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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 7.1873

DOI issue:
Nr. 6
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Lafenestre, Georges: Salon de 1873, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.21409#0570

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

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mais l’arrangement pittoresque delà scène, la justesse de certaines atti-
tudes et la vigueur d’expression du personnage principal emportaient
l’admiration, faisant oublier ce qui restait de mièvre, de fiévreux, de mal-
sain dans quelques parties. Aujourd’hui, M. Lévy fait un pas de plus, un pas
énorme, en abordant sans hésitation une composition simple, à trois per-
sonnages, où les effets mesquins du papillotage à la mode seraient tout à
fait choquants, et qui ne pouvait valoir que par la gravité du style. Je ne
dis pas que M. Henry Lévy ait absolument atteint le but; on ne se débar-
rasse pas si vite d’habitudes de jeunesse, mais il est près d’y atteindre;
le Christ au tombeau est le meilleur tableau d’histoire qui soit au Salon.

Ce tableau, destiné sans doute à un autel d’église, est divisé par une
baguette d’or en deux compartiments. Dans le cadre supérieur, formant
cintre, s’étend un paysage âpre et sévère, la campagne de Jérusalem, où
l’on voit dormir sur des tertres fraîchement remués, près de l’entrée du
sépulcre, une troupe de soldats fatigués, tandis que les saintes femmes,
sorties de la ville, et portant les vases à parfums, hâtent le pas vers la
solitude où repose celui qu’elles ont aimé. Le cadre inférieur, beaucoup
plus grand et oblong, contient la scène principale. Dans la grotte
rugueuse, à peine éclairée par l’auréole divine qui s’allume à son front, le
Christ, pâle, émacié, exsangue, montrant toutes ses plaies, est étendu sur
la pierre, laissant tomber son bras inerte jusque dans le bassin de cuivre
où sont recueillis les clous sanglants de la passion. Un ange aux grandes
ailes d’azur s’agenouille et baise en pleurant ces pieds percés qu’il enve-
loppe tendrement de ses bras, par un mouvement d’une ferveur admi-
rable; et ses ailes célestes, à l’étroit dans ce bas lieu, comme à peine
repliées après un long voyage, frémissent, avec lui, d’angoisse et de dou-
leur. Déjà, sous cette caresse plaintive, le cadavre a commencé de se
ranimer; il pressent la divinité vivante qui va de nouveau s’incarner en
lui. Encore un instant, et le Fils de l’Homme va se dresser triomphant
dans son sépulcre; et l’autre ange, le Chérubin de l’Espérance, envoyé
par le Père, le bel adolescent aux yeux clairs, à la bouche riante, au front
ceint de fleurs, assis au chevet du supplicié, va se lever en sursaut et
emboucher la longue trompette d’or qu’il tient à la main et qui sonnera
la gloire de Jésus ressuscité. Cette belle figure, quoique un peu malingre
encore et, dans quelques détails, trop mesquinement brossée, est d’une
allure vive et triomphante qui reporte l’esprit vers les adolescents vain-
queurs de Donatello et de Carpaccio. En somme, l’œuvre se tient cl’un bout
à l’autre par l’élévation et l’originalité de la conception, par l’heureuse
distribution de la lumière, par le style distingué de toutes les figures. La
peinture est plus large, plus simple, plus franche que dans Y Hérodiade;
 
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