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d’une façon proprette. Cette universalité de
dispositions nous a probablement privé d’un
artiste réel. — MM. Oyens continuent leurs
exercices pyrotechniques avec un succès qui
grandit à chaque représentation. Ce sont
aussi les véritables Alcides du Nord de la
peinture. On peut déplorer qu’il n’y ait point
chez eux la distinction dont l’art s’accom-
mode si volontiers,mais enfin,elle n’y est pas
et il paraît qu’on peut plaire sans cela. Voyez
Craesbeke! — Pantazis. Un pinceau qui se
forme. Ce peintre me paraît être du nombre
de ceux qui se disent que le talent vaut mieux
que le génie. A ce compte sa fortune est faite.
— Papeleu. Citons dans sa Marine un ciel des
mieux réussis. — Permeke. Très beau son
Inondation des Flandres. Je voudrais bien
savoir quel est le tableau qu’on pourrait lui
opposer comme force, justesse, perspective
effet et sentiment? J’en félicite de tout mon
cœur ce vaillant artiste. — Philippet. Un
artiste qui autrefois annonçait du génie. Le
chic, ce bourreau de l’âme, nous a dévoré
cet homme que nous avions salué au début
comme une apparition grandiose qui allait
jeter un vif éclat sur notre école. Les vents
malsains du jour ont soufflé sur nos espé-
rances et nous ne sommes plus qu’en pré-
sence d’un habile et adroit praticien. Hélas!
c’est la marque du siècle et le fléau du jour
et il n’y a guère que les âmes véritablement
fortes qui puissent y résister. Fiat ! Le siècle
prochain aura son sursum corda et sa résur-
rection ; pour nous, enterrons nos morts.—
MM. Pion, Platteel, Raeymakers (charmante
chose que sa Campinoise), Ravet, H ingel et
Reinheimer se font regarder avec plaisir et
font partie de ce noyau d’artistes qu’on aime
à analyser jusqu’au moment où on en vien-
dra à les discuter. Or, parmi ceux que nous
venons de citer,il en est plusieurs qui passe-
ront par là. — M. Ragot. Portrait. Très re-
marquable d’esprit et de facture mais le ton
éteint qui le domine nous déplait. — Rorbe.
Entente cordiale. Puissante nature d’artiste
que cet animalier dont la palette possède la
robusticité qui caractérise l’homme lui-même.
Ces deux animaux sont splendides et l’œuvre
respire un je ne sais quoi de fort et de sain
qui vous monte à la tête. — Robert. Picolino.
Charmante et douce physionomie traitée
avec soin et avec un dédain marqué du coup
de sabre qui fait s’épater tant de jeunes naïfs
s’imaginant qu’il suffit de vouloir ressembler
à Frans Hais pour le devenir. Chose cu-
rieuse! on n’a jamais vu, que je sache, des
figures striées en quelque sorte de raies
blanches, roses, rouges ou brunes. Or, on
admire dans Hais ce que la nature ne donne
qu’à des distances où elle devient du décor
et où on ne voit que les masses. On pousse
des cris d’admiration devant ces audaces
hors raison et on à l'air de vous insulter
quasi quand vous peignez, par exemple, une
ligure d’enfant ou de femme avec les finesses
de ton et de transparence que la nature y a
mises! Blaireau! vous crie-t-on, et tout est
dit. Puis le cortège des impuissants et des
imbéciles emboitent le pas et l’on va ainsi
s’étonnant que l’école dégringole. De temps
en temps un de ces égarés se repent, voit
clair, se rattrappe et se fait un nom, juste-
ment en revenant à ce qu’il avait brûlé jadis.
J’en pourrais citer une demi-douzaine de ces
veinards mais cela ferait trop de peine aux
autres et il est bon que ceux-ci restent de-
bout, ne fut-ce que comme gardes-fous —
Roelofs. L'abbaye de Groenendael. Bonne
et solide toile où l’on sent, comme partout
du reste, la main expérimentée et l’œil si
profond du maître. — Roffiaen. Toujours
d’une merveilleuse exactitude dans la repro-
duction des évaporisations des lacs et des
bois. Pinceau d’une esquise finesse dans
laquelle disparaît entièrement l’effort tech-
nique pour faire place à des résultats d’une
étonnante intensité comme lumière, jeu,
effet et chaleur.
