LA VÉNUS DRAPEE AU MUSÉE DU LOUVRE.
image de cette déesse dans un sanctuaire de Rome qui soit citée par les auteurs comme
l’œuvre d’un artiste renommé1.
Les premiers qui aient identifié cette statue à l’original de la série que nous étudions
sont les frères Zanetti, qui se fondaient pour cela sur les monnaies de Sabine citées
plus haut2. Cette opinion, reprise et développée par E.-Q. Visconti3, fut approuvée,
mais avec des réserves au sujet du prototype, par Gerhard4, Brunn5, J afin6, Otfried
Millier7, Overbeck8 et Bernoulli9. Elle comporte plusieurs objections dont aucune ne
nous semble décisive si l’on n’attribue pas à Arcésilas l’invention même du motif. L’air
archaïque de la tête, dans la réplique de Paris, peut s’expliquer par l’imitation d’un
modèle plus ancien ou par la tendance archaïsante d’Arcésilas, que Pline mentionne en
même temps que Pasitélès10. Or, Pasitélès, contemporain de Pompée, passe pour le
fondateur de l’école d’archaïsme qui fleurit au commencement de l’Empire11. On peut
objecter encore que d’autres monnaies, avec la légende YENERI GENETRICI, portent
1. Wissowa, de Venais situaiacris. p. 25.
2. Zanetti, Statue di Venezia, t. II, pl. xiv (la planche
représente une statue avec la légende Musa o Venere géni-
trice). Dans le commentaire de cette planche, il est ques-
tion d’une statue falta di un Archesilao (sic) et représen-
tant la Vénus Gcnetrix. Visconti cite lui-même les Zanetti
comme ayant les premiers exprimé cette opinion;
M. Wissowa, à la suite de Gerhard, se trompe (de
Veneris simulacris, p. 26) eu attribuant la priorité
de l’hypothèse à Visconti. Ce dernier ajoute même
(Mus. Pio Clan., t. III. p. 54, note) : « Une petite statue
de bronze, pareillement vêtue, qui est dans la villa
Pinciana et qui a été publiée par Montelatici, Villa
Borghèse, p. 278, et par Montfaucon, Ant. expliquée, t. I,
part. I, pl. cii, n° 3, fait voir que ce rapport n’avait pas
échappé aux antiquaires du siècle passé. »
3. Visconti, Masco Pio Clemenlino, éd. in-8°, t. 111,
pl. vin, p. 44 et suiv.
4. Gerhard, Akademische Abhandlungen, I, p. 260.
5. Brunn, Geschichte der Künstler, t. I, p. 601.
6. .lahn, Berichte der sæchsischen Gesellschaft der
Wissenschaften, 1861, p. 113.
7. O. Muller, Handbuch der Archœologie, § 376, 3.
8. Overbeck, Geschichte der Griechischen Plastik, 3e éd.,
t. U, p. 421.
9. Bernoulli, Aphrodite, p. 96 et suiv. La même opinion
vient d’être adoptée par M. Waldstein (Amer. Journ. of
archaeol., 1887, p 1-13), qui s’efforce d’établir une ana-
logie entre la Vénus Genetrix et celle de l’Esquilin, d’une
part, le groupe dit Oreste et Électre, de l’autre. Sur ce
dernier point, il a peut-être vu juste, mais l’ignorance
où il est des répliques en terre cuite l’a conduit à
rajeunir beaucoup trop le motif original.
10. Pline, Hist. Nat., XXXV, 155. Comme Pasitélès,
Arcésilas était célèbre pour ses modèles en terre cuite.
(Overbeck, Schriflquellen, nos 2268 et 2263.)
