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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

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Nr. 5
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Müntz, Eugène: Jacopo Bellini et la renaissance dans l'italie septentrionale, [2]: d'apres le recueil récemment acquis par le Louvre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0474

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

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l’un jouant de la flûte, l’autre tenant un papegai (la Descente de croix),
l’imprévu de certains motifs, tels que cet arrière-train de cheval parais-
sant au bas de l’escalier sur lequel Hérode prend réception de la tête de
saint Jean-Baptiste (voy. la gravure de la page 351, dans la livraison
d’octobre). C’est à des traits pareils que l’on reconnaît le peintre de race.

Jacopo, cependant, n’avait pas négligé, lors de son séjour à Florence,
d’étudier les œuvres des maîtres. Il semble s’y être inspiré de Fra Ange-
lico. Trois compositions se faisant suite (folios 58, 59, 60), la Mise au
tombeau et le Christ en croix, offrent la plus grande analogie avec le
style du tendre peintre de Fiesole; ce sont les mêmes têtes un peu
rondes, les mêmes regards extatiques; c’est la même expression de dou-
leur dans la mère baisant les mains de son fils mort1. L’Adoration des
Mages, par contre, témoigne de l’influence de Gentile da Fabriano, qui,
dans son chef-d’œuvre, peint pour Palla Strozzi en 1423, et aujourd’hui
conservé à l’Académie des Beaux-Arts de Florence, avait traité le même
sujet. Chez Jacopo, la composition est loin d’être aussi touffue que chez
son maître; on ne retrouve pas non plus ces types d’adolescents d’une
élégance achevée, le jeune roi mage rattachant ses éperons, l’écuyer aux
bottes molles tenant en respect un cheval fougueux. Mais le vieux roi
prosterné devant l’Enfant Jésus est emprunté presque textuellement à
cette page merveilleuse, où Gentile s’est véritablement surpassé.

L’influence des réalistes florentins, et tout particulièrement de Paolo
Uccello, perce, d’autre part, dans des effets de perspective et des rac-
courcis très hardis, par exemple, les gardiens du tombeau du Christ
(fol. 27), les apôtres rangés aux côtés de la Vierge (fol. 28).

Soumis à tant d’influences étrangères, il semble que Jacques Bellin
dut rompre complètement avec les traditions de ses compatriotes. Le
Vénitien cependant n’a pas abdiqué en lui; il se reconnaît à l’amour de
la mise en scène, à la profusion des ornements et aussi à des fautes de
goût assez nombreuses. Comme son fils Gentil, comme Carpaccio,

1. En parlant de l’influence de Fra Angelico sur Jacopo Bellini, je dois toutefois pla-
cer sous les yeux du lecteur une très intéressante observation que m'a communiquée
mon vénéré ami, M. le baron de Liphart : «Je pense, m’écrit-il, qu’avant 1430 Fra
Angelico n’avait guère une haute réputation à Florence. Il était encore dans sa pre-
mière phase de miniaturiste et tout à fait sous l’influence de Gentile da Fabriano,
comme il se montre à moi dans son Adoration des rois, dans un des trois (primiti-
vement quatre) reliquaires de Santa-Maria-Novella (aujourd’hui à San-Marco), où il a
copié la pose du roi agenouillé que Gentile nous fait voir dans son grand tableau do
l’Académie (1423). Dans une des cellules (qui servaient à Gosme, Père de la Patrie,
lorsqu’il passait la nuit à San-Marco), donc après 1434, il nous montre un roi bien
différent. »
 
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