15 CENTIMES
LE GRELOT
15 CENTIMES
Si nous lâchions Tunis ?
M. Léon Renault n'ayant encore soumis aux
gogos aucune émission d'actions d'une Société
des brouillards et coups de soleil de la Medjer-
dah, M. Faire est à peu près le seul homme
satisfait de la tournure que prennent les af-
faires tunisiennes.
On se demande de plus en plus quel besoin
nous avions d'aller nous fourrer dans celte
galère ?
— Tirer vengeance des pillages des Krou-
mirs?
Admettons pour un moment qu'il y ait des
Kroumirs et qu'ils aient volé cinq sacs de blé,
six quarterons d'œufs, trois paires de bottes
et quelques biques aux gens de la Galle?
Comme tirer vengeance de ce forfait nous
coûte déjà une centaine de millions et quel-
que mille hommes, c'est réellement trop cher.
Mieux eût valu habiller tous les Kroumirs des
pieds à la tète et leur faire des rentes. De cette
façon ils se fussent soigneusement gardés de
venir voler chez nous et nous auraient servi
d'amis dévoués. C'eût été beaucoup plus ha-
bile, plus vite fait et moins coûteux.
X
Au lieu de cela, on reporte plus avant la
frontière.
Résultat net : Plus de pillards à l'intérieur,
et, loin de France, dans un pays encore plus
insalubre et plus difficile à surveiller, des
tribus de la Tripolitaine, tout aussi peu dignes
du prix Monthyon que les fieffés filous Out-
chetas.
Notre intérêt n'était donc nullement d'en-
treprendre cette expédition.
B. S. H., avec la candeur de ces septuagé-
naires restésà peu près vierges, nous parle,
il est vrai, de question humanitaire.
J'aime à croire que nul ne fera à cet argu-
ment l'honneur de le considérer autrement
que comme une mauvaise blague.
Il n'est nullement prouvé que la civilisa-
tion fasse le bonheur.
Nous lui devons la guillotine, la falsifica-
tion de l'absinthe et des escargots, le vaude-
ville, la société protectrice des animaux, les
pianos, les concierges, etc., etc.
Même avec des airs d'une mélodie aussi
suave que
Titine demeure à Grenelle
On avouera que ces perfectionnements ap-
portés à la vie pastorale ne suffisent peut-être
pas à procurer à ceux qu'on contraint à en
jouir, des trésors de félicité.
X
Reste maintenant la question de savoir s'il
peut être utile à la France de créer de l'autre
côté de la Méditerranée, ce lac français en
train de se faire naturaliser anglais, une
grande colonie, qui servira de débouché à son
commerce.
Nous ne le croyons pas.
D'abord parce que les Arabes consomment
très peu.
Et ensuite, parce que, du moment où l'Al-
gérie serait une colonie riche, puissante et
prospère, pouvant, se suffire à elle-même, elle
n'aurait rien de plus pressé que de se séparer
de nous — tels les États-Unis firent à la fin
du siècle dernier.
X
Resteraient donc deux partis à prendre :
Ou abandonner tout net une conquête, sans
cesse menacée, qui nous coûtera toujours et
ne nous rapportera pas djx ans sans qu'aus-
sitôt nous la perdions;
Ou la laisser libre de s'organiser toute seule
dès maintenant, sur le régime fédératif, et
quand un gouvernement vraiment libre y
fonctionnera, solliciter que la colonie daigne
■entreprendre l'annexion de la métropole.
Au demeurant, un si petit fossé nous sépare
qu'il serait tentant d'essayer de le combler,
en y jetant tous les fonctionnaires à rond de
cuir que l'Europe nous envie aux seules épo-
ques de grèves de vidangeurs.
Gringoire.
BLAGUES ET GNONS
M. Gambetta va s'en aller prochainement au
Havre.
Dotera-t-il cette ville de son dada : le
département de la Seine-Maritime, qui aurait
l'immense avantage de fournir quatre places
de sous-préfets à distribuer ?
X
Les instituteurs ont offert un grand banquet
à M. Paul Bert.
Ceux qui n'avaient pu se déranger s'étaient
cotisés par dix et s'étaient fait représenter par
un mangeur, fourni sans doute par une agence
qd hoc.
On a exalté au dessert renseignement dé
l'Etat, mais on a oublié de prévoir le cas
— heureusement improbable, mais possi-
ble — où comme naguère, les punaises de
sacristie mettraient la main sur l'État.
X
La France et l'Angleterre ont prié le Khé-
dive de faire cesser la traite des nègres en
Nubie.
