Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

DOI Heft:
Nr. 3
DOI Artikel:
Lecoy de La Marche, Albert: La miniature en France, [2]: du XIIIe au XVIe siècle
DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0266

DWork-Logo
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

2l\h

de mœurs contemporaines. L’artiste, se sentant plus libre avec la légende
qu’avec l’Ecriture sainte, y introduit ses meubles, sa famille, ses villes,
ses sites favoris. La magnifique page où Fouquet représente saint Martin
dans l’acte fameux qui a rendu son nom populaire d’un bout du monde à
l’autre, le partage de son manteau avec un mendiant, est la négation
absolue du principe de la couleur locale : le héros est un bon chevalier
du temps de Charles VII ou de Louis XI, vêtu d'nn justaucorps bleu brodé
d’or, et sa lourde monture est un type de race percheronne qui se re-
trouve dans mainte miniature; il est accompagné d’une troupe de
soldats, contrairement au récit de Sulpice Sévère, parce que le maître a
éprouvé le désir de peindre quelques hommes du guet ou de la garde du
roi; on reconnaîtrait peut-être encore, dans une de nos vieilles cités
tourangelles, les quais et les maisons du fond. Simplicité charmante,
valant souvent mieux que l’excès de la recherche historique. On peut
citer aussi comme un des combles du genre le joli tableau de mœurs où,
sous couleur de représenter la naissance de saint Jean-Baptiste, à laquelle,
d’après la légende, la Vierge Marie aurait assisté, l’artiste nous fait pé-
nétrer dans un intérieur connu de lui, à l’instant où une jeune mère et
son nouveau-né reçoivent les soins de tout leur entourage. La première
est couchée sous les blanches courtines d’un lit moyen âge : sa mère,
dans la « ruelle », étend doucement les couvertures; au pied du lit, un
groupe de matrones ou de garde-malades se consultent, et l’une d’elles
(satire toujours vraie) se paye de ses peines en avalant le breuvage des-
tiné à réconforter la patiente. Au premier plan, une parente (la Vierge)
tient sur ses genoux le petit enfant, et s’apprête à le laver dans un cuvier,
où une servante verse de l’eau en s’assurant qu’elle n’est pas trop chaude,
tandis qu’une autre femme fait chauffer un lange devant la vaste che-
minée où nos pères aimaient à se réfugier. Assis dans le coin à droite, le
père (Zacharie) trace gravement sur des tablettes le nom de celui qui
vient de naître. Tous ces détails sont du réalisme, si l’on veut, mais dans
la meilleure acception du mot, et l’exécution rachète ce que l’idée pour-
rait avoir de vulgaire.

On devine que le même système sera appliqué avec une liberté plus
grande encore aux sujets tirés de l’histoire profane, de César, de Tite—
Live, de Suétone, de Quinte-Curce, de Salluste, de Josèphe, d’Orose,
successivement appelés aux honneurs de l’illustration, avec les poètes
antiques et les légistes. Les Décades de Tite-Live, les Antiquités ju-
daïques de Josèphe, illustrées par Beauneveu, par Fouquet ou quelqu’un
de ses élèves, sont remplies de chevaliers aux étincelantes armures, de
palefrois richement caparaçonnés, de batailles livrées, sans doute, entre
 
Annotationen