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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

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Nr. 5
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Renan, Ary: Joseph de Nittis
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https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0424

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396

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

tain, lui en apprirent plus long que l’enseignement provincial par lequel
il eut la docilité de passer. Un matin, les maigres reliefs dont on voulaitle
nourrir à l’école de Naples semblèrent insuffisants à son robuste appétit :
il rompit avec ce régime pour retourner aux grands espaces, aux horizons
qui excitaient la primeur de ses impressions. Cette libre vie de gagne-
petit artistique, c’était l’inauguration d’un talent fait d’indépendance;
c’était un répertoire de souvenirs inconsciemment amassé ; c’était aussi
l’indice d’une souplesse d’allures et de goûts qui devait le mener à une
sorte de cosmopolitisme, à un éclectisme facile, et le préserver d’être
nulle part dépaysé, mal à l’aise, hésitant.

Ainsi De Nittis se sentait chez lui partout où il y avait quelque chose
de neuf et de séduisant pour l’intelligence et l’œil d’un artiste. 11 y avait
trois ans qu’il avait quitté l’école de Naples, — et, dans ces trois années,
il avait déjà exposé dans cette ville trois œuvres acquises par les musées,
une Vue de Barletta, un paysage des Environs de Naples et une vue de
la Traversée des Apennins, — lorsqu’une brusque résolution le jeta dans
la vie des ateliers parisiens. C’était en 1868. On vit bien alors combien
sa vocation était déjà consistante et son goût délié. Dans ce milieu où les
extrêmes, les contraires et les semblables se faisaient une concurrence
effrénée, il fallait exceller en quelque chose, sous peine de demeurer dans
une écœurante médiocrité. La gêne, à Paris, était bien autre chose que
l’indigence à Naples, et quoiqu’on ait des goûts modestes, on n’a pas la
liberté de se nourrir d’une tranche de cocomero ni de vagabonder dans la
grande ville sans perdre son crédit et sans se compromettre. Gérôme et
Meissonier accueillirent De Nittis et l’aidèrent de leur autorité; on
l’aida; surtout, il s’aida lui-même et décida seul de sa fortune en con-
tinuant de suivre la fantaisie de bon aloi qui l’avait inspiré jusqu’alors.

Tout, à Paris, en ce temps-là, semblait l’attirer vers l’art des maîtres
reconnus avec lesquels il se liait, vers l’art intime et concentré du cos-
tume, vers larestauration du passé, vers l’anecdote rétrospective ; — tout,
excepté un petit orgueil qui lui fit un beau jour préférer un autre art,
auquel il avait déjà goûté, un art où il se sentait les coudées plus
franches. C’était, en apparence, préférer l’ornière à la grande route
battue. Mais l’événement le justifia. Cotisé {lient avec lui-même, sans
fatigue, et toujours avec le même bonheur, il alla s’asseoir en plein
Paris, sur la chaussée que nous suivons tous les jours, puis plus tard au
cœur de Londres, et se sentit bientôt, au milieu de la foule que nous
sommes, la même indépendance que dans la rase plaine.

De la moderne peinture italienne qu’il avait vue et jugée de près, De
Nittis n’avait retenu qu’une sorte d’agilité artistique, une adaptation
 
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