Celui-ci aurait parfaitement pu répondre en
envoyant B. S. H. voir chez Mme Leroy si
Mystère y était, et Gladstone faire uuc petite
tournée dans le sud de l'Irlande.
,#| ■ x
La fièvre jaune sévit cruellement au Séné-
gal.
L'agence Havas nous apprend qu'a Gorée et
Dakar, la situation est suspecte.
— En 93, dit Calino, comme on vous eût
vivement traduit cette situation, le matin,
devant le tribunal révolutionnaire pour la
guillotiner à midi précis. Mais à présent, on
dégénère. On est trop mou.
X
M. B..., ytonnelier versaillais, qui soupçon-
nait sa femme d'entretenir des relations adul-
tères avec un prêtre, so rendit chez celui-ci,
accompagné d'un agent. « Là, dit le Radical,
il trouva sa femme vêtue d'une simple che-
mise. Il s'élança sur elle et lui administra une
forte correction, puis fit mine de vouloir lui
enlever son dernier vêtement et de la faire
sortir dans ce costume. Le gardien de la paix,
témoin de cette scène, s'interposa alors...
Avouez qu'il était temps. Nous ne blâmons
pas le gardien d'avoir laissé B... rosser sa
femme, mais nous le soupçonnons vivement
d'être marié.
X
La conscience, définie par l'archevêque de
Turin :
« Laconscience est un tribunal où sont seuls
juges l'œil et le doigt de Dieu »
Quand l'homme se livre à de plus ou moins
étranges observations, cela provient évidem-
ment de ce que le dit doigt se fourre dans l'œil
proxinieen question.
Décidément Turin mérite d'être aussi célè-
bre pour son archevêque que pour son ver-
mouth.
X
La canonisation de Benoit Labre coûtera
environ loO.OÛU fr. Comme il est trop pouilleux
pour avoir cette somme, on y pourvoit par une
souscription.
Jadis les riches entraient au Paradis aussi
difficilement qu'un chameau passe dans le
trou d'une aiguille.
Mais tout cela est bien changé I
X
M. Constans vient d'acheter, à Bagnères-de-
Bigorre, la villa Geru/.ez, moyennant 100.000 fr.
Nous ne sommes pas de ceux qui voudraient
voir les ministres loger à la corde ou sous les
ponts.
Mais n'importe, le métier est préférable à
celui de vendeur de copie a trois sous la ligne.
X
M. Lahouchère affirmecjue. le cœur de Louis
XVI ayant été transporte en Angleterre, un
un savant docteur, du nom de Buckland,l'exa
mina, la flaira, puis.... l'avala.
Je crois l'histoire apocryphe.
Il est évident pour tout le monde que, de-
puis les dragonnades et la persécution des Yau-
dois, le gâteux et sénile époux de Mme de Main-
tenon n'avait plus de cœur.
X
M. Camescasse va, dit-on, se retirer et
laisser la place à Ranç.
Celui-ci publie déjà, dans le Voltaire, une
étude sur les divers services de la Préfecture
,de police, qui me semble un indice certain de
ses intentions.
Au .cours'de celte étude, il déplore que pour
recruter les agents de la sûreté, on soit obligé
de s'adresser à des hommes n'ayant pas abso-
lument que des prix Monthon dans leur
passé.
Espérons que le suecès du Patriote va chan-
ger tout cela et qu'en sortant de la Qaîté, nom-
bre de gens iront, avec enthousiasme, se faire
mouchards.
En prévision de cet événement, je m'étonne
même qu'on n'ait pas ouvert un bureau d'iso-
lements nocturnes. Car la nuit porte conseil,
et tel qui voudrait à minuit marcher sur les
traces de Vidocq, pourrait bien avoir réfléchi
le lendemain inatiu.
X
Une anecdote assez amusante à propos de
l'étiquette des cours.
Un jour, Marie-Antoinette était à sa toilette,
et la princesse de Polignac tenait prête la che-
mise de la reine, qu'elle se disposait à lui pas-
ser. Au même instant, on frappe à la porte,
on ouvre... Parait la comtesse d'Artois.
C'était à cette dame que revenait l'honneur
de passer la chemise de la reine. L'étiquette
voulait de plus que l'on fût dégantée pour
remplir cet office. Et comme la comtssse a'Ar-
tois avait des gants, elle se mit en devoir de
les ôter.
La reine attendait. En ce moment, on frappa
de nouveau. C'était la comtesse de Provence
qui -avait le pas sur sa sœur d'Artois.
Celle-ci remit ses gants. La reine attendait
toujours.
