m
GAZETTE DES B EAUX-All TS.
crayon. De l’une, dans le Soir, de l’autre, dans le Grelot. Là il « blagua»
la Commune, le citoyen Courbet en tête. Le ventripotent maître peintre,
appuyé d’une main sur la colonne renversée comme sur une canne,
accueillant d’un air protecteur Henri IV et Louis XIV descendus de leur
monture de bronze, fut le sujet d’une caricature que l’on se disputa.
L’année de la France, ainsi que l’appela le maréchal Mac-Mahon
dans une proclamation, balaya toutes ces ordures, et des hommes sans
aucun talent, les mêmes peut-être qui insultaient l’empire déchu et les
hommes de septembre malheureux, accablèrent la Commune dispersée
et se moquèrent des habitants à contre-cœur des caves, sur le corps
desquels il était poussé des champignons.
Les artistes avaient quitté Paris pour la plupart : les uns, afin de
n’être point forcés de servir, dans les rangs de la garde nationale, une
cause ou des passions qui leur répugnaient; les autres, afin de fuir le
spectacle honteux de cette seconde terreur.
Comme il ne fut point accordé à la partie saine de la population de
prendre les armes pour seconder l’armée dans son œuvre de délivrance,
personne, dans le monde des arts, ne put se signaler sous ce rapport.
Il y eut une exception cependant. Quelques citoyens s’organisèrent dans
le faubourg Saint-Germain pour combattre la Commune avant l’arrivée
des troupes. Ils luttèrent avec énergie dans le quartier de la rue du Bac.
Parmi ceux-là se trouvaient avec M. Guimbal, l’ancien chef de musique
de la gendarmerie de la garde, qui s’est montré si énergique, MM. André
et Alfred Arnoux, deux jeunes artistes, fils du bibliothécaire de Y Union
centrale, qui étaient accourus des premiers pour ouvrir un passage
aux troupes de Versailles et qui montrèrent un courage et un dévoue-
ment rares à leur âge dans l’accomplissement de leurs devoirs de citoyen
et de soldat. Tous deux avaient fait, du reste, leurs preuves pendant le
premier siège dans les bataillons de marche.
Aujourd’hui tout est rentré dans l’ordre, du moins à la surface. Le
calme se fait peu à peu dans les esprits après tant de secousses et de
désastres. La leçon nous sera-t-elle profitable ? Nous devrions l’espérer,
quoique l’oubli semble s’étendre sur les choses comme la vague sur le
navire englouti. Il est une chose que nous devrions apprendre cepen-
dant : c’est à nous souvenir.
ALFRED DARCEL.
GAZETTE DES B EAUX-All TS.
crayon. De l’une, dans le Soir, de l’autre, dans le Grelot. Là il « blagua»
la Commune, le citoyen Courbet en tête. Le ventripotent maître peintre,
appuyé d’une main sur la colonne renversée comme sur une canne,
accueillant d’un air protecteur Henri IV et Louis XIV descendus de leur
monture de bronze, fut le sujet d’une caricature que l’on se disputa.
L’année de la France, ainsi que l’appela le maréchal Mac-Mahon
dans une proclamation, balaya toutes ces ordures, et des hommes sans
aucun talent, les mêmes peut-être qui insultaient l’empire déchu et les
hommes de septembre malheureux, accablèrent la Commune dispersée
et se moquèrent des habitants à contre-cœur des caves, sur le corps
desquels il était poussé des champignons.
Les artistes avaient quitté Paris pour la plupart : les uns, afin de
n’être point forcés de servir, dans les rangs de la garde nationale, une
cause ou des passions qui leur répugnaient; les autres, afin de fuir le
spectacle honteux de cette seconde terreur.
Comme il ne fut point accordé à la partie saine de la population de
prendre les armes pour seconder l’armée dans son œuvre de délivrance,
personne, dans le monde des arts, ne put se signaler sous ce rapport.
Il y eut une exception cependant. Quelques citoyens s’organisèrent dans
le faubourg Saint-Germain pour combattre la Commune avant l’arrivée
des troupes. Ils luttèrent avec énergie dans le quartier de la rue du Bac.
Parmi ceux-là se trouvaient avec M. Guimbal, l’ancien chef de musique
de la gendarmerie de la garde, qui s’est montré si énergique, MM. André
et Alfred Arnoux, deux jeunes artistes, fils du bibliothécaire de Y Union
centrale, qui étaient accourus des premiers pour ouvrir un passage
aux troupes de Versailles et qui montrèrent un courage et un dévoue-
ment rares à leur âge dans l’accomplissement de leurs devoirs de citoyen
et de soldat. Tous deux avaient fait, du reste, leurs preuves pendant le
premier siège dans les bataillons de marche.
Aujourd’hui tout est rentré dans l’ordre, du moins à la surface. Le
calme se fait peu à peu dans les esprits après tant de secousses et de
désastres. La leçon nous sera-t-elle profitable ? Nous devrions l’espérer,
quoique l’oubli semble s’étendre sur les choses comme la vague sur le
navire englouti. Il est une chose que nous devrions apprendre cepen-
dant : c’est à nous souvenir.
ALFRED DARCEL.