RUBRÜQU1S.
Au commencement du xme siècle il se fit un grand bruit à l’Orient. Du sein des
solitudes glacées et des steppes immenses de l’Asie septentrionale, d’où les Huns
s’étaient élancés jadis sous la conduite d’Attila, on vit s’ébranler et se diriger vers
l’Occident un peuple plus nombreux que les vagues de l’Océan, et dont l’aspect farou-
che et les infernales cruautés glaçaient d’effroi les plus hardis. La mission de ces
hordes sauvages paraissait être une mission de destruction et de mort. Refoulant
devant eux les nations barbares de l’Asie, épouvantées de rencontrer des hommes plus
cruels et plus sauvages qu’elles, les Mongols, partis du Nord, descendaient peu à peu
vers l’Occident, chassant devant eux les peuples avec leurs troupeaux, ne laissant
derrière eux qu’une longue traînée de sang et de ruines ; ces barbares semblaient
décidés à rendre à la terre l’aspect désolé des solitudes primitives du monde nais-
sant. Dans leur vol rapide, les Mongols traversèrent le Volga, pénétrèrent dans le
grand-duché de Moscovie, où ils incendient Kiew et Moscou; — puis, guidé par
Batou-Khan, petit-fils de Tchingis-Khan, le torrent roule vers la Pologne et les fron-