Ce ne fut que quand la comtesse de Pro •
vence, qui était aussi gantée, eût retiré ses
gants, que Marie-Antoinette put enfin passer
sa chemise.
Buridan.
CES VALEUREUX ITALIENS
La petite histoire suivante, absolument
authentique, donnera la mesure de la valeur
italienne.
Il y a quelque temps un de vos innombra-
bleministres de la guerre a voulu supprimer la
cuirasse.
Furieuses protestations des cuirassiers.
Le ministre, pour obéir à l'opinion publique,
consent à faire des concessions.
Il décrète qu'àl'avenirles cuirassiers italiens
porteraient des demi-cuirasses.
Quelque temps après, a lieu une grande
revue.
Le ministre voit défiler de loin les cuirassiers
dont les demi-cuirasses brillent au soleil.
— Capitaine 1 dit-il a un aide de camp, en
croirai-je mes yeux! comment se fait-il que le
régiment marche en arrière.
— Faites excuse, mon supérieur, les cuiras-
siers marchent en avant.
— Je vous dis qu'ils marchent en arrière...
Ah mais non! vous aviez raison!•■ Tiens!
tiens! liens!., qu'est-ce que cela veut dire?..
Ah! les noms de nom! ils se sont tous fourré..
dans le dos {VA) la partie blindée de leur demi-
cuirasse 1
M.
GAZETTE DE MONTRETOUT
Lu grè»c du clergé.
Le porte-crosse d'Angers devient amusant.
Ce singulier prélat politique a juré d'effacer
la mémoire des fumisteries de feu son profes-
seur et ami Dupanloup qui s'écria un jour en
pleine chambre : « Oui, le jour où je m'aper-
cevrai qu'il n'y a plus moyen de gouverner
les consciences du peuple français, ie jour où
je ne pourrai plus façonner à ma guise l'esprit
de la jeunesse, je m'en irai dans le désert avec
mon évangile et mon décalogue ! »
El les députés de fredonner :
Qu'il reste seul (une, deusse) avec son de...calogue!
M. Freppel, l'évèque à la tabatière monu-
mentale, vient de reprendre en sous-œuvre ia
mémorable idée que l'évèque d'Orléans avait
tirée de sa vieille cervelle apostolique et ro-
maine.
Il recommande au clergé de son diocèse de
se mettre en grève à l'instar des charpentiers
de Paris et des vidangeurs de Marseille.
Voyez-vous d'ici M. Freppel partant pour le
désert avec son Evangile — et sa tabatière —
dans la poche de sa soutane — et son déca-
logue sous le bras !
* *
Tanliriii' aninlis cwlcstilmw iras !
Ehl quoi! les Eglises se fermeraient, les or-
gues divines se tairaient, les tribunaux cor-
rectionnels de la Pénitence n'auraient plus de
ministère public; l'eau de Lourdes perdrait
ses miraculeuses propriétés...
Tant de fiel entre-t-il dans l'àme des dévots?
Que devjeiidrions-nous, bon Dieu! infor-
tunés parisiens, s?;} ne nous était plus possi-
ble d'aller, le dimanche, lorgner dévotement
du bas du parvis de la Madeleine, à l'issue de
la messe d'une heure, les jambes... divines de
nos délicieuses petites Parisiennes, retrous-
sant... charitablement leurs jupes de dentelles
pour faire à leurs admirateurs l'aumône du
spectacle enchanteur de leurs bottines-Louis-
XV à barrettes et à talons démesurément
pointus ?
0 M. Freppel! qui venez de me faire pondre
dix lignes à l'Etincelle, avez-vous bien songé
aux désastres irréparables qu'entraînerait cette
grève des vidangeurs de l'âme, dont vous êtes
l'un des chefs d'équipe les plus accrédités ?
On entendrait comme au troisième acte des
Deux Reines de France, de M. Legouvé, un
chœur de matrones, un chœur des vierges,
un chœur des orphelins et un chœur des ba-
cheliers, s'arracher les cheveux sur un air du
chaste >£. Gounod devant les portes des égli-
ses « impitoyablement fermées. »
Et le nonce du );ape, à 1 instar du Légal
d'Innocent, sous Philippe-/Vuguyte, me'tfrait
4e quart d'heure eii quart d'heure, sa tête vé-
nérable à la fenêtre ogivale n> 27 des tours de
Notre-Dame, puis, après avoir soufflé trois
fois dans son olifant, il s'écrierait d'une voix
tonitruante :
c Anathème à la République française !
Brrou !.. Je tremble en y pensant I
Heureusement pourtant que M. Gambetta a
un oncle chanoine, le Révérend M. Monsabré,
qui pour ne pas dépoétiser son neveu, se re-
fuserait à entrer dans le mouvement.
