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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 11.1894

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Nr. 3
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Valabrègue, Antony: Correspondance d'Allemagne: les dernières acquisition du Musée de Berlin; Albert Dürer, Lucas de Leyde, Albert Altdorfer, etc.; les dessins de l'école française dans les grandes collections allemandes; quelques portraits au crayon du XVIe et du XVIIe siècle
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https://doi.org/10.11588/diglit.24664#0278

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

plus à côlé des maîtres des anciennes écoles allemandes. La gloire du peintre de
Nüremberg est toute rayonnante à Munich, qui s'enorgueillit de l’admirable
portrait de l’artiste exécuté par lui-même. La ville natale de Durer possède, elle
aussi, quelques œuvres excellentes, et une noble composition, le Christ pleuré.
Berlin déploie des efforts considérables pour augmenter et compléter l’œuvre de
celui qui est comme une sorte de Michel-Ange allemand.

L'administration du Musée a acheté, en 1883, pour une somme très élevée, le
portrait du bourgmestre Jacob Muffel, provenant de la collection Narishkin. On
peut voir, dans une salle, le portrait d’un habitant de Nüremberg, Jérôme
Holzschuer; plus loin, c’est Frédéric le Sage et une Vierge tenant près d'elle
l'Enfant Jésus. Une autre représentation de la Madone, d’une grande beauté et
d'un charme infini, va, dès à présent, prendre sa place dans la galerie. Le tableau
porte ces mots, tracés sur un feuillet entr’ouvert : Albertus Durer, Germanus
faciebat, post Virginispartum 1506. A côté de cette inscription, le monogramme dé
l’artiste. La Vierge est une femme assez grasse, aux longs cheveux, lisses sur le
front et qui ondulent en anneaux bouclés sur les épaules. Assise sur un siège de
velours rouge, elle tient une main appuyée sur un livre. L’Enfant Jésus repose
sur ses genoux, presque entièrement nu, laissant flotter derrière lui une draperie
bleue Sur son bras gauche un serin est venu s’abattre; l’oiseau agite ses ailes, et
le fils de Marie le regarde doucement, tout en abaissant les yeux vers deux enfants,
qui viennent apporter quelque offrande à sa mère. Deux chérubins posent une
couronne de fleurs sur la tête de la Vierge. Au fond du tableau s’étend un paysage
aux colorations chaudes et vibrantes, des feuillées touffues, des motifs
d’architecture, tels qu’on en voit dans les tableaux de quelques primitifs italiens.

Cette peinture révèle évidemment, à un haut degré, l'influence de l’Ecole
vénitienne; ce n’est pas seulement dans quelques détails que nous apercevons ces
réminiscences; on les ressaisit dans le type de chaque personnage. La Vierge,
quoique blonde, n’est plus une Allemande; Albert Durer est devenu ici l’élève des
maîtres de Venise, il s’est laissé séduire par le charme d’une autre race. 11 a seu-
lement gardé dans cette œuvre un peu de ce grossissement des formes, de cette
ampleur exagérée des visages et des chairs où reparaît la lourdeur de l’art
germanique, et où l’on peut voir comme une caractéristique de sa manière. Voici,
du reste, un aveu précieux à recueillir, pour fixer l’origine de ce tableau : Albert
Durer, germanus faciebat... Celle déclaration de la nationalité de l’artiste ne se
serait point trouvée dans une composition exécutée en Allemagne. Relevons enfin
la date du tableau, 1506. Nous savons qu’Albert Durer a séjourné en Italie
de 1505 à 1507. Nous pouvons donc nous expliquer l’accent particulier de cette
peinture, et affirmer que le maître de Nüremberg a peint cette œuvre dans la
ville où florissait Bel 1 ini.

Cette admirable Madone, — qui sera dorénavant classée sous cette dénomina-
tion, la Madone au serin, — appartenait récemment au marquis de Lothian, et se
trouvait en Ecosse. Elle avait figuré, en 1871, à une exposition anglaise rétros-
pective, où elle fut vivement remarquée. Dès que l’éveil a été donné à Berlin, rien
ne fut épargné pour obtenir cette œuvre; elle a été cédée par son propriétaire,
pour la somme de 100,000 francs (4,000 livres sterling).

A côté de ce tableau, nous signalerons encore une production du même artiste,
moins importante peut-être, mais bien expressive. C'est une « Tête de femme »
 
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