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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 32.1885

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Nr. 2
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Bonnaffé, Edmond: Études sur le meuble en France au XVIe siècle, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24593#0151

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142

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

commerce fabrique ces meubles immenses, monuments de menuiserie
massive, encombrés de pointes de diamant et de moulures guillochées.
Le XVIe siècle a dit son dernier mot.

Le Flamand est le commis voyageur le plus affairé de la Renais-
sance ; on le rencontre partout, en Angleterre, en Italie, en Allemagne,
en France, en Savoie; mais l’Espagne est sa terre de prédilection.
Singulière affinité entre deux peuples si opposés de race, de génie,
de climat. Depuis Yan-Eyck qui fut envoyé en Portugal par Philippe
le Bon pour faire le portrait de la fille du roi Jean, les Pays-Bas
n’ont cessé d’exporter dans la péninsule des peintres, des sculpteurs,
des tapissiers, des livres d’art, des recueils d’ornements gravés, et
Juan de Arphe gourmande ses confrères qui 11e cessent de copier les
pape/es y estampas flamencas y francesas; car la France figure pour
une bonne part dans l’invasion étrangère.

L’Espagnol a reçu la Renaissance après coup et de seconde main.
Isolé dans sa péninsule, séparé de l’Italie par la mer, casanier de sa
nature, il ne s’est point pressé de l’aller chercher à la source, et les
Italiens ne sont venus que plus tard l’importer chez lui. C’est en 1520
seulement que Berruguete, le premier, rapporta dans sa patrie l’art
nouveau qu’il avait appris dans l’atelier de Michel-Ange. Jusque-là
l’école, menée par un Bourguignon, Philippe Vigarny, le meilleur
sculpteur sur bois de l’Espagne, reste franchement gothique. A
Berruguete succède un autre élève de Michel-Ange, Nicolas Bachelier
de Toulouse, « grand et fier sculpteur en sa maniéré, dit un ancien,
architecte et ingénieur si habile qu’un roy d’Espagne le demanda au
roy de France ». Malgré l’influence de ces deux maîtres, l’art
indigène conserve une saveur de terroir bien prononcée. Depuis que
notre ami le baron Davilliera publié sur l’art industriel en Espagne
ces belles recherches que la mort est venue interrompre avant
l’heure, une nuée de collectionneurs et de marchands s’est jetée de
l’autre côté des Pyrénées. Les fouilles ont été brillantes, des quan-
tités de meubles, de boiseries, de stalles et de retables sont entrées
dans les collections parisiennes; 011 a pu reconstituer la physionomie
de cette école si peu connue, marquer ses traits et lui faire sa place.
Si les attitudes tourmentées, l’anatomie excessive, les effets muscu-
laires rappellent les leçons de Michel-Ange, les types restent fran-
chement espagnols; l’œil est fouillé d’un coup profond et sûr qui fait
ressortir l’arcade sourcilière; les jambes et les bras se terminent en
feuilles ou en volutes d’un tour particulier. Les bois peints et dorés
sont traités avec une grande recherche et des raffinements de déco-
 
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