Et s'il n'en reste qu'un ce sera celui-là!
* j*
lies lovelaccs précoce».
Les journaux cléricaux n'ont pas encore
dit leur petit mot sur les lovelaces préeoces dont
les tribunaux ont ieu à s'occuper dernière-
ment.
Et, naturellement, ces bonnes petites feuil-
les de sacristie réparent leur oubli en ayant
soin de faire remarquer que si le jeune Ber-
nard a tenté d'assassiner Mme Desvalliôres,
nièce de Legouvé, pour violer la-petite Dcs-
vajjlières, âgée'de 13 ans, « c'est la faute à
Rousseau, c'est la faute à Voltairel »
Peut-être est-ce aussi la « faute à Rousseau >
si Jules Poupart, ce petit paysan de 13 ans, a
violé la petite Blanche Montaille, âgée de 5
ans.
Le tribunal a condamné l'enfant ceupable
en cinq années de détention dans une maison
de correction.
C'est ça qui le corrigera ! !
Ce système de flanquer sur le dos de cette
pauvre République tous les crimes, assassi-
nats, viols, adultères, etc., n'est certes pas
nouveau. Mais là où la perversité des cléri-
caux se révèle, c'est quand ils prétendent que
nos enfants sont devenus beaucoup plus vi-
cieux depuis qu'on les a Soustraits à l'éduca-
tion des Jésuites et des bons frères.
Elle est raide, celle-là !
J'en appelle à la vénérable collection de la
Gazette des Tribunaux.
Du reste il est inutile d'insister là-dessus.
Chacun sait qu'en fait d'enseignement de la
jeunesse, les hommes noirs s'en sont toujours
tenus à la première règle de la syntaxe: le mas-
culin s'accorde avec le masculin !
* *
*
Auriol et «on médecin.
Le célèbre clown Auriol, qui vient de casser
i^on trapèze après 73 ans de joyeuses disloca-
tions, était à la ville, en proie à un spleen in-
curable.
Ce facétieux farceur était hypocondriaque.
Un jour on lui conseilla d'aller consulter le
docteur Bouillaud :
— Vous êtes triste, dites-vous, en proie à
une noire mélancolie et vous me demandez un
remède... Eh bien, mon cher monsieur, allez
le plus souvent possible voir jouer Auriol au
cirque.
— Hélas, Monsieur! reprit le désopilant clown,
hélas ! c'est moi qui suis Auriol I
*
.. »>»
Oéométi'io enfantine.
Toto a eu le prix de géométrie. Son père en
est fier. Aussi, pour faire briller le jeune lau-
réat, son heureux papa lui dematide-t-il au
dessert.
— Voyons, Toto, toi. qui as eu le prix de
géométrie, dis-nous uu peu quel est le plus
court chemin d'un point à un autre,
Lors notre futur iugénieur, avec un aplomb
imperturbable :
— Parbleu ! c'est le chemin de fer !
Montretout.
FAUSSES NOUVELLES
M. Itouslan aurait entre les mains une lettre
de Chouard au Bey, lui demandant la succes-
sion de Mustapha dans ses fonctions de pre-
mier ministre.
Après des recherches actives, on est parvenu
àétablir l'étatcivll de six Khroumirs, dont deux
mâles et quatre femelles, et on va les envoyer
au Jardin d'acclimatation, afin de perpétuer
cette belle race, que le vieux marabout de
Sidi-Abdallah affirmait disparue.
La Républigue française crossera vigoureuse-
ment le prochain discours de M. Paul Bert et
commencera son éreintement par cette coquille
volontaire :
« Dimanche dernier, on a entendu M. Paul
Brert.... »
M. de Moltke aurait proposé à M. Farre, si
celui-ci consentait à se faire naturaliser alle-
fnand, 4e lm donner le commandement en
Chef de toutes les arpiées de terre et'de rnep
de l'Allemagne, que, seul, il est capable de
conduire d'une façon convenable sans toutenw
brouiller dans ces rouages compliqués.
Les Italiens négocient activement avec l'Es- .
pagne, la Turquie, l'Allemagne et l'Angle-
terre.
Dès qu'ils seront sûrs de la neutralité de ces
puissances, ils attaqueront la France, qu'ils
ambitionnent de vaincre avec leurs propres
et seules forces, pour la contraindre à accepter
d'eux la Sardaigne.
Vkrax.
©ouste % Jffipnioag?»
Un des personnages les plus importants d'un
théâtre est sans contredit le secrétaire-géné-
ral, chargé des rappoits de la direction avec la
LE GRELOT
15 CENTIMES
Si nous lâchions Tunis ?
