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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 37.1907

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Nr. 1
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Jamot, Paul: Le salon d'Automne, [2]: l'Exposition
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https://doi.org/10.11588/diglit.24864#0060

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52

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

cela agit sur nous avec un charme irritant qu’on n’oubLe pas.

Depuis deux siècles, il y a des artistes russes, — quelques-uns
très considérables, — mais y a-t-il un art russe? A aucun moment
n’apparaît une floraison nationale, équivalente, par exemple, à ce
que fut pour l’Angleterre l’époque des grands portraitistes et des
premiers paysagistes, de Gainsborough à Constable, ou comparable
même à la période préraphaélite.

De cette revue rapide on est tenté de conclure que l’art, en
Russie, n’est pas un produit spontané ni populaire de la race. D’ail-
leurs, malgré certaines illusions contraires qui s’expriment volon-
tiers aujourd’hui en paroles généreuses, il semble bien que, dans
tous les pays et dans tous les temps, à l’exception d’époques privi-
légiées comme le siècle de Périclès ou le xmc siècle en France, l’art
soit, par essence, aristocratique. Peut-être l’est-il, plus qu’ailleurs,
en Russie, où les meilleurs s’adressent à une faible élite de dilet-
tantes raffinés dont la culture est surtout littéraire. Ainsi s’explique
la naissance d’un art un peu factice et cependant original, comme
celui de M. Constantin Somoff. Il n’est pas, si Ton cherche bien, sans
précédents en Russie même ou dans les pays voisins. Le plus fameux
miniaturiste du xviii0 siècle, TIall, était né à Stockholm; Lévitski a
peint des miniatures1, et Borovikovski a commencé sa carrière de
portraitiste par de minuscules images sur zinc et sur ivoire2. Avant
d’être travesti en Clinchetet par nos connaisseurs, l’auteur de tant
d’aimables polissonneries, né à Riga, s’appelait Klingstedt; et ce fut
le Suédois Lanfransen qui rendit célèbre le nom de Lavreince.

Est-ce une affinité naturelle ou est-ce le hasard de la politique
qui a constamment tourné vers la France les regards des artistes
russes? Toujours est-il que leur histoire réfléchit fidèlement les
révolutions et les modes successives de nos ateliers, tandis qu’elle
semble constamment échapper aux autres influences étrangères. Cer-
tains mouvements d’art qui eurent, au siècle dernier, les plus
fécondes ou les plus vastes conséquences sont nés ailleurs qu’en
France : la Russie les ignore. N’est-il pas curieux qu’aucun pinceau
moscovite n’ait jamais paru guidé par une admiration spéciale pour
Reynolds ou pour Lawrence, et que, plus tard, dans un milieu où
l’art est volontiers pénétré d’intentions littéraires, aucun prosélyte

1. L’une d’elles figurait dans la récente Exposition de la Bibliothèque Natio-
nale (n° 351 du catalogue).

2. Une miniature représentant Marie Alexéïevna Lvov était exposée au Grand
Palais.
 
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