Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette archéologique: revue des Musées Nationaux — 2.1876

DOI Heft:
Nr. 5
DOI Artikel:
Berger, Philippe: Lettre à M. Fr. Lenormant
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.25049#0123

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
— 115 —

puniques, de l’autre. Cette date est, il est vrai, peu reculée, et nous possédons un
grand nombre d’inscriptions plus anciennes; elle a pourtant ici une signification
particulière , si l’on songe que la ville phénicienne et la ville romaine sont séparées
par un intervalle de 150 ans, et correspondent à deux civilisations absolument
différentes.

L’archéologie fournirait à elle seule des indices presque suffisants pour prouver
mon assertion. L’ornementation des stèles est grecque ; on y retrouve tous les
caractères du style ionique ; on sent que l’architecture romaine n’a pas encore passé
par là. Les symboles sont aussi ceux des monnaies autonomes de Carthage : le
caducée, le palmier, le taureau, les poissons (1). Il est vrai que quelques-uns d’entre
eux se retrouvent sur les monnaies d’époque romaine, mais ils ont en général sur
ces dernières un cachet particulier qui ne permet guère la confusion; le caducée,
par exemple, figure indistinctement sur les monnaies de l’ancienne et de la nou-
velle Carthage, mais, sur les monnaies de la Carthage romaine, il a des ailes; au con-
traire, sur les monnaies autonomes, de même que sur nos inscriptions, il en est
toujours dépourvu.

L’antiquité de ces monuments ressort encore plus clairement de leur comparai-
son avec les inscriptions néo-puniques ; ces deux arts sont séparés par un abîme.
Sur les monuments qui portent des inscriptions néo-puniques, le dessin est à la
fois plus grossier et plus massif; ce n’est pas l’enfance de l’art, c’est la barbarie ;
les symboles sont plus compliqués, les personnages, tout en étant moins corrects,
ont des proportions plus considérables, et des cintres épais ont pris la place des co-
lonnes ioniennes.

La langue des inscriptions nous amène aux mêmes conclusions. Plusieurs, en
effet, portent la formule rUtnfimp D;? « le peuple de Carthage », si fréquente
sur les monnaies carthaginoises antérieures à la perte de la Sicile. Toutes, il est
vrai, n’ont pas la même antiquité, mais toutes se distinguent par le caractère pres-
que exclusivement phénicien de leur onomastique, et par l’absence de noms romains ;
or, quelque ardent que fut le patriotisme des habitants de Carthage, on ne peut pas
oublier que c’est à une colonie romaine qu’elle a dû son prompt relèvement. L’élé-
ment romain a dû laisser des traces dans la nouvelle société carthaginoise ; et il en
a laissé, en effet, sur les inscriptions néo-puniques; les noms romains sont assez
nombreux; on trouve même des inscriptions entières bilingues, latines et néo-pu-
niques ; nous n’en connaissons pas une seule qui soit latine et punique.

L’écriture néo-punique est en effet à peu près contemporaine de l’arrivée des
Romains en Afrique. Il ne faut pas en chercher la preuve dans les monnaies de Car-
thage, elles nous font défaut pendant cent cinquante ans, et, quand elles reparaissent,

(1) Müller, Numismatique de l’ancienne Afrique, t. II, p. 75 ss.
 
Annotationen