M. Léon Renault n'ayant encore soumis aux
gogos aucune émission d'actions d'une Société
des brouillards et coups de soleil de la Medjer-
dah, M. Faire est à peu près le seul homme
satisfait de la tournure que prennent les af-
faires tunisiennes.
On se demande de plus en plus quel besoin
nous avions d'aller nous fourrer dans celte
galère ?
— Tirer vengeance des pillages des Krou-
mirs?
Admettons pour un moment qu'il y ait des
Kroumirs et qu'ils aient volé cinq sacs de blé,
six quarterons d'œufs, trois paires de bottes
et quelques biques aux gens de la Galle?
Comme tirer vengeance de ce forfait nous
coûte déjà une centaine de millions et quel-
que mille hommes, c'est réellement trop cher.
Mieux eût valu habiller tous les Kroumirs des
pieds à la tète et leur faire des rentes. De cette
façon ils se fussent soigneusement gardés de
venir voler chez nous et nous auraient servi
d'amis dévoués. C'eût été beaucoup plus ha-
bile, plus vite fait et moins coûteux.
X
Au lieu de cela, on reporte plus avant la
frontière.
Résultat net : Plus de pillards à l'intérieur,
et, loin de France, dans un pays encore plus
insalubre et plus difficile à surveiller, des
tribus de la Tripolitaine, tout aussi peu dignes
du prix Monthyon que les fieffés filous Out-
chetas.
Notre intérêt n'était donc nullement d'en-
treprendre cette expédition.
B. S. H., avec la candeur de ces septuagé-
naires restésà peu près vierges, nous parle,
il est vrai, de question humanitaire.
J'aime à croire que nul ne fera à cet argu-
ment l'honneur de le considérer autrement
que comme une mauvaise blague.
Il n'est nullement prouvé que la civilisa-
tion fasse le bonheur.
Nous lui devons la guillotine, la falsifica-
tion de l'absinthe et des escargots, le vaude-
ville, la société protectrice des animaux, les
pianos, les concierges, etc., etc.
Même avec des airs d'une mélodie aussi
suave que
Titine demeure à Grenelle
On avouera que ces perfectionnements ap-
portés à la vie pastorale ne suffisent peut-être
pas à procurer à ceux qu'on contraint à en
jouir, des trésors de félicité.
X
Reste maintenant la question de savoir s'il
peut être utile à la France de créer de l'autre
côté de la Méditerranée, ce lac français en
train de se faire naturaliser anglais, une
grande colonie, qui servira de débouché à son
commerce.
Nous ne le croyons pas.
D'abord parce que les Arabes consomment
très peu.
Et ensuite, parce que, du moment où l'Al-
gérie serait une colonie riche, puissante et
prospère, pouvant, se suffire à elle-même, elle
n'aurait rien de plus pressé que de se séparer
de nous — tels les États-Unis firent à la fin
du siècle dernier.
X
Resteraient donc deux partis à prendre :
Ou abandonner tout net une conquête, sans
cesse menacée, qui nous coûtera toujours et
ne nous rapportera pas djx ans sans qu'aus-
sitôt nous la perdions;
Ou la laisser libre de s'organiser toute seule
dès maintenant, sur le régime fédératif, et
quand un gouvernement vraiment libre y
fonctionnera, solliciter que la colonie daigne
■entreprendre l'annexion de la métropole.
Au demeurant, un si petit fossé nous sépare
qu'il serait tentant d'essayer de le combler,
en y jetant tous les fonctionnaires à rond de
cuir que l'Europe nous envie aux seules épo-
ques de grèves de vidangeurs.
Gringoire.
BLAGUES ET GNONS
M. Gambetta va s'en aller prochainement au
Havre.
Dotera-t-il cette ville de son dada : le
département de la Seine-Maritime, qui aurait
l'immense avantage de fournir quatre places
de sous-préfets à distribuer ?
X
Les instituteurs ont offert un grand banquet
à M. Paul Bert.
Ceux qui n'avaient pu se déranger s'étaient
cotisés par dix et s'étaient fait représenter par
un mangeur, fourni sans doute par une agence
qd hoc.
On a exalté au dessert renseignement dé
l'Etat, mais on a oublié de prévoir le cas
— heureusement improbable, mais possi-
ble — où comme naguère, les punaises de
sacristie mettraient la main sur l'État.
X
La France et l'Angleterre ont prié le Khé-
dive de faire cesser la traite des nègres en
Nubie.
