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146

JOURNAL DES BEAUX-ARTS.

parties sculptées eussent été faites, soit
globalement par un seul artiste ou au
moins par parties complètes par les ar-
tistes choisis à cet effet. C'est à dire que
nous aurions voulu voir surtout le même
statuaire composer et exécuter les qua-
tre libertés. Le manque d'entente et de
conventions préalables, a empêché l'u-
nité de composition, condition essen-
tielle de la perfection et brisé totalement
l'harmonie indispensable à la beauté;
cette dernière n'existe que dans la li-
berté de la presse et la liberté de l'en-
seignement, grandes et nobles ligures
(pue le môme ciseau a taillées. Cette
subdivision dans les commandes est
une grave erreur dans laquelle on est
tombé pour contenter beaucoup de mon-
de; nous ne saurions assez prémunir
contre le retour de pareilles fautes; el-
les nous condamneraient à ne jamais
rien avoir de complet. Il est facile de se
rendre compte des grands résultats de
l'unité si l'on veut se reporter au prodi-
gieux monument de Frédéric le Grand,
à Berlin , où Rauch a pu développer et
exécuter à lui seul les épisodes multi-
ples de l'œuvre et aussi aux statues que
le Roi deBavièreafaitfaire parSchwan-
thaler pour la salle du Trône à Munich.
On nous objectera peut-être que l'anti-
quité offre des monuments auxquels
plusieurs sculpteurs ont travaillé, no-
tamment le tombeau de Mausole (i) et le
l'arthénon; nous répondrons à cela que
c'étaient des nécessités réclamées par
l'étendue et l'importance des ouvrages
à faire. Il est d'ailleurs rationel qu'une
œuvre sculpturale ait plus d'ensemble
lorsqu'elle est née d'une seule inspiration
que lorsqu'elle émane de plusieurs in-
dividualités souvent peu disposées à
soumettre leurs idées les unes aux au-
tres. L'entente parfaite qui était néces-
saire n'a pas été comprise dans l'objet
qui nous occupe, à en juger par les diffé-
rences visibles de style existant entre
les statues de la colonne; c'est un défaut
à jamais regrettable et qui doit être une
leçon pour l'avenir. La statue du Roi
rend bien le caractère, la pose et la
physionomie de Léopold Ier ; le manteau
que nous aimions beaucoup dans l'ate-
lier de l'artiste nous plaît moins vu à
cette hauteur; un peu de jour circulant
entre les membres, aurait donné plus de
légèreté; en somme c'est une belle œu-
vre. Le bas-relief est un art tout spé-
cial ; n'y réussit pas qui veut. Si la sculp-
ture doit être le bas-relief ne doit que
paraître ; or ces jeunes femmes formant

(1) Le tombeau de Mausole a été découvert en
1857, par M. Ch. T. Newton. Voir Gazette des
Beaux-Arts, 14roe livraison, p. 65.

une ronde et représentant les neuf pro-
vinces, ces belles et riches guirlandes,
n'obéissent pas à cette loi que l'antique,
passé maître en ce genre comme en
beaucoup d'autres, nous a transmise;
le relief est trop fort; la grâce et la no-
blesse n'y gagnent rien non plus qu'aux
formes puissantes dont les ligures sont
pourvues. Si cette partie laisse à désirer,
les lions sont, en revanche, ce que nous
avons vu de plus beau en ce genre; il
est difficile de rendre avec une énergie
plus virile, un plus grand bonheur d'ex-
pression , les mâles et puissants con-
tours de ces nobles animaux; ils ne sont
pas encore coulés en bronze et, à ce su-
jet, nous avons à présenter une obser-
vation qui nous est pénible à faire à
cause de la magnifique réussite de cet
ouvrage. Avant de rendre ces lions dé-
finitifs, n'y aurait-il pas lieu d'examiner
mûrement s'il ne conviendrait pas de
leur enlever ce caractère menaçant qui
contraste d'une manière fâcheuse avec
les idées pacifiques et graves dont la co-
lonne est en quelque sorte l'emblème?
Ne vaudrâit-il pas mieux les voir cou-
chés avec la majesté calme qui est le
signe de la force véritable? ils attire-
raient moins l'attention dans leur rôle
qui n'est que secondaire et ils seraient
plus conformes aux traditions antiques
qui nous montrent les gardiens des mo-
numents au repos. Les Assyriens les ont
assez souvent sculptés debout, mais les
Grecs, ces maîtres de l'art, les ont
presque généralement représentés cou-
chés. L'ampleur de ces lions n'est pas
favorable au stylobate qu'elle rapetisse
visiblement.

