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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
composition traitée par cet artiste, avec des développements d'une préciosité aussi
subtile. Elle représente la Naissance de Marie, dans le chœur d'une église; un
ange balance sur l’enfant son encensoir; entre les piliers de la nef, une troupe de
séraphins, se tenant en l’air par la main et formant une longue chaîne,
célébré l’heureux événement, avec des transports d’allégresse. On peut constater
plus d’une ressemblance entre ce tableau et celui que le Musée de Berlin vient
d’acquérir. Dans l’une et l’autre de ces peintures se révèle le même symbolisme
raffiné, qui semble déjà toucher à la décadence.
bine autre peinture, d'un artiste des Pays-Bas, la Mort- de la Vierge, mérite
d’être citée pour la fermeté des physionomies et la vigueur des détails. Nous
croyons découvrir aussi, dans cette œuvre, la main incisive et nette d'un peintre-
graveur, qui, celui-ci, nous apparaît doué d’une imagination plus saine et d’un
sens plus droit. Chacun des choix que nous venons de mentionner indique, en
définitive, les mêmes tendances. Les productions des époques archaïques, les toiles
et les panneaux des écoles nationales, sont recherchées avec ardeur à Berlin. Celte
préférence, cette profonde sympathie n’empêchent pas les conservateurs du Musée
de porter leur intérêt à l’occasion sur un morceau comme la Dentellière de Pieter
van der Bos, qu’on pourrait comparer à une œuvre du même genre, de Ver Meer
de Delft ou de Pieter de Hooch.
Ce n’est point seulement dans les achats de tableaux que se manifeste l’activité
du haut personnel du Musée de Berlin. Tandis que M. Bode, dont il est inutile de
louer la compétence dans ce recueil, déploie un zèle exceptionnel, —- secondé à
merveille, dans la section de peintures, par M. von Tschudi, — le conservateur
en chef du Cabinet des estampes et des dessins, M. Lippmann, se multiplie de son
côté et recherche tout ce qui peut apporter une extension à son domaine. À la
vente Holford, à Londres, un lot très important de dessins — presque une collec-
tion tout entière — est devenu la propriété du Cabinet royal. Les dessins de l'École
française provenant de celte adjudication sont de diverse qualité, mais parmi ces
pages éparses il en est auxquelles nous assignerons une certaine valeur. Nous avons
relevé des croquis de Boucher, de Chardin, de Lancret, de Claude Gillot, etc. L
Le Cabinet possédait déjà une superbe étude de Watteau, relevée de sanguine
et de blanc, où le maître a esquissé deux figures d’après un personnage de théâtre,
aux longs cheveux pendants sur la joue, et appuyé sur un bâton. C’est un type qu’il
ne serait pas difficile de retrouver dans l’œuvre du peintre des Fêtes galantes. Il ne
nous paraît pas nécessaire de nous étendre sur d’autres morceaux appartenant au
Musée, et dont la description nous conduirait à une énumération fastidieuse. Nous
nous bornerons à faire remarquer, avant tout, combien sont nombreux les dessins
de maîtres français conservés dans les divers dépôts artistiques de l’Allemagne.
La plupart de ces croquis, de ces préparations qui renferment souvent la
première pensée de quelque œuvre très connue, ont été l’objet d'un inventaire
sommaire, mais ils ne sont point encore catalogués dans des publications spéciales,
comme c’est l’usage dans nos grands musées français. Nous avons, sur ce point, 1
1. Pour être complet ici, nous devons ajouter que le Musée de Berlin s’est aussi
enrichi, dans une autre section, d’une collection de sculptures en terra-cotta, et d’orne-
ments en stuc des rv° et xvi° siècles, ainsi que d’un groupe très important de sculptures
en bois datant de l’an 1300 environ.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
composition traitée par cet artiste, avec des développements d'une préciosité aussi
subtile. Elle représente la Naissance de Marie, dans le chœur d'une église; un
ange balance sur l’enfant son encensoir; entre les piliers de la nef, une troupe de
séraphins, se tenant en l’air par la main et formant une longue chaîne,
célébré l’heureux événement, avec des transports d’allégresse. On peut constater
plus d’une ressemblance entre ce tableau et celui que le Musée de Berlin vient
d’acquérir. Dans l’une et l’autre de ces peintures se révèle le même symbolisme
raffiné, qui semble déjà toucher à la décadence.
bine autre peinture, d'un artiste des Pays-Bas, la Mort- de la Vierge, mérite
d’être citée pour la fermeté des physionomies et la vigueur des détails. Nous
croyons découvrir aussi, dans cette œuvre, la main incisive et nette d'un peintre-
graveur, qui, celui-ci, nous apparaît doué d’une imagination plus saine et d’un
sens plus droit. Chacun des choix que nous venons de mentionner indique, en
définitive, les mêmes tendances. Les productions des époques archaïques, les toiles
et les panneaux des écoles nationales, sont recherchées avec ardeur à Berlin. Celte
préférence, cette profonde sympathie n’empêchent pas les conservateurs du Musée
de porter leur intérêt à l’occasion sur un morceau comme la Dentellière de Pieter
van der Bos, qu’on pourrait comparer à une œuvre du même genre, de Ver Meer
de Delft ou de Pieter de Hooch.
Ce n’est point seulement dans les achats de tableaux que se manifeste l’activité
du haut personnel du Musée de Berlin. Tandis que M. Bode, dont il est inutile de
louer la compétence dans ce recueil, déploie un zèle exceptionnel, —- secondé à
merveille, dans la section de peintures, par M. von Tschudi, — le conservateur
en chef du Cabinet des estampes et des dessins, M. Lippmann, se multiplie de son
côté et recherche tout ce qui peut apporter une extension à son domaine. À la
vente Holford, à Londres, un lot très important de dessins — presque une collec-
tion tout entière — est devenu la propriété du Cabinet royal. Les dessins de l'École
française provenant de celte adjudication sont de diverse qualité, mais parmi ces
pages éparses il en est auxquelles nous assignerons une certaine valeur. Nous avons
relevé des croquis de Boucher, de Chardin, de Lancret, de Claude Gillot, etc. L
Le Cabinet possédait déjà une superbe étude de Watteau, relevée de sanguine
et de blanc, où le maître a esquissé deux figures d’après un personnage de théâtre,
aux longs cheveux pendants sur la joue, et appuyé sur un bâton. C’est un type qu’il
ne serait pas difficile de retrouver dans l’œuvre du peintre des Fêtes galantes. Il ne
nous paraît pas nécessaire de nous étendre sur d’autres morceaux appartenant au
Musée, et dont la description nous conduirait à une énumération fastidieuse. Nous
nous bornerons à faire remarquer, avant tout, combien sont nombreux les dessins
de maîtres français conservés dans les divers dépôts artistiques de l’Allemagne.
La plupart de ces croquis, de ces préparations qui renferment souvent la
première pensée de quelque œuvre très connue, ont été l’objet d'un inventaire
sommaire, mais ils ne sont point encore catalogués dans des publications spéciales,
comme c’est l’usage dans nos grands musées français. Nous avons, sur ce point, 1
1. Pour être complet ici, nous devons ajouter que le Musée de Berlin s’est aussi
enrichi, dans une autre section, d’une collection de sculptures en terra-cotta, et d’orne-
ments en stuc des rv° et xvi° siècles, ainsi que d’un groupe très important de sculptures
en bois datant de l’an 1300 environ.