Celui-ci aurait parfaitement pu répondre en
envoyant B. S. H. voir chez Mme Leroy si
Mystère y était, et Gladstone faire uuc petite
tournée dans le sud de l'Irlande.
,#| ■ x
La fièvre jaune sévit cruellement au Séné-
gal.
L'agence Havas nous apprend qu'a Gorée et
Dakar, la situation est suspecte.
— En 93, dit Calino, comme on vous eût
vivement traduit cette situation, le matin,
devant le tribunal révolutionnaire pour la
guillotiner à midi précis. Mais à présent, on
dégénère. On est trop mou.
X
M. B..., ytonnelier versaillais, qui soupçon-
nait sa femme d'entretenir des relations adul-
tères avec un prêtre, so rendit chez celui-ci,
accompagné d'un agent. « Là, dit le Radical,
il trouva sa femme vêtue d'une simple che-
mise. Il s'élança sur elle et lui administra une
forte correction, puis fit mine de vouloir lui
enlever son dernier vêtement et de la faire
sortir dans ce costume. Le gardien de la paix,
témoin de cette scène, s'interposa alors...
Avouez qu'il était temps. Nous ne blâmons
pas le gardien d'avoir laissé B... rosser sa
femme, mais nous le soupçonnons vivement
d'être marié.
X
La conscience, définie par l'archevêque de
Turin :
« Laconscience est un tribunal où sont seuls
juges l'œil et le doigt de Dieu »
Quand l'homme se livre à de plus ou moins
étranges observations, cela provient évidem-
ment de ce que le dit doigt se fourre dans l'œil
proxinieen question.
Décidément Turin mérite d'être aussi célè-
bre pour son archevêque que pour son ver-
mouth.
X
La canonisation de Benoit Labre coûtera
environ loO.OÛU fr. Comme il est trop pouilleux
pour avoir cette somme, on y pourvoit par une
souscription.
Jadis les riches entraient au Paradis aussi
difficilement qu'un chameau passe dans le
trou d'une aiguille.
Mais tout cela est bien changé I
X
M. Constans vient d'acheter, à Bagnères-de-
Bigorre, la villa Geru/.ez, moyennant 100.000 fr.
Nous ne sommes pas de ceux qui voudraient
voir les ministres loger à la corde ou sous les
ponts.
Mais n'importe, le métier est préférable à
celui de vendeur de copie a trois sous la ligne.
X
M. Lahouchère affirmecjue. le cœur de Louis
XVI ayant été transporte en Angleterre, un
un savant docteur, du nom de Buckland,l'exa
mina, la flaira, puis.... l'avala.
Je crois l'histoire apocryphe.
Il est évident pour tout le monde que, de-
puis les dragonnades et la persécution des Yau-
dois, le gâteux et sénile époux de Mme de Main-
tenon n'avait plus de cœur.
X
M. Camescasse va, dit-on, se retirer et
laisser la place à Ranç.
Celui-ci publie déjà, dans le Voltaire, une
étude sur les divers services de la Préfecture
,de police, qui me semble un indice certain de
ses intentions.
Au .cours'de celte étude, il déplore que pour
recruter les agents de la sûreté, on soit obligé
de s'adresser à des hommes n'ayant pas abso-
lument que des prix Monthon dans leur
passé.
Espérons que le suecès du Patriote va chan-
ger tout cela et qu'en sortant de la Qaîté, nom-
bre de gens iront, avec enthousiasme, se faire
mouchards.
En prévision de cet événement, je m'étonne
même qu'on n'ait pas ouvert un bureau d'iso-
lements nocturnes. Car la nuit porte conseil,
et tel qui voudrait à minuit marcher sur les
traces de Vidocq, pourrait bien avoir réfléchi
le lendemain inatiu.
X
Une anecdote assez amusante à propos de
l'étiquette des cours.
Un jour, Marie-Antoinette était à sa toilette,
et la princesse de Polignac tenait prête la che-
mise de la reine, qu'elle se disposait à lui pas-
ser. Au même instant, on frappe à la porte,
on ouvre... Parait la comtesse d'Artois.
C'était à cette dame que revenait l'honneur
de passer la chemise de la reine. L'étiquette
voulait de plus que l'on fût dégantée pour
remplir cet office. Et comme la comtssse a'Ar-
tois avait des gants, elle se mit en devoir de
les ôter.
La reine attendait. En ce moment, on frappa
de nouveau. C'était la comtesse de Provence
qui -avait le pas sur sa sœur d'Artois.
Celle-ci remit ses gants. La reine attendait
toujours.
Ce ne fut que quand la comtesse de Pro •
vence, qui était aussi gantée, eût retiré ses
gants, que Marie-Antoinette put enfin passer
sa chemise.
