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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 5.1891

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Nr. 1
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Yriarte, Charles: Paul Véronèse au palais ducal de Venise
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https://doi.org/10.11588/diglit.24449#0020

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Dans la Salle du Conseil des Dix, et dans celle du tribunal dit Dei Capi,
on lui avait réservé les plafonds ; on savait que nul mieux que lui ne
savait détacher ses figures dans l’azur, les envelopper d’air et de
lumière et créer l’illusion de la vie. Il emprunta ses sujets à la
Mythologie, et, se tenant d’aussi près qu’il le pouvait à la conve-
nance et à l’appropriation du lieu; il personnifia à sa façon l’idée
générale de justice et de répression par des allégories qui conve-
naient mieux à son tempérament, qu’elles ne s’accordent avec les
intentions du maître de l’œuvre. C’est ainsi qu’au-dessus de la tête
des Capi, il fait plafonner Y Ange exterminateur qui terrasse le Péché, et
dans la salle du Conseil des Dix, peint ce terrible Jupiter foudroyant les
Vices qui, après avoir eu la singulière destinée d’orner une des salles
des appartements de Versailles est venu échouer au Musée du Louvre.
L'original de ce tableau, par suite de transactions intervenues entre
les deux gouvernements, est resté nôtre. La toile qui occupe le centre
du plafond du Conseil, est une copie faite par un maître français.

La Salle du Collège, où siégeait la Seigneurie — (ce qui répondrait
aujourd’hui à notre Conseil des ministres, présidé par le chef de
l’État) —, était un lieu d’élection pour Venise, restreint par
ses dimensions, auguste par sa destination, d’un caractère tout à
fait réservé; là sont reçus les ambassadeurs et les envoyés extraor-
dinaires. Le Véronèse allait encore avoir le privilège de donner à
cette salle sa plus belle parure, en peignant toute la paroi principale,
celle au-dessus du trône, avec le plafond tout entier, divisé en de
nombreux compartiments au milieu desquels il proposa de repré-
senter : Venise régnant sur le monde par la Justice et la Paix.

Le sujet de la composition qui occupe la paroi au-dessus du trône
était imposé à l’artiste : la mort d’Agostino Barbarigo, tombé à la
journée de Curzolari, et, le même jour, le Triomphe de Sébastien
Venier, avaient fait,une impression profonde sur le Sénat; il fallait
en consacrer le souvenir par une représentation. Dans une compo-
sition bizarre, allégorie de sa façon qui n’a rien de conventionnel
et emprunte tous ses éléments à la vie même, Paolo prit pour
fond la vue de Venise, la Lagune, son ciel à la fois éclatant et voilé,
et peignit le Christ dans sa gloire, Venise, la Foi, sainte Justine,
avec les images des deux héros, portraits historiques qui se présen-
tent là un peu inopinément et qu’on pourrait détacher de la toile
pour en orner la galerie ducale.

On pourra scruter l’œuvre entier du Véronèse sans trouver une
image comparable à celle qui, vêtue d’une longue robe de satin blanc
 
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