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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 32.1885

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Nr. 1
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Michel, André: Le Salon de 1885, 3
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https://doi.org/10.11588/diglit.24593#0019

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

accord, à la fois heurté et doux, qui l’obsède. Il y revient sans cesse,
avec des nuances de détail qu’on ne remarque pas assez, — non pas
dans le sujet, mais dans la qualité des tons juxtaposés. Le rouge de
Fabiola, par exemple, est une tentative nouvelle et heureuse. Le
noir de la Madeleine n’est pas absolument inédit, mais on conviendra
pourtant qu’il méritait d’ètre revu. M. Henner me paraît un exemple
précieux pour expliquer ce que c’est proprement que la 'peinture,
en dehors de toute littérature, de toute pensée — considérée simple-
ment comme une source de sensations agréables pour un épicurien à
l’œil bien organisé. Ce n’est pas tout; ce n’est pas assez; mais c’est
bien quelque chose !

M. Falguière plonge le corps humain dans l’air comme on met du
sucre dans l’eau; il l’y voit à l’état de dissolution. Il est pourtant
intéressant par des recherches de tons rares et l’on n’oserait pas
le condamner sans phrases. Quant à M. Antonin Mercié, autre
sculpteur qui ne dédaigne pas de manier la brosse et qui a enrichi
les galeries de peinture du Luxembourg d’une Vénus très savoureuse,
nous préférons cette année avoir affaire au statuaire qu’au peintre
et nous attendrons pour parler de lui de nous trouver devant l’admi-
rable Souvenir, destiné au tombeau de Mm0 C. Ferry.

XI.

Après les portraits du siècle, voici les portraits de l’année. Com-
bien, dans cent ans d’ici, seront admis à figurer dans une autre
exposition des «portraits du siècle »? Délicate question, pleine de
mélancolie pour le peintre, pour le modèle... et pour le critique qui
11e sera plus là pour s’assurer s’il a bien prophétisé. Nos contempo-
rains, qui 11e craignent pas tous d’encombrer le siècle, aiment de plus
en plus à se faire portraiturer ; c’est beaucoup de toile peinte et
souvent perdue, non pas tant par la faute du modèle que par celle du
peintre. « A mesure qu’on a plus d’esprit 011 trouve qu’il y a plus de
gens originaux », a dit Pascal ; pour un portraitiste digne de ce nom,
il n’est pas de modèle insignifiant. Combien d inconnus, indifférents à
l’histoire, vivent à jamais, et d’une vie intense, grâce au pinceau
des maîtres ! Sans doute, il est plus agréable d avoir a peindre un
homme do génie que Bouvard ou Pécuchet. Il 11 en est pas moins vrai,
pourtant, qu’avec les tètes de Bouvard et de Pécuchet 011 peut faire
un chef-d’œuvre.
 
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