Différentes brochures ont été publiées
à l'occasion de l'inauguration de la co-
lonne; la meilleure est celle de M. Félix
Stappacrts. Cet écrivain, avec un remar-
quable esprit d'impartialité, avec un
patriotisme intelligent et aussi avec "un
style d'une élégante limpidité, a tracé
l'historique du monument et donné tous
les détails qui le concernent. On lit
cette brochure avec un vif intérêt. M.
Stappaerts nousaprend que chacune des
commandes prise isolément, les statues,
le groupe de la colonne, les lions, coûte
environ 40,000 francs, l'une un peu
plus, l'autre un peu moins : « La ré-
» partition des travaux, ajoute M. Stap-
» paerts (page 14) eut lieu pendant le
» ministère de M. Piercot. M. De Dec-
» ker en activa ensuite l'éxécution avec
» toute l'ardeur d'un chaleureux et judi-
» cieux patriotisme. Enfin, M. Ro-
» gier, dont la paternité était en cause,
» veilla à leur entier achèvement. »

Médaille de Wiener. L'artiste s'est
élevé à une grande hauteur dans ce tra-
vail qui est assurément une des meil-

leures choses du médailler belge. Le
portrait du Roi figure sur l'une des fa-
ces; sur l'autre on voit les quatre liber-
tés comprises par le graveur d'une toute
autre façon que par les statuaires de la
colonne : sur le premier plan s'avance la
liberté de la presse tenant dans la main
droite une plume et avançant la gauche
vers la foule pour indiquer qu'elle va
parler; ce mouvement est plein de na-
turel et d'un allégorisme qui réunit dans
sa signification la liberté de la plume
et celle de la parole. Les draperies de
cette figure sont d'une grâce et d'un
style peu ordinaires; au second plan
apparaît la liberté des cultes, la plus
insaisissable des quatre et impossible,
selon nous, à représenter d'une maniè-
re parfaitement intelligible. Sur la droi-
te se trouve la liberté d'association et
sur la gauche la liberté de l'enseigne-
ment élevant la lampe classique pour
éclairer les masses. Cette dernière fi-
gure assise, est une création originale
et sévère. Nous devons féliciter l'artiste
de cette production remarquable qui
est un des souvenirs les plus précieux
de nos fêtes.

Cantate couronnée de M. Radoux.
Cette cantate, intitulée le Juif errant,
a obtenu le grand prix. Deux motifs ont
particulièrement plu; c'est d'abord l'air :
0 doux pays des palmes puis le chœur des
démons. Le premier est d'une grande
suavité et d'un caractère très mélanco-
lique; le chœur des démons est d'une
puissante originalité et d'un saisissant
effet. La phrase notée sur ces deux
mots : se desséchera, quoique très sim-
ple , est d'une intention qui atteint
le but et saisit l'auditeur. Quant au
reste, nous devons signaler à regret
des récitatifs interminables dont le ta-
lent du chanteur a sauvé la monotonie.
M. Radoux compose avec art, son or-
chestration est facile et abonde en effets
heureux. Somme toute, c'est une bonne
œuvre mais qui manque de caractère
dans son ensemble. Les paroles sont de
Mme P. Braquaval, institutrice. Ce poète
a fait preuve d'un talent peu commun.
Le vers est bien tourné, plein et har-
monieux. Les pensées viennent facile-
ment et elles sont rendues avec un char-
me particulier.

Ouverture inédite de M. Bémol. Ce
lauréat de 1855 a progressé dans la
science. Il appartient à l'école Bossi-
nienne dont il rappelle un peu trop les
intentions mélodiques. Le public a re-
marqué dans cette œuvre une charmante
entrée de violons qui lui a remis en mé-
moire la pie voleuse. Ce n'est certaine-
ment pas une réminiscence complète,
mais c'est comme un vague écho qui
importune et qu'on voudrait oublier.
 
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