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Gazette archéologique: revue des Musées Nationaux — 12.1887

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Martha, Jules: Note sur une sirène en terre cuite trouvée à Vulci: (cabinet des médailles)
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https://doi.org/10.11588/diglit.25011#0305

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NOTE SUR UNE SIRENE EN TERRE CUITE TROUVEE A. VULCI. 269

que plusieurs urnes cinéraires de Volterra sont ornées de bas-reliefs se rapportant à
l’aventure d’Ulysse avec les Sirènes1, on a tout lieu de penser que la Sirène était en
Etrurie un symbole funéraire, comme on sait qu’elle l’était chez les Grecs1 2. Ce symbole,
les Etrusques l’avaient-ils emprunté à l’art grec ou le tenaient-ils d’une tradition anté-
rieure, commune à la Grèce et à l’Italie? La question est de celles qu’en l’état actuel il
est impossible de résoudre.

Le sens de la Sirène, en tant que symbole funéraire, est assez difficile à déterminer.
Certains textes et plusieurs monuments figurés nous la présentent comme la person-
nification du deuil et des regrets. Dans Euripide3, Hélène convie les Sirènes à pleurer
avec elle la mort de ceux qu’elle a aimés. Sur le bûcher d’Héphestion, Alexandre dispose
des Sirènes colossales avec des chanteurs cachés dans leurs flancs, qui font entendre des
hymnes funèbres4. Des stèles nous montrent des Sirènes dans l’attitude de la douleur,
la tête penchée et appuyée sur la main5, ou bien s’arrachant les cheveux et se frappant
la poitrine6. Ailleurs, on en voit qui tiennent une lyre, l'instrument ordinaire dans les
cérémonies des funérailles7. On les concevait donc comme de divines pleureuses, dont
la voix servait d’écho et en même temps de soutien aux lamentations humaines, en un
mot comme les Muses de la douleur.

Mais on les concevait aussi autrement. A côté de ces vierges compatissant aux angoisses
de l’agonie, sublimes interprètes du désespoir, voici les Sirènes malfaisantes, les Sirènes
fascinatrices, « aux chants homicides8 », dont l’harmonie irrésistible séduit, égare et
tue, auxquelles Ulysse n’échappe que par la ruse que l’on connaît. Ces Sirènes-là se
distinguent à peine des Harpyes. Comme elles, ce sont des divinités ravisseuses, quelque
chose comme des oiseaux de proie, pourvoyeurs de la mort. Ce n’est plus la douleur ni
les regrets qu’elles symbolisent, c’est la malignité de cette force mystérieuse et invin-
cible qui arrache l’homme aux joies de la terre et l’entraine dans l’inconnu.

De là à concevoir les Sirènes comme des divinités infernales, il n’y a qu’un pas. Aussi
voit-on Sophocle associer le nom des Sirènes à celui d’Hadès dont elles chantent les lois
immuables9, et Platon, dans le récit de Her l’Arménien, les faire siéger à côté des
Parques10. Puissantes auprès des rois du monde souterrain, elles servent d’intermédiaires
entre la terre et le séjour des morts et disposent Perséplione à recevoir comme un hom-

1. Dennis, Ciliés and cemeteries, t. II, p. 93.

2. Sta kclberg, Graeber der Uellenen, pl. 74. Panofka,
Cab. Pour talés, p. 73 et suiv. Pervanoglou, Grabsteine der
allen Griechen, p. 79. Brueckner, Atlische Grabstelen,
p. 26-32. Stephani, Compte rendu, 1866, p. 56; 1870,
p. 146; 1880, p. 103. Schrader, Die Sirenen nach ihrer
Bedeutung und kunstlerischen Darstellung im Allerthum,
p. 86-95. Cerquand, Etude sur les sirènes.

3. Hélène, v. 167 et suiv.

4. Diodore de Sicile, XVII, 115.

5. Monuments grecs publiés par l'assoc. des EC grecques,

1887, p. 22, pl. 3 (stèle d’Apollonie).

6. Stèle de Nice dans Cerquand, pl. II. Cf. les sirènes
de la tombe délia Scimia à Chiusi. Voir aussi plusieurs
terres cuites de Myrina (Pottier et Reinach, Catalogue,
nos 148-160).

7. Benndorf, Griech. u. Sicil. Vasenb, pl. 34. Pottier,
Etude sur les lécythes blancs, p. 63, 64; pl. 4; Annali,
1864, pl. OP.

8. Porphyr. Vit. Pythag., 39.

9. Sophocle, fragm. 254 (Didot, p. 294).

10. République, X, p. 617, B.
 
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