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GAZETTE DES DEAUX-A ItTS.
quelques chauds rayons de soleil ; les personnages sont dans tout le
naturel de leurs attitudes prises sur le vif; les vêtements ont le pli
des choses longtemps portées, où l’on se sent à l’aise; chaque détail
de mouvement, de geste de ces deux hommes, qu’on devine parler
haut, dans le laisser-aller de leur bonne humeur expansive, est
étudié avec une pénétration merveilleuse. Les figures comme toujours
sont des portraits. Je note en passant l’aisance des mains et des jambes
dont si peu de peintres observent avec justesse les allures familières.
D’autres aquarelles, et ce ne sont pas les moins curieuses, nous
révèlent un Menzel peintre d’animaux, peignant avec une tranquillité
imprévue, une conscience méticuleuse au point d’en devenir timide,
toutes ces bêtes charmantes, étranges ou féroces qui font d’habitude
l’ornement des jardins zoologiques : un éléphant, des chameaux, des
cygnes, un casoar, des pigeons, des aras, des paons, des cerfs, des
ours, des lions, des tigres; tout cela vivant sous les regards de la
foule désœuvrée, dans les gaîtés du plein air.
D’autres enfin, trop peu nombreuses à mon gré, nous montrent le
Menzel paj'sagiste, toujours intéressant, quelquefois paysagiste supé-
rieur, comme dans cette exquise Vue de Gastein, de 1874, où chaque
accent semble imprégné de fraîcheur, de lumière et de transparence.
Les aquarelles de M. Menzel veulent être regardées de près. A
distance l’intention dos détails les mieux observés se perd souvent
dans une égalité d’aspect un peu sourde. Le précieux du fini exige un
examen attentif et l’approche des yeux. Il faut pénétrer, et non sans
quelque effort, dans certaines aquarelles de M. Menzel. La Vue dé
Gastein est de ce nombre. Mais alors que de jouissances, de surprises
vous attendent! Peu à peu tout devient exquis : la verdure des
jardins où s’épanouit un monde de fleurs et de plantes, les clôtures
en haie vive, les maisons et le haut clocher sombres sous leur toiture
d’ardoise, les montagnes bleutées aux flancs desquelles traînent
encore les brouillards du matin, l’air limpide, l’atmosphère reposée
des Alpes aux derniers jours de l’été. Cette Vue de Gastein est assu-
rément une des œuvres les plus parfaites sorties de ce pinceau puis-
sant, qui, en ses heures de délassement, a parfois des délicatesses
de fée.
III.
L’auteur des Soldats de Frédéric le Grand et de la Cruche cassée
restera un illustrateur de premier ordre ; mais, je l’ai dit, c’est surtout
GAZETTE DES DEAUX-A ItTS.
quelques chauds rayons de soleil ; les personnages sont dans tout le
naturel de leurs attitudes prises sur le vif; les vêtements ont le pli
des choses longtemps portées, où l’on se sent à l’aise; chaque détail
de mouvement, de geste de ces deux hommes, qu’on devine parler
haut, dans le laisser-aller de leur bonne humeur expansive, est
étudié avec une pénétration merveilleuse. Les figures comme toujours
sont des portraits. Je note en passant l’aisance des mains et des jambes
dont si peu de peintres observent avec justesse les allures familières.
D’autres aquarelles, et ce ne sont pas les moins curieuses, nous
révèlent un Menzel peintre d’animaux, peignant avec une tranquillité
imprévue, une conscience méticuleuse au point d’en devenir timide,
toutes ces bêtes charmantes, étranges ou féroces qui font d’habitude
l’ornement des jardins zoologiques : un éléphant, des chameaux, des
cygnes, un casoar, des pigeons, des aras, des paons, des cerfs, des
ours, des lions, des tigres; tout cela vivant sous les regards de la
foule désœuvrée, dans les gaîtés du plein air.
D’autres enfin, trop peu nombreuses à mon gré, nous montrent le
Menzel paj'sagiste, toujours intéressant, quelquefois paysagiste supé-
rieur, comme dans cette exquise Vue de Gastein, de 1874, où chaque
accent semble imprégné de fraîcheur, de lumière et de transparence.
Les aquarelles de M. Menzel veulent être regardées de près. A
distance l’intention dos détails les mieux observés se perd souvent
dans une égalité d’aspect un peu sourde. Le précieux du fini exige un
examen attentif et l’approche des yeux. Il faut pénétrer, et non sans
quelque effort, dans certaines aquarelles de M. Menzel. La Vue dé
Gastein est de ce nombre. Mais alors que de jouissances, de surprises
vous attendent! Peu à peu tout devient exquis : la verdure des
jardins où s’épanouit un monde de fleurs et de plantes, les clôtures
en haie vive, les maisons et le haut clocher sombres sous leur toiture
d’ardoise, les montagnes bleutées aux flancs desquelles traînent
encore les brouillards du matin, l’air limpide, l’atmosphère reposée
des Alpes aux derniers jours de l’été. Cette Vue de Gastein est assu-
rément une des œuvres les plus parfaites sorties de ce pinceau puis-
sant, qui, en ses heures de délassement, a parfois des délicatesses
de fée.
III.
L’auteur des Soldats de Frédéric le Grand et de la Cruche cassée
restera un illustrateur de premier ordre ; mais, je l’ai dit, c’est surtout