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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

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Ephrussi, Charles: Exposition d'œuvres de maîtres anciens, 3: tirées des collections privées de Berlin en 1883
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https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0116

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

bocage, gravés par Larmessin et souvent reproduits en tapisserie aux Gobelins, mais
où un ton un peu lourd annonce déjà la décadence, visible et complète dans les sept
dernières composiiions, dont trois sont des peintures essentiellement décoratives.

Quoiqu’il en soit des rapports de Pater avecWatteau très diversement racontés, il
est certain que le premier reçut des leçons directes du second et qu’il en tira grand
profit, comme il le reconnaît lui même et comme le prouvent ses premières œuvres.
La Danse dans le pavillon offre, en effet, des types ouvertement empruntés à Wat-
teau, entre autres la dame qui se dérobe aux caresses du cavalier. Les personnages
principaux, dans ces premiers temps de Pater, sont peints avec soin et d’un modelé
énergique comme si, dit M. Dohme, Watteau, debout derrièrè la chaise de son élève,
le forçait, pour racheter son manque de conscience ordinaire, à peindre enfin quelque
tête d’une exécution soignée. Mais l’ombre de Watteau ne fut pas assez souvent der-
rière la chaise de Pater. La négligence augmente, les tons deviennent plus plats, le
pinceau dessine plutôt qu’il ne peint, les modelés disparaissent; les groupes sont mal
composés. Cependant, çà et là, on retrouve le Pater du bon temps avec ses fines qua-
lités de miniaturiste, surtout dans une Fêle en plein air signée Pater 1733, et dans
quelques petits tableaux tirés du Roman comique de Scarron, dont quatorze au nou-
veau palais de PoLsdam, étonnent par leur étrange inégalité. Faut-il dire que les châ-
teaux royaux de Prusse possèdent des douzaines de Pater qui sont moins des œuvres
d’art que des articles d'exportation ?

Après avoir mentionné rapidement un portrait de maréchal de France par Rigaud,
un Maurice de Saxe par Latour, l’un et l’autre tristement conservés, et quelques pein-
tures assez indifférentes de de Pesne, dont les meilleures œuvres garnissent les châ-
teaux royaux de Prusse, il faut s’arrêter à un bon Boucher, Vénus, Mercure et l’Amour
portés sur des nuages (signé Boucher, 174-2, au-dessus d’un cœur transpercé), supé-
rieur à la moyenne ordinaire du peintre et à son taire conventionnel de décorateur,
inférieur cependant au délicieux petit portrait en pied de la I’ompadour, chez la baronne
Willyde Rothschild à Francfort, un des joyaux de Boucher. La Déclaration et la Jarre-
tière détachée, de de Troy, accusent une grande connaissance technique avec quel-
que chose de dur et de vitreux dans un ton peu approprié à la galanterie du sujet.

Chardin aurait été très bien représenté à l’Exposition si les quatre tableaux qu’elie
avait de lui n’eussent été plus que compromis par de barbares restaurations. Le plus
important des quatre, Une femme occupée à cacheter une lettre (gravé par Fes-
sard), avec deux figures grandes comme nalure, est d’une coloration profonde et
vigoureuse, d’un empâtement nourri, rare chez le maître. Signé J. S. Chardin
f. 1732. Ce beau morceau, exposé au Salon de 1738, en même temps que le jeune
homme coiffé d’un chapeau, parent du Château de cartes de la collection Lacaze, fut
acquis avec lui, cette même année, pour le prince royal, le futur Frédéric II. Ces
deux œuvres se trouvaient encore fraternellement réunies à l’Académie, avec une
Femme revenant du marché, signée et datée 1738, c’est-à-dire antérieure d’un an
à l’édition du Louvre, et une Ratisseuse de carottes si cruellement défigurée qu’on
l’a prise souvent pour une copie, bien que les accessoiies soient du meilleur pinceau
de Chardin.

CHARLES EPHRDSSI.

Le Rédacteur en chef, gérant : LOUIS GONSE.

Paris. — Typ. A. Quantin, 7, rue Saint-Benoît. — [3222)
 
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