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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

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Nr. 3
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Lecoy de La Marche, Albert: La miniature en France, [2]: du XIIIe au XVIe siècle
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https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0268

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

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tainement à son époque, on est stupéfait de rencontrer la reproduction
minutieusement exacte des principaux monuments de Paris, la Sainte-
Chapelle, la cathédrale, la tour de Jean sans Peur, etc. De même, les
intérieurs de palais ont dû être pris fidèlement dans les châteaux de la
Touraine ou de l’Anjou. Le livre d’heures d’Étienne Chevalier nous offre
aussi, dans le tableau de l’Annonciation, une vue de l’intérieur de la
Sainte-Chapelle, et, dans celui du martyre de sainte Catherine, une vue
du gibet de Montfaucon. Il y a là autre chose qu’une naïve insouciance
de la couleur locale : il y a l’application d’une sorte de principe, il
y a un parti pris de transplanter les événements anciens dans un cadre
moderne et sur un théâtre connu, soit pour les mieux graver dans
l’intelligence des contemporains, soit pour avoir l’occasion de copier la
nature.

Les anachronismes sont moins nombreux et moins sensibles dans les
miniatures qui se contentent de nous transporter sur le terrain de l’his-
toire de France, parce qu’en général il s’agit là d’événements récents,
moins étrangers au milieu de l’artiste. Les chroniques, les compilations
de Vincent de Beauvais et de Brunetto Latini, qui embrassent à la fois les
temps anciens et modernes, la science historique et les sciences natu-
relles, commencent de bonne heure à être illustrées, et non sans élé-
gance. Mais, dans cet ordre de sujets, c’est principalement le règne de
saint Louis qui inspire les enlumineurs gothiques. Les faits et gestes du
grand justicier, du croisé héroïque, du prince vertueux honoré par
l’Église, vivent encore dans la mémoire de la nation, et ses descendants,
ses familiers les font, avec une certaine fierté, fixer sur le vélin. C’est
d’abord son inséparable compagnon, le sire de Joinville, qui, après avoir
écrit ses mémoires, fait peindre sur son propre exemplaire les quatre
grandes actions du bon roi, les quatre faits où il mit son corps en danger
de mort pour son peuple; et dans l’illustration de son commentaire du
Credo, rédigé en Syrie, il réserve une place à ses souvenirs personnels :
on le voit, la tête couverte d’un chaperon, selon son habitude, recevant
avec ses compagnons les jeunes Sarrasins chargés de les assassiner et le
petit vieillard infirme dont l’intervention les sauva. Voilà l’événement
contemporain, voilà l’impression de voyage introduits dans la miniature
et retracés suivant les données, sous la direction du témoin oculaire. Puis
c’est le récit édifiant du Confesseur de la reine que l’on rend plus saisis -
sant en déroulant, dans une série de tableaux, les traits de piété ou de
courage rapportés par l’auteur sur son héros vénéré. Ce sont les chro-
niques de Saint-Denis que l’on enrichit d’un grand sujet à cinq compar-
timents (forme de composition très usitée durant cette période), présen-
 
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