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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 7.1860

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Nr. 1
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Mantz, Paul: Raffet
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https://doi.org/10.11588/diglit.17223#0010

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6 GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

ont vu. Au siècle suivant, la vérité n'est pas davantage dans les œuvres
des peintres à grand fracas, comme Antoine Goypel, Lemoine ou Carie
Vanloo; elle est dans Watteau, dans Chardin, dans les graveurs à l'eau-
forte, dans les humbles faiseurs de vignettes. Si, plus tard, David a fait
œuvre d'historien, c'est le jour où, infidèle à son idéal, il peignit d'après
nature, et sans songer au bas-relief antique, Marat expirant dans sa bai-
gnoire ensanglantée. Mais David semble avoir voulu se faire pardonner
plus tard cette concession aux émotions du moment. jN'écrivait-il pas à
Gros — qui venait de peindre Abonkir, Eylau, les Pyramides, — de
renoncer aux « sujets futiles » et aux « tableaux de circonstance? » Gros
n'écouta qu'à demi ce sévère conseil. Mais il s'en faut de beaucoup que
ce maître, si bien doué pourtant du côté de l'observation et du portrait,
ait été toujours historique dans ses batailles impériales; loin de là, il a
plus d'une fois mêlé aux formes vivantes la froide silhouette de la statue.
En ce qui touche les peintres d'aujourd'hui, l'observation est plus évi-
dente encore, et lorsque les curieux de l'avenir voudront apprendre
l'histoire de ce temps, ce n'est pas dans les œuvres des académiques
qu'ils iront chercher leurs preuves, mais bien dans celles de ces artistes
plus modestes qui, sans emphase et sans mensonge, ont raconté du bout
du crayon ou de la plume les choses que nous avons vues, et qui, en ne
croyant peut-être faire que la chronique du moment, en ont bien souvent
écrit l'histoire.

Raffet était de ceux-là. Le fait moderne l'a ému; il a senti la poésie
des réalités contemporaines : par le talent et par le cœur, c'est un des
nôtres. S'il eut voulu persévérer dans la voie où ses amis le poussèrent
un instant, il eût pu faire, comme quelques-uns, de la grande peinture
prétentieuse et vide, de la mythologie, du mensonge, car son organisa-
tion avait d'étranges richesses, des dons qu'il n'a peut-être pas tous mon-
trés dans leur plénitude. Un instinct meilleur lui révéla le champ plus
modeste en apparence où devait s'exercer son activité : il modéra son
ambition, il diminua son rôle; il ne fut, pour ceux qui jugent vite, et qui
peut-être jugent mal, qu'un dessinateur d'illustrations, qu'un lithographe
épris des scènes militaires, qu'un touriste qui raconte ses voyages. Oui,
sans doute, Raffet fut tout cela, mais il fut autre chose encore, et en
étudiant ici, à notre loisir, ce noble talent que nous avons aimé toujours,
nous essayerons d'indiquer quels services il a rendus à l'art.

Raffet, il faut le dire, eut des commencements difficiles et des hésita-
tions de toutes sortes. Né à Paris le 1er mars iSOZï, il était, non pas le
fils comme on l'a écrit, mais le neveu du commandant Raffet qui, placé
à la tête d'un bataillon delà garde nationale en des jours difficiles, a sa
 
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