Buridan.
CES VALEUREUX ITALIENS
La petite histoire suivante, absolument
authentique, donnera la mesure de la valeur
italienne.
Il y a quelque temps un de vos innombra-
bleministres de la guerre a voulu supprimer la
cuirasse.
Furieuses protestations des cuirassiers.
Le ministre, pour obéir à l'opinion publique,
consent à faire des concessions.
Il décrète qu'àl'avenirles cuirassiers italiens
porteraient des demi-cuirasses.
Quelque temps après, a lieu une grande
revue.
Le ministre voit défiler de loin les cuirassiers
dont les demi-cuirasses brillent au soleil.
— Capitaine 1 dit-il a un aide de camp, en
croirai-je mes yeux! comment se fait-il que le
régiment marche en arrière.
— Faites excuse, mon supérieur, les cuiras-
siers marchent en avant.
— Je vous dis qu'ils marchent en arrière...
Ah mais non! vous aviez raison!•■ Tiens!
tiens! liens!., qu'est-ce que cela veut dire?..
Ah! les noms de nom! ils se sont tous fourré..
dans le dos {VA) la partie blindée de leur demi-
cuirasse 1
M.
GAZETTE DE MONTRETOUT
Lu grè»c du clergé.
Le porte-crosse d'Angers devient amusant.
Ce singulier prélat politique a juré d'effacer
la mémoire des fumisteries de feu son profes-
seur et ami Dupanloup qui s'écria un jour en
pleine chambre : « Oui, le jour où je m'aper-
cevrai qu'il n'y a plus moyen de gouverner
les consciences du peuple français, ie jour où
je ne pourrai plus façonner à ma guise l'esprit
de la jeunesse, je m'en irai dans le désert avec
mon évangile et mon décalogue ! »
El les députés de fredonner :
Qu'il reste seul (une, deusse) avec son de...calogue!
M. Freppel, l'évèque à la tabatière monu-
mentale, vient de reprendre en sous-œuvre ia
mémorable idée que l'évèque d'Orléans avait
tirée de sa vieille cervelle apostolique et ro-
maine.
Il recommande au clergé de son diocèse de
se mettre en grève à l'instar des charpentiers
de Paris et des vidangeurs de Marseille.
Voyez-vous d'ici M. Freppel partant pour le
désert avec son Evangile — et sa tabatière —
dans la poche de sa soutane — et son déca-
logue sous le bras !
* *
Tanliriii' aninlis cwlcstilmw iras !
Ehl quoi! les Eglises se fermeraient, les or-
gues divines se tairaient, les tribunaux cor-
rectionnels de la Pénitence n'auraient plus de
ministère public; l'eau de Lourdes perdrait
ses miraculeuses propriétés...
Tant de fiel entre-t-il dans l'àme des dévots?
Que devjeiidrions-nous, bon Dieu! infor-
tunés parisiens, s?;} ne nous était plus possi-
ble d'aller, le dimanche, lorgner dévotement
du bas du parvis de la Madeleine, à l'issue de
la messe d'une heure, les jambes... divines de
nos délicieuses petites Parisiennes, retrous-
sant... charitablement leurs jupes de dentelles
pour faire à leurs admirateurs l'aumône du
spectacle enchanteur de leurs bottines-Louis-
XV à barrettes et à talons démesurément
pointus ?
0 M. Freppel! qui venez de me faire pondre
dix lignes à l'Etincelle, avez-vous bien songé
aux désastres irréparables qu'entraînerait cette
grève des vidangeurs de l'âme, dont vous êtes
l'un des chefs d'équipe les plus accrédités ?
On entendrait comme au troisième acte des
Deux Reines de France, de M. Legouvé, un
chœur de matrones, un chœur des vierges,
un chœur des orphelins et un chœur des ba-
cheliers, s'arracher les cheveux sur un air du
chaste >£. Gounod devant les portes des égli-
ses « impitoyablement fermées. »
Et le nonce du );ape, à 1 instar du Légal
d'Innocent, sous Philippe-/Vuguyte, me'tfrait
4e quart d'heure eii quart d'heure, sa tête vé-
nérable à la fenêtre ogivale n> 27 des tours de
Notre-Dame, puis, après avoir soufflé trois
fois dans son olifant, il s'écrierait d'une voix
tonitruante :
c Anathème à la République française !
Brrou !.. Je tremble en y pensant I
Heureusement pourtant que M. Gambetta a
un oncle chanoine, le Révérend M. Monsabré,
qui pour ne pas dépoétiser son neveu, se re-
fuserait à entrer dans le mouvement.