11 .Cf. Kekulé, die Grappe des Künstlers Menelaos, Leipzig,
1870 ; Overbeck, Geschichte der Plastik, t. II, p. 411 et suiv.;
Lœwy, Inschriften griechischer Bildhauer, 1885 , nos 374,
375; Flasch, Archæologische Zeilung, 1878, p. 119 et
suiv.; Wolters, Gipsabgüsse, nos 217-226; Waldstein,
Pasiteles and Arcesilaos (American Journal of archaeol.,
1887, p. 1). Pasitélès semble avoir ressuscité la sculpture
chryséléphantine en exécutant un Jupiter d’or et d’ivoire
(Overbeck, Schriflquellen, n° 2262 = Pline, Hist. Nat.,
XXXVI, 39) ; c’était d’ailleurs un érudit et un historien de
l’art (Schriflquellen, n° 2264), ce qui s’accorde avec le
goût d’archaïsme qu’on lui attribue. Il ne nous reste
aucune oeuvre de lui, mais nous possédons une statue
d’Apollon à la villa Albani (Overbeck, Gesch. der Plastik,
t. II, fig. 150 a), signée de Stephanos nACIT€AOYC
MA0HTHC (Lœwy, Inschr. griech. Bildh., n° 374), dont
il existe de nombreuses répliques. Cette figure, qui est
encore répétée dans le groupe dit Oreste et Électre à
Naples (Overbeck, Gesch. der Plast., t. II, fig. loi), est la
copie ou l’imitation d’un original grec du temps de
Polyclète suivant Conze (Beilr. zur Gesch. der griech.
Plastik, p. 24); je croirais volontiers que cet original
est un peu plus récent et appartient à l'école attique.
Un autre groupe archaïsant, à la villa Ludovisi, est signé
de Menelaos ITEOANOY MA0HTHC (Ov erbeck,
t. Il, fig. 152; Lœwy, n° 375.) Ces œuvres, et d’autres
analogues, attestent l'existence d’une école archaïsante,
fondée peut-être par l’érudit Pasitélès, qui s’est pro-
posé pour but de reproduire et d’imiter les motifs de
l’ancienne sculpture grecque, par réaction contre l'imita-
tion, alors prédominante, de la sculpture asiatique et
alexandrine postérieure à Alexandre. Cette école n’avait
aucune originalité et sans doute aussi ne prétendait-elle
pas à ce mérite, beaucoup moins important aux yeux des
anciens qu’aux nôtres, comme nous aurons occasion de le
répéter.
image de cette déesse dans un sanctuaire de Rome qui soit citée par les auteurs comme
l’œuvre d’un artiste renommé1.
Les premiers qui aient identifié cette statue à l’original de la série que nous étudions
sont les frères Zanetti, qui se fondaient pour cela sur les monnaies de Sabine citées
plus haut2. Cette opinion, reprise et développée par E.-Q. Visconti3, fut approuvée,
mais avec des réserves au sujet du prototype, par Gerhard4, Brunn5, J afin6, Otfried
Millier7, Overbeck8 et Bernoulli9. Elle comporte plusieurs objections dont aucune ne
nous semble décisive si l’on n’attribue pas à Arcésilas l’invention même du motif. L’air
archaïque de la tête, dans la réplique de Paris, peut s’expliquer par l’imitation d’un
modèle plus ancien ou par la tendance archaïsante d’Arcésilas, que Pline mentionne en
même temps que Pasitélès10. Or, Pasitélès, contemporain de Pompée, passe pour le
fondateur de l’école d’archaïsme qui fleurit au commencement de l’Empire11. On peut
objecter encore que d’autres monnaies, avec la légende YENERI GENETRICI, portent
1. Wissowa, de Venais situaiacris. p. 25.
2. Zanetti, Statue di Venezia, t. II, pl. xiv (la planche
représente une statue avec la légende Musa o Venere géni-
trice). Dans le commentaire de cette planche, il est ques-
tion d’une statue falta di un Archesilao (sic) et représen-
tant la Vénus Gcnetrix. Visconti cite lui-même les Zanetti
comme ayant les premiers exprimé cette opinion;
M. Wissowa, à la suite de Gerhard, se trompe (de
Veneris simulacris, p. 26) eu attribuant la priorité
de l’hypothèse à Visconti. Ce dernier ajoute même
(Mus. Pio Clan., t. III. p. 54, note) : « Une petite statue
de bronze, pareillement vêtue, qui est dans la villa
Pinciana et qui a été publiée par Montelatici, Villa
Borghèse, p. 278, et par Montfaucon, Ant. expliquée, t. I,
part. I, pl. cii, n° 3, fait voir que ce rapport n’avait pas
échappé aux antiquaires du siècle passé. »
3. Visconti, Masco Pio Clemenlino, éd. in-8°, t. 111,
pl. vin, p. 44 et suiv.
