DOI Heft:
[Mémoires]
DOI Artikel:Fischer, Dagobert: L' abbaye de Saint-Jean-des-Choux
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.19863#0144
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bonheur de sa vie et comme une affaire de salut, la fondation de cet asile
de la foi et de la méditation, qui devait transmettre son nom aux généra-
tions à venir.
L'église dont nous devons la réédification à la piété et peut-être aux
remords du comte Pierre de Lûtzelbourg, nous est parvenue dans son in-
tégrité; elle est l'une des plus remarquables de toute la contrée et l'un des
plus beaux monuments de l'architecture byzantine'. La tour seule, de con-
struction moderne, a été ajoutée à la nef, sans en dénaturer le caractère
primitif. Le plan de cet édifice est celui d'une basilique à trois nefs, sé-
parées par deux rangées de piliers carrés, soutenant des voûtes en plein
cintre, et terminées à l'orient par des absides semi-circulaires, dont les
deux latérales sont aujourd'hui masquées à l'intérieur. Le chœur, la nef et
les bas-côtés sont éclairés par d'étroites fenêtres cintrées. Dans les parois
de la grande nef, les fenêtres sont disposées par trois, dont celle du milieu
est la plus grande. Les voûtes des bas-côtés sont sans nervures; celles de
la nef principale sont garnies d'une arête carrée et d'un gros tore, et ren-
forcées d'arcs parallèles très-saillants. L'arcature de la grande nef et les
absides portent seules les caractères du douzième siècle, époque du style
roman fleuri, et, selon l'opinion des archéologues2, le comte Pierre de
Lûtzelbourg ne fit que restaurer l'église à demi ruinée du village de Meyen-
heimswiller; ils ne rapportent à cette époque que la construction des ab-
sides et de la grande nef, dont le style est beaucoup plus soigné et orné
que celui des autres parties de l'édifice. La façade extérieure des absides
présente les proportions les plus régulières et se couronne d'un ornement
à triples billettes, disposées en damier, reposant sur des pendentifs ter-
minés par des têtes d'hommes et d'animaux de la plus belle exécution. Le
socle porte une large et belle moulure. A la naissance du pignon de la nef
se trouve, de chaque côté, une grosse gargouille en pierre de taille, repré-
sentant un monstre hideux, tenant entre ses griffes une religieuse.
A cette époque de ferveur religieuse, la satire anti-monacale fit invasion
dans le domaine de la statuaire, des formes sataniques, bestiales, grima-
cèrent aux chapiteaux et aux gargouilles des églises, et les artistes étaient
des êtres privilégiés, qui pouvaient se permettre toute sorte de fantaisies3.
Une petite porte latérale, qui s'ouvrait vers le sud et qui est aujourd'hui
bouchée, donnait entrée au chœur; elle est décorée sur les deux côtés de
1. Cette église se trouve classée parmi les monuments historiques.
2. Voy. Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d'Al-
sace, t. II, p. 188.
3. M. Mérimée, Voyage dans l'ouest de la'France, p. 155.
bonheur de sa vie et comme une affaire de salut, la fondation de cet asile
de la foi et de la méditation, qui devait transmettre son nom aux généra-
tions à venir.
L'église dont nous devons la réédification à la piété et peut-être aux
remords du comte Pierre de Lûtzelbourg, nous est parvenue dans son in-
tégrité; elle est l'une des plus remarquables de toute la contrée et l'un des
plus beaux monuments de l'architecture byzantine'. La tour seule, de con-
struction moderne, a été ajoutée à la nef, sans en dénaturer le caractère
primitif. Le plan de cet édifice est celui d'une basilique à trois nefs, sé-
parées par deux rangées de piliers carrés, soutenant des voûtes en plein
cintre, et terminées à l'orient par des absides semi-circulaires, dont les
deux latérales sont aujourd'hui masquées à l'intérieur. Le chœur, la nef et
les bas-côtés sont éclairés par d'étroites fenêtres cintrées. Dans les parois
de la grande nef, les fenêtres sont disposées par trois, dont celle du milieu
est la plus grande. Les voûtes des bas-côtés sont sans nervures; celles de
la nef principale sont garnies d'une arête carrée et d'un gros tore, et ren-
forcées d'arcs parallèles très-saillants. L'arcature de la grande nef et les
absides portent seules les caractères du douzième siècle, époque du style
roman fleuri, et, selon l'opinion des archéologues2, le comte Pierre de
Lûtzelbourg ne fit que restaurer l'église à demi ruinée du village de Meyen-
heimswiller; ils ne rapportent à cette époque que la construction des ab-
sides et de la grande nef, dont le style est beaucoup plus soigné et orné
que celui des autres parties de l'édifice. La façade extérieure des absides
présente les proportions les plus régulières et se couronne d'un ornement
à triples billettes, disposées en damier, reposant sur des pendentifs ter-
minés par des têtes d'hommes et d'animaux de la plus belle exécution. Le
socle porte une large et belle moulure. A la naissance du pignon de la nef
se trouve, de chaque côté, une grosse gargouille en pierre de taille, repré-
sentant un monstre hideux, tenant entre ses griffes une religieuse.
A cette époque de ferveur religieuse, la satire anti-monacale fit invasion
dans le domaine de la statuaire, des formes sataniques, bestiales, grima-
cèrent aux chapiteaux et aux gargouilles des églises, et les artistes étaient
des êtres privilégiés, qui pouvaient se permettre toute sorte de fantaisies3.
Une petite porte latérale, qui s'ouvrait vers le sud et qui est aujourd'hui
bouchée, donnait entrée au chœur; elle est décorée sur les deux côtés de
1. Cette église se trouve classée parmi les monuments historiques.
2. Voy. Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d'Al-
sace, t. II, p. 188.
3. M. Mérimée, Voyage dans l'ouest de la'France, p. 155.