Et s'il n'en reste qu'un ce sera celui-là!
* j*
lies lovelaccs précoce».
Les journaux cléricaux n'ont pas encore
dit leur petit mot sur les lovelaces préeoces dont
les tribunaux ont ieu à s'occuper dernière-
ment.
Et, naturellement, ces bonnes petites feuil-
les de sacristie réparent leur oubli en ayant
soin de faire remarquer que si le jeune Ber-
nard a tenté d'assassiner Mme Desvalliôres,
nièce de Legouvé, pour violer la-petite Dcs-
vajjlières, âgée'de 13 ans, « c'est la faute à
Rousseau, c'est la faute à Voltairel »
Peut-être est-ce aussi la « faute à Rousseau >
si Jules Poupart, ce petit paysan de 13 ans, a
violé la petite Blanche Montaille, âgée de 5
ans.
Le tribunal a condamné l'enfant ceupable
en cinq années de détention dans une maison
de correction.
C'est ça qui le corrigera ! !
Ce système de flanquer sur le dos de cette
pauvre République tous les crimes, assassi-
nats, viols, adultères, etc., n'est certes pas
nouveau. Mais là où la perversité des cléri-
caux se révèle, c'est quand ils prétendent que
nos enfants sont devenus beaucoup plus vi-
cieux depuis qu'on les a Soustraits à l'éduca-
tion des Jésuites et des bons frères.
Elle est raide, celle-là !
J'en appelle à la vénérable collection de la
Gazette des Tribunaux.
Du reste il est inutile d'insister là-dessus.
Chacun sait qu'en fait d'enseignement de la
jeunesse, les hommes noirs s'en sont toujours
tenus à la première règle de la syntaxe: le mas-
culin s'accorde avec le masculin !
* *
*
Auriol et «on médecin.
Le célèbre clown Auriol, qui vient de casser
i^on trapèze après 73 ans de joyeuses disloca-
tions, était à la ville, en proie à un spleen in-
curable.
Ce facétieux farceur était hypocondriaque.
Un jour on lui conseilla d'aller consulter le
docteur Bouillaud :
— Vous êtes triste, dites-vous, en proie à
une noire mélancolie et vous me demandez un
remède... Eh bien, mon cher monsieur, allez
le plus souvent possible voir jouer Auriol au
cirque.
— Hélas, Monsieur! reprit le désopilant clown,
hélas ! c'est moi qui suis Auriol I
*
.. »>»
Oéométi'io enfantine.
Toto a eu le prix de géométrie. Son père en
est fier. Aussi, pour faire briller le jeune lau-
réat, son heureux papa lui dematide-t-il au
dessert.
— Voyons, Toto, toi. qui as eu le prix de
géométrie, dis-nous uu peu quel est le plus
court chemin d'un point à un autre,
Lors notre futur iugénieur, avec un aplomb
imperturbable :
— Parbleu ! c'est le chemin de fer !
Montretout.
FAUSSES NOUVELLES
M. Itouslan aurait entre les mains une lettre
de Chouard au Bey, lui demandant la succes-
sion de Mustapha dans ses fonctions de pre-
mier ministre.
Après des recherches actives, on est parvenu
àétablir l'étatcivll de six Khroumirs, dont deux
mâles et quatre femelles, et on va les envoyer
au Jardin d'acclimatation, afin de perpétuer
cette belle race, que le vieux marabout de
Sidi-Abdallah affirmait disparue.
La Républigue française crossera vigoureuse-
ment le prochain discours de M. Paul Bert et
commencera son éreintement par cette coquille
volontaire :
« Dimanche dernier, on a entendu M. Paul
Brert.... »
M. de Moltke aurait proposé à M. Farre, si
celui-ci consentait à se faire naturaliser alle-
fnand, 4e lm donner le commandement en
Chef de toutes les arpiées de terre et'de rnep
de l'Allemagne, que, seul, il est capable de
conduire d'une façon convenable sans toutenw
brouiller dans ces rouages compliqués.
Les Italiens négocient activement avec l'Es- .
pagne, la Turquie, l'Allemagne et l'Angle-
terre.
Dès qu'ils seront sûrs de la neutralité de ces
puissances, ils attaqueront la France, qu'ils
ambitionnent de vaincre avec leurs propres
et seules forces, pour la contraindre à accepter
d'eux la Sardaigne.
Vkrax.
©ouste % Jffipnioag?»
Un des personnages les plus importants d'un
théâtre est sans contredit le secrétaire-géné-
ral, chargé des rappoits de la direction avec la