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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 23.1867

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Nr. 2
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Mantz, Paul: Les beaux-arts à l'Exposition Universelle, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.19884#0142

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BEAUX-ARTS.

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fond; nous sommes de mauvais peintres, parce que nous sommes les
peintres de l'esprit.

L'histoire a répondu aux théories de ces mystiques. Elle démontre
que, dans tous les temps, les artistes qui ont le mieux exprimé les dou-
leurs, les tendresses de l'âme, ses effusions religieuses, ce sont ceux
qui ont su mettre au service de leur sentiment les moyens les plus puis-
sants, les procédés les plus décisifs. Le xvc siècle n'a pas craint de se
compromettre dans les choses de la matière en se servant du dessin
comme d'une écriture précise, accentuée, profonde, en demandant à la
couleur de devenir un langage; les Van Eyck, Memling, Rogier Van der
Weyden, Botticelli, Ghirlandajo, Signorelli et Mantegna lui-même, n'ont
pas cru se déshonorer en faisant appel à toutes les ressources que l'art
du peintre peut mettre à la disposition de la pensée ou de l'émotion. Le
xvie siècle a raisonné de même. Michel-Ange et Léonard professaient
cette théorie, que, pour faire exprimer un sentiment à une forme, il est
indispensable de la modeler; et, plus tard, celui qui devait parvenir à
traduire l'intraduisible, Rembrandt, a jugé que, pour mettre le specta-
teur de moitié dans sa rêverie, le peintre devait ajouter à la vérité des
attitudes, à la justesse de la mimique, le mystérieux effet de la lumière,
et c'est avec du noir et du blanc qu'il est parvenu à montrer l'intérieur
de l'âme, ce qu'on ne voit pas.

Et remarquez que lorsque les Allemands modernes essayent de se
faire un mérite de leur impuissance pittoresque ou graphique, ils mentent
à leur propre tradition. Albert Durer aurait été désolé qu'on le prît pour
un mauvais peintre; Lucas Cranach, Holbein (et celui-là, j'espère, a vu
clair dans l'âme humaine), ne rougissaient pas de savoir leur métier. Ces
grands hommes n'avaient d'ailleurs aucune prétention philosophique :
ils croyaient seulement que la vie mérite d'être racontée, et que, pour
l'exprimer dans son mystère intime, un,peu de dessin est nécessaire, et
même un peu de couleur. Nous partageons ces préjugés; aussi avons-
nous hâte de voir à l'œuvre les penseurs qui, de l'autre côté du Rhin,
font si bon marché des moyens matériels. Sans vouloir nous brouiller
avec la géographie et avec la politique, nous demandons la permission de
réunir dans notre étude les Prussiens, les Bavarois, les Autrichiens, en
un mot tous ceux qui sont plus ou moins Allemands. Il y a sans doute
des différences entre les membres de la grande famille germanique ; mais
elles sont peu appréciables à l'Exposition, et le jugement, nécessairement
incomplet, que nous devons formuler aujourd'hui ne saurait avoir pour
base que les œuvres réunies au Champ de Mars.

Les expositions universelles de Paris et de Londres n'ont pas été très-
 
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