Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 11.1894

DOI Heft:
Nr. 4
DOI Artikel:
Bouchot, Henri: Le portrait-miniature en France, 2 [= 5], La Révolution et l'Empire
DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.24664#0325

DWork-Logo
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
312

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

des leçons. IL fallait être Comtois pour avoir osé, mais il fallait l’être
davantage encore pour ne pas reprendre tantôt le coche. Isabey n’y
songea pas un instant ; il dessinait passablement, il avait bonne
envie de bien faire, nul respect humain : il se mit à peinturlurer
des boutons d’ivoire pour manger. Tous savez, de ces boutons énor-
mes, enfermés dans un verre et que les mirliflors de 1785, les jolis
messieurs perruqués de Debucourt cousaient à leurs vestes de soie.
A douze sols l’un, on avait le pain, le couvert, et quelques piécettes
menues pour passer les dimanches. Ici, Jean-Baptiste Isabey laras-
conne un peu, je veux croire, car il dit que la fortune s’en vint tout
bonnement le prendre au lit, sous les traits d’une connaissance qui
l’introduisit à la Cour pour des besognes secondaires. Il s’agissait,
parait-il, de copier deux portraits de Sicardi représentant le duc de
Berry et le duc d’Angoulême, fils du comte d’Artois. Isabey a vingt
ans alors, il est joli garçon, un peu fille d’aspect, d’une humeur char-
mante et d’une habileté de main appréciable ; il plaît à tous les prin-
ces. C’est le conte de fées dont vous prendrez la part de vérité pos-
sible, car il y a là-dedans des bals travestis où on le déguise, où la
reine s’amuse de sa mine, où il grimpe comme un chat sous son
déguisement pour faire rire la galerie. La Révolution vint jeter un
peu d’eau sur ce feu ; Isabey s’est gaudi extrêmement, mais la bourse
est plate. C’est alors qu’il exécute ces portraits de consolation dont
je parlais tout à l’heure, et qu'on lui paie si on en a le temps.

Une ou deux années auparavant, Dejabin l’éditeur l’avait employé
à sa série de portraitures. Il l’avait campé en une espèce de cave,
avec mission de prendre à leur passage les députés allant aux séan-
ces. Isabey raconte qu’il en fit plus de deux cents à six livres l’un ;
il exagère. Je n’ai pas trouvé plus de vingt-cinq croquis signés de
lui, et ils ne sont pas des meilleurs 1.

Déjà Isabey a sa note à lui dans le dessin ou la miniature; il
exécute le coup de vent sur les cheveux, l’embroussaillement des

1. Ces portraits sont au cabinet des Estampes. Ils sont d'un dessin assez mou.
Voici les noms des députés dessinés en 1789 par Isabey : Bilietle (Bretagne), Bon-
nemant (Arles), Bouchette (Flandre maritime), Bourrier (Orange), Brueys, baron
d’Aigalliers, Buffy (Dourdan), Dufresne (Alençon), Gillon (Verdun), Grieu (Rouen),
Leguen (Landivisiau1, Giriol (Auxois), Humblot (Beaujolais), Landrin (Montfort
l’Amaury), Liénart (Péronne), Martin (Béziers), Mauriet de Fleury (Marsan),
Mécliin, curé de Brains, Paultre des Epinettes (Auxonne), Urstours Saint-Michel
(Comminges), etc. C’était du Couvent des Capucins que les artistes attendaient les
députés à leur entrée.
 
Annotationen