni
loi!., ah! tenez, monsieur, vous me faites
une peine énorme!., quant à votre 14 juillet
de malheur !.. jeluidonnemamalédictionl.- en
souhaitant que le diable l'emporte avçc
ceux qui le fêtent 1..

Cette dernière parole n'était pas prononcée,
qne Cascaret an comble de la fureur, enfon-
çait son pot de raisiné sur la tête de l'inconnu.

— 0 ciel I s'écrie Mme Cascaret, qu'as-tu-
fait?... le malheureux vas êtes asphyxié...
Adolphe... Adolphe L.jet'en supplie !.. retire
lui le pot !..

Trop tard, madame !.. murmure d'une voix
étouffée par d( s flots de mélasse l'infortuné
bonnet de soie noire... trop tard !.. c'en est
fait !.. veuillez seulement, à votre arrivée... à
Paris... passerà... l'Univers... prévenir que M...
de... Gavardie.., est mort... victime du 14
juillet ! ! 1

Nicolas Flammèche

GRELOTS

Un farceur entre hier au bureau di,à loca-
tions du théâtre du Vaudeville :

— Madame, vous reste-t-il des fauteuils à
uer?

La buraliste avec empressement :

— Oui, monsieur.

Eh bien 1 madame, d'une chaleur pareille,
ça ne m'étonne pas du tout. Au revoir, ma-
dame.

tO—

X... est un fat assez bien réussi.
Il avise dernièrement une femme char-
mante, la suit et lui offre son bras.

— Vous vous trompez, monsieur, répond la
jeune femme. Je suis une'femme honnête.

— Eh bien ! madame , vous devez fameu-
sement \e regretter, lui répond X... avec
aplomb.

—o—

Deux messieurs passent sur le boulevard,
et l'un d'eux en regarde très attentivement
un troisième qui les croise.

— Qu'avez-vous donc à regarder ainsi ce
bonhomme ?

— C'est chose, vous savez bien, on dit qu'il
bat les femmes.

— - Il bat les femmes i

— Ouil

— Son adresse, cher ami, que je lui conduise
la mienne.

—o—

— Tu fumes le cigare ?

— Oui, et toi ?

— Moi, je fume un brûle-gueule.

— Dame, que veux-tu, chacun fume ce qu'il

a.

—o—

Calino père reçoit la visite de M. Calino fils,
sans le sou pour le moment.

— Voici '20 francs, dit le père d'un ton sé-
vère, mais pour éviter que vous recommenciez
à faire des bêtises, je vous les donne en or.

— Je ne comprends pas, père.

— Un dit que vous jetez Vargent par les fe-
nêtres, en vous donnant de l'or, j'espère que
vous y regarderez à deux fois.

—o—

Une jeune demoiselle demande à visiter un
appartement à louer.

— Madame, dit le concierge, le propriétaire
ne veut pas de femme seule dans la maison.

— Si ce n'est que cela, il sera content, car
j'ai toujours du monde, Dieu merci.

—«-»—-

Qui peut plus peut moins, dit un proverbe :
c'est une affreuse menterie.

La preuve, c'est qu'on peut être plus malin
que Saint-Genest, mais il est impossible de
l'être moins.

Triboulet.

GAZETTE DE MONTRETOUT

Silence, gueulards !

Décidément la France est f...ichue !

Nous voilà plongés dans la m...élasse jus-
qu'aux oreilles 1

, L'Italie va nous déclarer la guerre.
L'Angleterre aussi.
L'Espagne aussi.
La Turquie aussi.

Et Bismarck en profitera pour pêcher en nos
troubles et nous demander six provinces et
treize milliards !

Ah 1 ça va bien ! ça va bien ! comme disait
Blondelet dans le Voyage en Suisse.

C'est une coalition européenne qui menace
la République française.

Quand je di3 européenne,je me trompe, car
nos affaires d'Afrique sontdans un état pitoya-
ble. Notre plus dangereux ennemi n'est pas
Bou Azema, c'est le souverain du Maroc qui a
juré de proclamer la guerre sainte et de nous
subtiliser l'Algérie pendant que nous essayons
de subtiliser la Tunisie. D'autre part Tripoli
fait reluire... l'étendard du prophète... Brrou I
ous que nous vont, bon Jésus ! ous que nous
vont?

Moi qui, pourmes péchés, lis chaque matin
la grande feuille d'annonces de la Cité,

Le Taïmes (!) s'il faut l'appeler par son nom
je commence à croire décidément que notre
plus cruel ennemi c'est l'Angleterre.

Ah 1 ces habillés de soie d'ADgIais ! sont-ils
assez contents de nous voir brouillés avec
l'Italie. Ils von même jusqu'à lui offrir de
l'argent pour couvrir son emprunt !

Le Prussien Blowitz, officier de la Légion
d'honneur (c'est Mac-Mahon qui a fait le
coup!)

Le Prussien Blowitz nous traîne aux gémo-
nies : " Les FraDçais, dit-il, sont abâtardis,
lâches, fainéants; leur armée n'est bonne àrien.
Le moindre caporal de la milice anglaise en
remontrerait à tous leurs généraux de division
C'est la fin de la France.

Blowitz-Nostradamus affirme que les Teutons
et les Celtes reviendront faire manger à leurs
chevaux l'écorce des marronniers des Champs-
Elysées.

