SABBA DA CASTIGLIONE
NOTES SUR LA CURIOSITÉ ITALIENNE A LA RENAISSANCE
(PREMIER ARTICLE.)
Parler de curiosité à
propos de la Renaissance
paraît tout d’abord un ana-
chronisme. En effet, quand
l’art est partout, dans les
esprits et dans les mœurs,
à l’église, au palais, à la
maison, dans la rue, dans
l’atmosphère, le goût des
belles choses est un instinct,
un sous-entendu, il n’a pas
de nom. Pour qu’un mot se
produise, il faut qu’il serve
à désigner quelque chose
de spécial, de bien carac-
térisé, un état ou un objet particuliers. Le mot de vertu n’est entré dans
la langue que du jour où le vice a paru à l’horizon; de même la curiosité
n’a pris un nom que du jour où il a fallu la distinguer de Xabsence de
goût ou du mauvais goût. Jusque-là, tout le monde étant plus ou moins
amateur, Xamateur n’a pas d’appellation déterminée, la curiosité est
anonyme.
Henry Estienne, dans son dictionnaire français-latin de 1538, dit bien,
il est vrai : ung homme curieux d'avoir ou sçavoir choses antiques, qu’il
NOTES SUR LA CURIOSITÉ ITALIENNE A LA RENAISSANCE
(PREMIER ARTICLE.)
Parler de curiosité à
propos de la Renaissance
paraît tout d’abord un ana-
chronisme. En effet, quand
l’art est partout, dans les
esprits et dans les mœurs,
à l’église, au palais, à la
maison, dans la rue, dans
l’atmosphère, le goût des
belles choses est un instinct,
un sous-entendu, il n’a pas
de nom. Pour qu’un mot se
produise, il faut qu’il serve
à désigner quelque chose
de spécial, de bien carac-
térisé, un état ou un objet particuliers. Le mot de vertu n’est entré dans
la langue que du jour où le vice a paru à l’horizon; de même la curiosité
n’a pris un nom que du jour où il a fallu la distinguer de Xabsence de
goût ou du mauvais goût. Jusque-là, tout le monde étant plus ou moins
amateur, Xamateur n’a pas d’appellation déterminée, la curiosité est
anonyme.
Henry Estienne, dans son dictionnaire français-latin de 1538, dit bien,
il est vrai : ung homme curieux d'avoir ou sçavoir choses antiques, qu’il