Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 7.1860

DOI Heft:
Nr. 5
DOI Artikel:
Mouvement des arts et de la curiosité
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.17223#0322

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
MOUVEMENT DES ARTS ET DE LA CURIOSITÉ

VENTE D'UN BUREAU HISTORIQUE

Nulle époque n'aura vu plus de variations que la nôtre dans les caprices de la
mode. L'art industriel, depuis trente ans, au lieu de se replier sur lui-même et de ras-
sembler ses forces pour créer des produits véritablement originaux, prend à tâche, le
plus souvent, d'imiter les modèles des époques antérieures. A la suite de la renaissance
littéraire de 1825, les dessinateurs les plus habiles et les sculpteurs les plus adroits ont
consacré leur crayon et leur ciseau à des pastiches du moyen âge et de la renaissance.
C'était le triomphe de la couleur locale, et on a imité, dans un moment, jusqu'aux
piqûres de vers, pour donner l'apparence du vieux chêne à l'érable passé à la teinture
de feuille de noyer. Puis les bahuts et les escabeaux ont fait place aux formes rondes
et tourmentées du siècle de Louis XV. Depuis quelques années, les magasins de nos
fabricants regorgeaient d'imitations de l'illustre Boule, et, plus récemment encore, les
formes droites et maigrelettes des meubles Louis XVI ont délogé des salons de nos mo-
dernes aristocraties, le bois de rose et l'ébène burgautée.

Nous ignorons ce que nous réserve l'avenir, mais nous souhaitons, du fond de
notre cœur, que le caprice fiévreux de nos tapissiers ne nous impose point la période
de l'empire. Au reste, ces têtes de sphinx qui méditent à froid, emprisonnées dans une
gaîne d'acajou, ces chimères à tête d'aigle qui retroussent, sur le profil des secrétaires,
leur queue dorée et lèvent la patte devant un grêle trépied, datent déjà des dernières
années du règne de Louis XVI. L'abbé Barthélémy donna, dans son Voyage du jeune
AnacharsiSj le signal de la réaction pseudo-antique. Madame Vigée-Lebrun raconte,
dans ses Mémoires, un dîner artistique qui lui valut, sinon plus de gloire, au moins
plus de réputation, dans les cercles de l'époque, que ses meilleurs portraits. Tous les
convives, drapés à la grecque dans des rideaux, étaient couronnés de roses; un anti-
quaire avait prêté des vases étrusques; on mangea du brouet noir et l'on but du vin de
Scio, et Lebrun-Pindare récita, en s'accompagnant de la lyre, des odes dont les con-
vives chantaient le refrain en invoquant Bacchus.

Les élèves de David voulurent imposer à leurs contemporains frileux le manteau
d'Alcibiadc ou la tunique de Phryné. Malgré les essais tentés publiquement par les
plus belles personnes du Directoire, la majorité protesta contre les engelures et les
rhumes de cerveau imminents, mais cette majorité consentait à s'asseoir sur des tabou-
rets en X, et l'expédition d'Égypte vint donner une nouvelle vogue à tout ce qui, de
près ou de loin, pouvait rappeler l'antiquité.

vu. • 40


 
Annotationen