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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
donnons ici la figure et qui, quoi qu’en dise la Direction du Musée,
ne sont nullement des œuvres du xvie siècle. Que l’on regarde avec
attention le casque qui est une bourguignote à grand garde-nuque
très évasé, comme on le porta sous Louis XIII et pas avant, que l’on
regarde la forme des jouées, de la crête tronquée en avant, d’autres
caractères encore qui existent dans les défenses de tète de ce roi
que possède le Musée, et l’on aura la certitude que, si ce casque n’a
point appartenu à Louis XIII, il a été fait sous son règne. Sans nous
appesantir sur les signes de certaine décadence que présente la
chimère mal posée sur la crête et qui ne fait point corps avec elle, le
manque de goût dont témoigne cette queue mal enroulée, maladroite-
ment détachée, la pauvreté du motif qui rattache en avant la crête
au droit du timbre, le mauvais modelé de cette renommée dont la
banalité de facture ramène aux poncifs d’orfèvres les moins fameux,
nous appellerons l’attention sur un point. Autant les silhouettes des
parties détachées sont mauvaises, autant les ornements repoussés
sur les champs sont d’un bon style et d’un pur goût français, rappe-
lant même le faire de l’école lyonnaise. Regardez ces griffons, ces
chimères, ces monstres à long cou dont les têtes s’enlacent, ces
rinceaux s’épanouissant en des gaines d’où sortent des corps de
femmes, ces satyres d’un dessin si naturel, tout vient nous signaler
une œuvre française.
Sans nous arrêter à la rondache qui présente les mêmes carac-
tères et un curieux emblème : un crabe se répétant de distance en
distance dans le cadre d’ornements qui enserre sa région bombée,
examinons ce qu’on peut réunir de renseignements sur ces deux
pièces d’armes 1.
On sait qu’elles étaient conservées à la Bibliothèque impériale,
mais qu’elles appartenaient auparavant au Cabinet du Stathouder,
en Llollande. D’autre part, on sait qu’Henri IV et Louis XIII entre-
tinrent au Louvre des armuriers et embellisseurs d’armes, parmi
lesquels ces Petit que nous avons déjà signalés. Nous savons d’autre
1. Nous ne parlons que pour mémoire de l’épée (J. 97) qui accompagne ce
casque et cette rondache. Sa lame, qui paraît bien la sienne, nous apporte un
renseignement utile, car elle est de Tomas de Ayala, maître espagnol qui vivait
au xviie siècle. La garde bien ciselée, mais d’une architecture très lourde, rappelle
ces modèles que le Français Woëriot avait dessinés à la fin du xvie siècle et où les
figures humaines commencent à se substituer aux éléments architecturaux de la
garde, ce qui est toujours une faute. Dans la bouterolle du fourreau, on retrouve
les trophées de drapeaux des recueils d’Etienne de Faune.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
donnons ici la figure et qui, quoi qu’en dise la Direction du Musée,
ne sont nullement des œuvres du xvie siècle. Que l’on regarde avec
attention le casque qui est une bourguignote à grand garde-nuque
très évasé, comme on le porta sous Louis XIII et pas avant, que l’on
regarde la forme des jouées, de la crête tronquée en avant, d’autres
caractères encore qui existent dans les défenses de tète de ce roi
que possède le Musée, et l’on aura la certitude que, si ce casque n’a
point appartenu à Louis XIII, il a été fait sous son règne. Sans nous
appesantir sur les signes de certaine décadence que présente la
chimère mal posée sur la crête et qui ne fait point corps avec elle, le
manque de goût dont témoigne cette queue mal enroulée, maladroite-
ment détachée, la pauvreté du motif qui rattache en avant la crête
au droit du timbre, le mauvais modelé de cette renommée dont la
banalité de facture ramène aux poncifs d’orfèvres les moins fameux,
nous appellerons l’attention sur un point. Autant les silhouettes des
parties détachées sont mauvaises, autant les ornements repoussés
sur les champs sont d’un bon style et d’un pur goût français, rappe-
lant même le faire de l’école lyonnaise. Regardez ces griffons, ces
chimères, ces monstres à long cou dont les têtes s’enlacent, ces
rinceaux s’épanouissant en des gaines d’où sortent des corps de
femmes, ces satyres d’un dessin si naturel, tout vient nous signaler
une œuvre française.
Sans nous arrêter à la rondache qui présente les mêmes carac-
tères et un curieux emblème : un crabe se répétant de distance en
distance dans le cadre d’ornements qui enserre sa région bombée,
examinons ce qu’on peut réunir de renseignements sur ces deux
pièces d’armes 1.
On sait qu’elles étaient conservées à la Bibliothèque impériale,
mais qu’elles appartenaient auparavant au Cabinet du Stathouder,
en Llollande. D’autre part, on sait qu’Henri IV et Louis XIII entre-
tinrent au Louvre des armuriers et embellisseurs d’armes, parmi
lesquels ces Petit que nous avons déjà signalés. Nous savons d’autre
1. Nous ne parlons que pour mémoire de l’épée (J. 97) qui accompagne ce
casque et cette rondache. Sa lame, qui paraît bien la sienne, nous apporte un
renseignement utile, car elle est de Tomas de Ayala, maître espagnol qui vivait
au xviie siècle. La garde bien ciselée, mais d’une architecture très lourde, rappelle
ces modèles que le Français Woëriot avait dessinés à la fin du xvie siècle et où les
figures humaines commencent à se substituer aux éléments architecturaux de la
garde, ce qui est toujours une faute. Dans la bouterolle du fourreau, on retrouve
les trophées de drapeaux des recueils d’Etienne de Faune.