Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 32.1885

DOI Heft:
Nr. 1
DOI Artikel:
Michel, André: Le portrait du père Hubin par M. F. Gaillard
DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.24593#0046

DWork-Logo
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
LE PORTRAIT DU PÈRE IIUBIN.

41

l’affirme avec autorité. Il vaut qu’on l’écoute : nous verrons bien
après si nous avons quelque réserve à faire.

C’est un sincère et un convaincu. Il n’est jamais allé à Bologne;
jamais il n’a mis, jamais il ne mettra sa pointe ou son burin au service
d’un de ces phraseurs emphatiques, de ces calligraphes ampoulés
que sont les Bolonais; — c’est un premier trait qui lui gagne d’abord
la sympathie. Il n’a pas écrit sur la porte de son atelier, comme
tant de peintres à la mode : « Ressemblance et beauté garanties. » Il
n’admet pas que l’embellissement puisse être une beauté. Ce qu’il
voit, il le dit avec une implacable franchise; les rugosités de l’épi-
derme, les rides et les tares, l’usure de l’àge, il ne passe rien sous
silence. Il n’a jamais trahi les maîtres qu’il a traduits; il ne veut
pas tricher avec la nature et la vie, maîtresses des maîtres.

Mais cette attention passionnée qu’il apporte à la reproduction
des dehors n’est pas un vain amusement : l’accessoire ne lui fait
pas, comme à un simple Denner, oublier l’essentiel. C’est merveille
de voir, au contraire, comme cette accumulation de détails précis et
soulignés se compose sous sa main en un ensemble harmonieux et
vivant, à quelle intensité d’impression il arrive. Il sait, en effet,
que « tout ce qui se passe dans l’àme de César est représenté dans
son corps », et s’il insiste avec tant d’acharnement sur les accidents
de l’enveloppe, c’est pouiq mieux exprimer dans son irréductible
unité la personnalité tout entière et noter jusqu’au moindre reflet
du foyer intérieur. Ce qu’il nous montre ainsi, c’est bien la vera ad
vivum effigies, qui, évoquée par l’artiste, se dresse devant le spec-
tateur comme un vivant problème de psychologie.

Ses portraits vous arrêtent au passage; par une sorte de sollicita-
tion silencieuse mais irrésistible, ils vous attirent et vous invitent 4
penser. Leur souvenir vous accompagne et on les oublie difficilement.
Avec sa tète de construction ferme et trapue, aux assises carrées, et
ce mélange de ténacité naturelle et d’humilité acquise qui en fait
l’expression dominante, le père Hubin représente admirablement un
soldat do la foi, qui a puisé dans une abdication définitive et suprême
le principe même do sa force et de son action dans le monde. Esprit
organisateur et pratique, énergique et actif, il porte sur son front et
dans l’imperceptible froncement de ses sourcils la marque de sa
volonté, le poids de ses préoccupations et de ses œuvres; mais il ne
doit pas leur permettre de troubler la sérénité que sa foi lui promet
et que sa règle lui commande. La tension et 1 austérité un peu dure
du visage sont seulement tempérées par l’éclat voilé du regard où

XXXII. — 2e P K Kl O DE. G
 
Annotationen