Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 30.1884

DOI Heft:
Nr. 6
DOI Artikel:
Sédille, Paul: L' architecture moderne à Vienne, 3
DOI Artikel:
Michel, André: À propos d'une collection particulière exposée dans la galerie de M. Georges Petit
DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.24584#0531

DWork-Logo
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
A PROPOS D’UNE COLLECTION PARTICULIÈRE.

495

cette « collection particulière», sans être d’une qualité aussi précieuse
que les petits chefs-d’œuvre de Dresde et surtout de Munich, font voir
cependant ce dont il était capable quand il s’appliquait. On peut exami-
ner la tête et les mains de ce magistrat, de haut en bas1 et de long en
large : c’est de la bonne et solide peinture, sortie d’une maîtresse fa-
brique et faite pour durer. Dans ses bons jours, Mieris approche de son
ami Metsu, quand son autre amiJan Steen ne l’a pas induit en beuveries
trop copieuses.

Ce Rembrandt d’avant les grands coups d’aile et les visions troublan-
tes de la maturité, ces graves Thomas de Keijser, nous font revivre des gens
réfléchis pour qui la vie était chose sérieuse et comptait des semaines de
travail pour un seul jour de fête. La belle Nani de Venise — reléguée
un peu trop haut, vraiment, par l’organisateur de cette exposition — n’a
pas besoin d’être philosophe pour nous révéler une conception très diffé-
rente de l’existence et de l’art. Elle semble créée pour la volupté sereine
et heureuse, sans emportement fiévreux comme sans amertume, née
pour prendre part à la fête de la vie et figurer dans le décor somptueux
et mouvant que la Venise du xvie siècle offre incessamment à elle-même
et au monde. La femme n'y a guère que l’importance et la mission d’un
objet de plaisir, d’un bel animal de luxe. Avec ses cheveux d’un blond
dont on sait la recette, sa gorge opulente aux carnations « com-
pactes » et vermeilles, sa petite tête sans pensée, son sourire sans âme,
on la dirait plutôt faite pour procurer que pour éprouver le plaisir.

Comparez à la sérieuse ménagère de Keijser et à la patricienne de
l’école de Véronèse la Parisienne de J. de Nittis, — hélas ! consacré lui aussi
par la mort à présent, et que notre collaborateur Ary Renan a fait revi-
vre ici dans des pages si fines. Au lieu de la touche grasse, pleine et
fondue du maître hollandais, de l’ampleur souriante, de la certitude tran-
quille de l’épicurien de Venise, — vous trouvez ici une touche inquiète
en ses raffinements, pleine d a-coups et de subtilités, une recherche
des nuances les plus fugitives, un effort pour fixer dans ses notations
rapides et multipliées je ne sais quoi de frêle, d’indécis et de troublant.
— Cette Parisienne appartient au monde élégant ; elle est en robe
crème, à traîne d’un rose pâle, assise sur des coussins verdâtres, dans
le désœuvrement et l’attente ennuyée d’une après-midi d’hiver. Par
la glace sans tain, surmontée d’un store de soie vert foncé, un paysage
de neige, — paysage parisien, cour d’hôtel tapissée de grillages mon-
tants, — étale par endroits ses blancheurs vaguement teintées de rose.
Le visage, éclairé par derrière, baigne dans des demi-teintes transpa-
rentes, dans une fine lumière atténuée ; dans les yeux bleus passe l’om-
 
Annotationen