CORRESPONDANCE D’ALLEMAGNE
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de la pensée. Un directeur de revue allemand, séduit par des paysages roumains,
se sentait vivement tenté de les reproduire; puis tout à coup : « Non! Cela nous
est trop étranger! » Et il se rabattit sur des sites alpestres. S’il fallait élire au
Glaspalast un seul paysage pour un musée, il faudrait selon la justice et le
mérite aller tout droit à cette grande œuvre de M. Sarubin. J’ai pu me convaincre
que parmi mes plus intelligents amis pas un ne l’avait remarquée. L’intérêt va
toujours ou bien à la chose cent fois vue, ou bien aux monstres : la série des
Hodler de la Sécession a eu tout le succès désirable.
La sculpture est aussi regardée avec quelque indifférence, et, en ce qui con-
cerne son appréciation, quel contraste entre un public français et un public aile-
JEUNE HOMME LUTTANT CONTRE UN SERPENT, PAR M. R. MARCUSE
(Exposition internationale des Beaux-Arts, à Munich.)
mand! Il est vrai qu’un lvlinger ou un Hildebrand prêtent mieux à des disser-
tations de savants qu’à un enthousiasme des foules tel qu’en peut susciter
l’œuvre d’un Rodin. C’est d’eux que se meuvent la plupart des statuaires alle-
mands modernes, — nous entendons les bons ! Et si lvlinger se réfère plus à la
Renaissance, Hildebrand ramène mieux à l’antique. Enfin, si les trois quarts des
sculpteurs français vont à la grâce et à l’élégance et à la femme, les trois quarts
des sculpteurs allemands préfèrent la force, la brutalité même et le type viril. Il
y a toujours de jolis éphèbes renversant l’urne de quelque fontaine aux exposi-
tions de Munich, et on les retrouve avec plaisir l’année suivante sous les arbres
de quelque square ou dans les bosquets d’un jardin public. Deux œuvres au Glas-
palast sont à signaler pour des mérites divers : le Jeune homme au serpent de
M. Rudolf Marcuse, pour l’énergie et la recherche de l’attitude, la hardiesse de
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de la pensée. Un directeur de revue allemand, séduit par des paysages roumains,
se sentait vivement tenté de les reproduire; puis tout à coup : « Non! Cela nous
est trop étranger! » Et il se rabattit sur des sites alpestres. S’il fallait élire au
Glaspalast un seul paysage pour un musée, il faudrait selon la justice et le
mérite aller tout droit à cette grande œuvre de M. Sarubin. J’ai pu me convaincre
que parmi mes plus intelligents amis pas un ne l’avait remarquée. L’intérêt va
toujours ou bien à la chose cent fois vue, ou bien aux monstres : la série des
Hodler de la Sécession a eu tout le succès désirable.
La sculpture est aussi regardée avec quelque indifférence, et, en ce qui con-
cerne son appréciation, quel contraste entre un public français et un public aile-
JEUNE HOMME LUTTANT CONTRE UN SERPENT, PAR M. R. MARCUSE
(Exposition internationale des Beaux-Arts, à Munich.)
mand! Il est vrai qu’un lvlinger ou un Hildebrand prêtent mieux à des disser-
tations de savants qu’à un enthousiasme des foules tel qu’en peut susciter
l’œuvre d’un Rodin. C’est d’eux que se meuvent la plupart des statuaires alle-
mands modernes, — nous entendons les bons ! Et si lvlinger se réfère plus à la
Renaissance, Hildebrand ramène mieux à l’antique. Enfin, si les trois quarts des
sculpteurs français vont à la grâce et à l’élégance et à la femme, les trois quarts
des sculpteurs allemands préfèrent la force, la brutalité même et le type viril. Il
y a toujours de jolis éphèbes renversant l’urne de quelque fontaine aux exposi-
tions de Munich, et on les retrouve avec plaisir l’année suivante sous les arbres
de quelque square ou dans les bosquets d’un jardin public. Deux œuvres au Glas-
palast sont à signaler pour des mérites divers : le Jeune homme au serpent de
M. Rudolf Marcuse, pour l’énergie et la recherche de l’attitude, la hardiesse de