4. Gerhard, Akademische Abhandlungen, I, p. 260.
5. Brunn, Geschichte der Künstler, t. I, p. 601.
6. .lahn, Berichte der sæchsischen Gesellschaft der
Wissenschaften, 1861, p. 113.
7. O. Muller, Handbuch der Archœologie, § 376, 3.
8. Overbeck, Geschichte der Griechischen Plastik, 3e éd.,
t. U, p. 421.
9. Bernoulli, Aphrodite, p. 96 et suiv. La même opinion
vient d’être adoptée par M. Waldstein (Amer. Journ. of
archaeol., 1887, p 1-13), qui s’efforce d’établir une ana-
logie entre la Vénus Genetrix et celle de l’Esquilin, d’une
part, le groupe dit Oreste et Électre, de l’autre. Sur ce
dernier point, il a peut-être vu juste, mais l’ignorance
où il est des répliques en terre cuite l’a conduit à
rajeunir beaucoup trop le motif original.
10. Pline, Hist. Nat., XXXV, 155. Comme Pasitélès,
Arcésilas était célèbre pour ses modèles en terre cuite.
(Overbeck, Schriflquellen, nos 2268 et 2263.)
11 .Cf. Kekulé, die Grappe des Künstlers Menelaos, Leipzig,
1870 ; Overbeck, Geschichte der Plastik, t. II, p. 411 et suiv.;
Lœwy, Inschriften griechischer Bildhauer, 1885 , nos 374,
375; Flasch, Archæologische Zeilung, 1878, p. 119 et
suiv.; Wolters, Gipsabgüsse, nos 217-226; Waldstein,
Pasiteles and Arcesilaos (American Journal of archaeol.,
1887, p. 1). Pasitélès semble avoir ressuscité la sculpture
chryséléphantine en exécutant un Jupiter d’or et d’ivoire
(Overbeck, Schriflquellen, n° 2262 = Pline, Hist. Nat.,
XXXVI, 39) ; c’était d’ailleurs un érudit et un historien de
l’art (Schriflquellen, n° 2264), ce qui s’accorde avec le
goût d’archaïsme qu’on lui attribue. Il ne nous reste
aucune oeuvre de lui, mais nous possédons une statue
d’Apollon à la villa Albani (Overbeck, Gesch. der Plastik,
t. II, fig. 150 a), signée de Stephanos nACIT€AOYC
MA0HTHC (Lœwy, Inschr. griech. Bildh., n° 374), dont
il existe de nombreuses répliques. Cette figure, qui est
encore répétée dans le groupe dit Oreste et Électre à
Naples (Overbeck, Gesch. der Plast., t. II, fig. loi), est la
copie ou l’imitation d’un original grec du temps de
Polyclète suivant Conze (Beilr. zur Gesch. der griech.
Plastik, p. 24); je croirais volontiers que cet original
est un peu plus récent et appartient à l'école attique.
Un autre groupe archaïsant, à la villa Ludovisi, est signé
de Menelaos ITEOANOY MA0HTHC (Ov erbeck,
t. Il, fig. 152; Lœwy, n° 375.) Ces œuvres, et d’autres
analogues, attestent l'existence d’une école archaïsante,
fondée peut-être par l’érudit Pasitélès, qui s’est pro-
posé pour but de reproduire et d’imiter les motifs de
l’ancienne sculpture grecque, par réaction contre l'imita-
tion, alors prédominante, de la sculpture asiatique et
alexandrine postérieure à Alexandre. Cette école n’avait
aucune originalité et sans doute aussi ne prétendait-elle
pas à ce mérite, beaucoup moins important aux yeux des
anciens qu’aux nôtres, comme nous aurons occasion de le
répéter.