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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

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Nr. 2
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Fourcaud, Louis de: Le salon de 1884, 4
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https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0125

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LE SALON DE 1884-

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moins d’attention aux estampes exposées. Voici, en quatre mots, notre
sentiment sur l’ensemble : la taille-douce classique perd de plus en plus
de sa faveur; l’eau-forte n’a jamais été plus prospère et la gravure sur
bois se meurt. A considérer les choses au point de vue de l’ancienne
critique, il y a matière à se lamenter. Au contraire, si l’on est imbu de
cette idée naturelle que la gravure, ayant à serrer d’aussi près que pos-
sible le caractère des œuvres qu’elle traduit, a toute latitude de se trans-
former comme la peinture, on rend justice à l’effort de nos graveurs. La
même distance qui sépare les planches d’.Edelinck des estampes de notre
temps sépare les compositions de Nicolas Poussin des visions de Dela-
croix et des humbles grandeurs de la vie rurale fixées par Jean-François
Millet.

Le moins sagace devine aisément pourquoi le goût public s’est retiré
peu à peu de la taille-douce proprement dite. C’est quelle ne répond
plus à ce qu’on attend présentement de la peinture, et que, par consé-
quent, elle implique une trahison. Le burin est un outil difficile à ma-
nier : les travaux dont il couvre la plaque de cuivre sont, forcément
d’une austérité rigide et d’une monotonie plus propre à rendre des com-
binaisons de lignes académiques que des formes surprises sur le fait,
baignées de lumière diffuse et d’air transparent. Lorsque les peintres
s’éloignent par degré de ce qu’on a nommé fort arbitrairement le style
historique, il était naturel que les graveurs cherchassent des formes plus
souples, des pratiques plus expressives, en rapport avec ce qu’on leur
donnait à interpréter. Sans renoncer à l’emploi du burin, ils ont donc
amoindri son rôle au profit de l’eau-forte. La vieille école burinait pa-
tiemment sur une préparation mordue à l’acide, mais très légère et prin-
cipalement destinée à diriger le tranchant de l’outil. Aujourd’hui la gra-
vure est presque entièrement creusée du premier coup par l’eau-forte,
et le burin, ou la pointe sèche, ne vient que pour compléter certains
modelés et ajouter çà et là des accents. Le graveur n’hésitera point, du
reste, à recourir à des moyens différents et que nos pères n’eussent pour
rien au monde employés à la fois ; il usera ici d’une remorsure, il jouera
là de l’aquatinte, il entrecroisera plus loin des tailles lâches ou serrées,
et il se servira, au besoin, de toutes sortes d’instruments singuliers :
peignes d’acier à dents aiguës, roulettes à obtenir des grenures... Que
dirai-je? Les estampes ainsi exécutées n’ont rien de commun avec les
planches correctes d’Audran, mais on avouera qu’elles ne sont pas sacri-
fiées du côté du dessin et quelles traduisent richement l’effet des
tableaux. Je ne vois pas ce qu’on peut demander de plus à une
estampe.
 
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