Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (4. Pér. 14.1918)

LE CODRONNEMENT DE LA VIERGE E T LES DOUZE APÔTRES
FRISE SCULPTÉE ET PEINTE DU JUBÉ E N BOIS DE LYNDE (NORD) (XVIC SïÈCLE)

LES JUBÉS

(ORIGINE, ARCHITECTURE, DÉCORATION DÉMOLITION)

(PREMIER ARTICLE)

Super monle excelsum ascendc,
tu, qui evangelizas Sion!
(Isaïe, XL, 9).

Dans la Grande Encyclopédie, M. Enlart1 définit le jubé : une
clôture monumentale séparant le chœur de la nef, formée
de la réunion et du développement du « chancel » (clôture
du chœur), des « ambons » et de la « poutre de gdoire » (trabs
doxalis) interposée entre le clergé et le peuple.

II faut d’abord dire un mot de la traôs ou trabes (poutre; en
français du Moyen àge : tref), l’un des éléments constitutifs du
jubé. Le « tref » traversait la nef à l’entrée du presbyterium et
portait une croix de grande dimension, symbole de la religion
chrétienne. Dans les églises où l’écartement dépassait la portée
d’une poutre, on imagina de soutenir cette traverse par des piliers
reposant sur une clôture de chœur assez basse. Cette transformation
en un motif d’architecture eut bientôt pour conséquence l’embel-
lissement du « tref ». On y employa la pierre, le marbre; on
dressa comme supports ies colonnes arrachées aux édifices antiques,
la traverse fut voilée sous un revêtement d’or ou d’argent; on y
exposait les reliques, on y suspendait les images des saints. Des
« trefs » ainsi construits ont subsisté dans plusieurs basiliques
latines d’Italie, par exempie à Santa Maria in Cosmedin (Rome).
Les traités d’archéologie2 citent celui de Saint-Marc à Venise qui

I. Voiraussi son Manuel d’archéologie.

2. Chanoine Reussens : Êléments d’archéologie religieuse; Louvain, 1881,2 vol.