GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Nationale, à Londres. Une photographie faisant abstraction de la
couleur aurait bientôt changé les doutes en certitude. Ce qui est
essentiellement en propre à Rubens est le paysage, charmant à tous
égards, avec ses plans admirablement gradués. Ici le Flamand se
révèle en toute évidence.
La seconde peinture qu’il faut restituer à Rubens est le Jugement
de Salomon, n° 1404, catalogué sous le nom de Jordaens, bien que déjà
l'inventaire du palais de Saint-Ildefonse donnât le nom du véritable
auteur. L’aspect général est peu rubénien, mais ne tarde pas à mettre
en pleine évidence l’originalité de l'œuvre. Travail de jeunesse, pour-
tant d’une période plus avancée que le Jugement de Paris, le tableau a
de vraies qualités de conception. Le jeune roi de profil, environné de
ses conseillers et de ses gardes, offre beaucoup d’analogie avec la
figure introduite dans la composition du même sujet gravée par
Bolswert. Entièrement de dos et puissamment campé sur ses
jambes, le bourreau élève l’enfant vers lequel se précipite sa mère
anxieuse. Cette dernière figure est admirable d’expression, et Jor-
daens, de qui sans doute on aurait tort de médire, ne se montra
jamais assez soucieux du pathétique des choses pour avoir trouvé
sous son pinceau ce visage où se peignent au suprême degré les
angoisses maternelles. Passe pour Van Dyck ; Jordaens jamais. Mais,
outre que nous connaissons la manière de Van Dyck à ses débuts,
Jordaens était encore enfant au moment où ce tableau dut voir le
jour.
Pas plus ici que dans Y Adoration des Mages, Rubens ne nous
montre les types qui lui seront chers plus tard ; il n’est pas davantage
le brillant coloriste que l’on sait. Mais pour être amortie, la gamme
offre déjà des accords qu’il n’est pas rare de trouver sur la palette
du maitre : le violet, par exemple, juxtaposé au vert. Il y a de plus
cette étoile où les fleurages d’or s’enlèvent sur un fond noir, si
fréquemment répétée dans les toiles du noble coloriste.
Que l’œuvre de Rubens, tout particulièrement à Madrid, soit
assez riche pour se passer de l’adjonction d’éléments d’ordre après
tout secondaire, rien n’est moins discutable. Pourtant, s’il doit
incomber à quelqu’un de pénétrer dans la vie du peintre assez avant
pour relever ses premiers pas dans la carrière artistique, il n’est pas
indifférent que nous sachions exactement les étapes franchies pour
arriver à la pleine expression de ses facultés.
A presque tous les points de vue, le second voyage de Rubens en
Nationale, à Londres. Une photographie faisant abstraction de la
couleur aurait bientôt changé les doutes en certitude. Ce qui est
essentiellement en propre à Rubens est le paysage, charmant à tous
égards, avec ses plans admirablement gradués. Ici le Flamand se
révèle en toute évidence.
La seconde peinture qu’il faut restituer à Rubens est le Jugement
de Salomon, n° 1404, catalogué sous le nom de Jordaens, bien que déjà
l'inventaire du palais de Saint-Ildefonse donnât le nom du véritable
auteur. L’aspect général est peu rubénien, mais ne tarde pas à mettre
en pleine évidence l’originalité de l'œuvre. Travail de jeunesse, pour-
tant d’une période plus avancée que le Jugement de Paris, le tableau a
de vraies qualités de conception. Le jeune roi de profil, environné de
ses conseillers et de ses gardes, offre beaucoup d’analogie avec la
figure introduite dans la composition du même sujet gravée par
Bolswert. Entièrement de dos et puissamment campé sur ses
jambes, le bourreau élève l’enfant vers lequel se précipite sa mère
anxieuse. Cette dernière figure est admirable d’expression, et Jor-
daens, de qui sans doute on aurait tort de médire, ne se montra
jamais assez soucieux du pathétique des choses pour avoir trouvé
sous son pinceau ce visage où se peignent au suprême degré les
angoisses maternelles. Passe pour Van Dyck ; Jordaens jamais. Mais,
outre que nous connaissons la manière de Van Dyck à ses débuts,
Jordaens était encore enfant au moment où ce tableau dut voir le
jour.
Pas plus ici que dans Y Adoration des Mages, Rubens ne nous
montre les types qui lui seront chers plus tard ; il n’est pas davantage
le brillant coloriste que l’on sait. Mais pour être amortie, la gamme
offre déjà des accords qu’il n’est pas rare de trouver sur la palette
du maitre : le violet, par exemple, juxtaposé au vert. Il y a de plus
cette étoile où les fleurages d’or s’enlèvent sur un fond noir, si
fréquemment répétée dans les toiles du noble coloriste.
Que l’œuvre de Rubens, tout particulièrement à Madrid, soit
assez riche pour se passer de l’adjonction d’éléments d’ordre après
tout secondaire, rien n’est moins discutable. Pourtant, s’il doit
incomber à quelqu’un de pénétrer dans la vie du peintre assez avant
pour relever ses premiers pas dans la carrière artistique, il n’est pas
indifférent que nous sachions exactement les étapes franchies pour
arriver à la pleine expression de ses facultés.
A presque tous les points de vue, le second voyage de Rubens en