Certes la situation est grave, très gravb et
il nous faudrait, pour parer, à tant de mauvais
vouloir un tout autre ministre des affaires
Etrangères que M. Barthélémy Saint-Hi-
laire.

Mais en vérité — et je ne saurais trop le
répéter — attacher lamoindre importance aux
billevisées du Times est une absurdité ou tout
au moins un manque de patriotisme.

Le Hongrois Blowitz, ancien professeur
d'anglais au lycée de Marseille, a su se faire
des rentes, d'abord en épousant la veuve Bet-
ford (née Daniel de Bourbon), dont le mari
était cul-de-jatte ; ensuite en mettant sa plume
au service de Bismark. Le laisserons-nous, ce
correspondant anti-français (officier de la Lé-
gion d'honneur!!!), continuer à Paris son pe-
tit commerce?

Si notre Cabinet a pour deux sous d'éner-
gie, je lui conseille fermement de flanquer le
correspondant du Times à la porte de tous les
ministères.

Car, je le déclare, si jamais un correspon-
dant de journaux français à Londres se per-
mettait de publier contre l'Angleterre les trois
quarts des infamies que Blowitz imprime
contre nous chaque matin, ce ne seraient pas
seulement les ministères qu'on lui fermerait
on l'expulserait carrément du territoire.

11 faut mettre Blowitz en quarantaine. Ce
n'est pa.3 seulement une œuvre de patriotisme,
c'est une œuvre de salubrité publique.

Quant à nous, Français, ne nous inquiétons
pas outre mesure des aboiements et des hur-
lements des Italiens,

Tous ces ruffians, lâches, vicieux, hypocri-
tes, ne peuvent nous pardonner les services
que nous avons été assez sots pour leur
rendre.

Car, comme dit l'immortel Labiche, dans le
Voyage de M. Perrichon :

a II n'y a que les imbéciles qui ne savent
pas porter le poids de la reconnaissance. »

#

* *

Vouloir, pouvoir.

Un de mes amis, de retour de Londres, as-
sistait, il y a huit jours, au grand banquet
offert par le lord Mayor, à Mansion House, aux
représentants de la Littérature.

Il y avait là sir John Bennet, le richissisme
baronnet-horloger-bijoutier de la cité.

Au dessert, sir John en a raconté une très
bonne :

— Imaginez-vous, dit-il, qu'à mon dernier
voyage à Paris j'ai offert à Gambetta de lui
faire faire une bague par mes ouvriers. «Quelle
devise dois-je inscrire sur cette bague ? » lui
demandai-je.

— « Vouloir, c'est pouvoir, » répondit Léon.
Par suite d'une erreur, le graveur m'a rendu
la bague avec cette inscription : < Vouloir pou-
voir. » Je l'ai adressée au Palais-Bourbon, en
demandant à M. le président s'il fallait faire
corriger la devise. « — Oh non! m'a répondu
Gambetta : Vouloir pouvoir est bien plus
drôle ! »

Nota. La bague est visible à l'annulaire de
M. le président.

* *

Vue bonne coquille.

Vous savez qu'on a saisi au Havre, il y a
quelques semaines, les caisses de Mlle Colom-
bier, de retour d'Amérique.

Voici en quels termes le Phare du Littoral
annonce cette aventure :

« Mlle Colombier, dont on avait saisi les
cuisses, s'est plainte au préfet de police qui a
ordonné qu'on les lui restituât sans retard. »

Toujours les Épitaphea

En voici une qui me vient toute fraîche du
cimetière Montmartre :

CI GIT ANATOLE CROQUET

de son vivant

artiste — pédicure — manicure

mort dans toute la maturité de son beau talent.

hélas ! la terre en avait plus BESOIN
que le ciel 1

Horrible !

Les Parisiennes ont depuis quelques années
.a manie de se faire vacciner à la cuisse,

Histoire de ne pas laisser voir dans les bals
l'affreuse cicatrice que laisse l'inoculation.

Les jeunes médecins approuvent fort cemo-
dus vaccinandi :

Ils peuvent ainsi, sans se Jenner, pratiquer
le culte des piqûres 1

*

» *

A. la Sorbonnc

lor Docteur. — A quoi sert le noir animal?
2e Docteur. — A clarifier le sucre brut.
Sans-Gène. — Ils se traitent bien là-dedansl

MONTRETOUT.

ZIG-ZAGS

Dieu protège la France
et le Sénat protège Dieu

Le grand conseil des petites communes de
France continue à faire des siennes, sachant
bien qu'il n'a plus le moindre atome de popu-
larité à perdre.

Don Quichotte prenait sous sa défense les
faibles et les pygmées.

Plus pratiques, les sénateurs couvrent de
leur égide le Tout-Puissant.

Grâce à eux, Dieu continue à avoir ses
grandes et petites entrées dans les écoles.

A dire vrai, on ne sait pas au juste de quel
Dieu il s'agit.

Car il en est des Dieux comme des clyso~
pompes : on en connaît d'un nombre presque
infini de modèles.

Il y a le Dieu des chrétiens ;

Le Dieu des protestants, qui est le même,
mais n'a pas la même famille ;

Jéhovah, le Dieu des Juifs ;
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