MM. Rorcourt et Roseels ont exposé des
œuvres estimables. — E. Sacré. L'été. Si
cet artiste reste dans cette gamme claire et
gaie, s’il conserve cette distinction de touche
absolument nouvelle en lui, nous serons les
premiers à le prôner. Cette personnification
de l’Eté est vraiment charmante; quelques
faiblesses dans le dessin et le geste vulgaire
du bras droit, s’opposent à ce que nous en
fassions un éloge aussi complet que nous le
voudrions. — Sir Savile Lumley. Briquelterie,
sujet osé et ingrat que l’artiste a abordé en
vainqueur. C’est finement et peut-être un
peu mignardement touché, mais il n’est pas
nécessaire pour plaire d’avoir le débraillé
de... (cherchez vous même, ami lecteur). On
peut dans des conditions plus calmes avoir
encore un public d'élite. — MM. Sembach,
Schmidt et Sebes n’ont rien exposé de parti-
culièrement saillant. — M. E. Smits. Le pro-
cédé nous semble envahir cet artiste au point
de nous donner des inquiétudes et des soup-
çons. Des inquiétudes, parceque la folie du
procédé doit aboutir au maniérisme (et ici
nous n’en sommes plus très loin,'M. Smits).
Des soupçons, parceque certaine partie du
public se demande si cette maestria un peu
tourmentée ne cache point des faiblesses
.génialesou autres. Le fait est que jusqu’ici
la Marche des saisons et le Grand marché à
Borne, ne sont point encore dépassés, non
pas que ce fussent des œuvres sans défaut
mais il y avait là de viriles qualités que nous
ne retrouvons plus dans les œuvres pro-
duites depuis. — M. Speeckaest tient toujours
à ce réalisme qui parait le tourmenter
comme la robe de Nessus.—M.Stallaert. Les
rameaux. Fière et belle tête d’italienne,peut-
être un peu forte pour le cadre. — Starck.
Sujets orientaux traités avec une grande ap-
parence d’exactitude; touche adroite, sou-
vent spirituelle, intérieurs bien éclairés.Plus
de recherche que d’art. — Storbaf.rts. Cet
artiste a fini par acquérir une puissante ori-
ginalité et s’est créé dans l’école une place
spéciale où sa notoriété s’affirme chaque
jour davantage. Dans les accessoires son
dessin est exact, ferme et juste. Le coloris
d’une adresse merveilleuse et d’un effet qu’il
faut admirer. Les personnages sont moins
heureux mais le tout se sauve par une har-
monie sauvage et grise qui n’est pas déplai-
sante et une vérité d’accessoires que nul
dans notre école moderne n’a encore su
atteindre. M. Stobbaerts peint aussi des
chiens avec une crânerie étourdissante. Sans
doute c’est un artiste incomplet mais il s’im-
pose pas des qualités extraordinaires puisées
dans la contemplation des vieux maîtres du
genre. — Storm. Bouquet. Très énergique-
ment travaillé et dénotant une maîtresse
main, mais c’est à voir d’un peu loin. —
Stroobant. Vue de Bruges. Abbaye de Villers.
Toujours ce faire distingué et cette coloration
un peu brunâtre que comporte, à notre sens,
le genre du maître. — MelIe Alice Stroobant.
Lisière de la forêt de Soignes. Cette jeune
personne, élevée à l’excellente école de son
père,se révèle à nous avec une grande sûreté
de main et aussi avec de la distinction dans
le dessin.-— M. Tf.r Linden. Son paysage {No-
vembre) a la tristesse voulue et 1 eVieuxjardin
ne manque pas d’une certaine poésie. —
Tschaggeny. Etalon des Flandres. Sans doute
le portrait de quelque noble bête de stature
colossale et portrait conforme; nous ne sau-
rions nous expliquer autrement et la couleur
un peu étrange et l’extraordinaire dévelop-
pement musculeux de ce bel animal,admira-
blement dessiné du reste. Le Jaar, du même,
est une vue de Tongres d’un toucher char-
mant et frappé d’une lumière franche et fine
de l’asipecî le plus agréable.—Tscharner.
Paysagiste un peu monotone mais où il y a
un sentiment très-personnel de la poésie de
la nature. II y a toujours dans ses thèmes
une note mineure dominante qui porte à la
mélancolie,et dont il seraitbon de 11e pas abu-
ser. Rien ne lasse comme la même chanson,
fût-elle celle de Fortunio. — M. Vandenbosch
a fie bons Accessoires; B^LVandenkerckuove,un
Usuiier formant une jolie scène de genre où
il y a d’excellentes choses de détail ; M. Van
per Heciit, un Hiver accentué et un Etang où
se retrouvent les qualités et les défauts de
l’auteur : composition grandiose où la sim-
plicité veut s’introduire à tout prix ; touche
habile compromise par cette habileté même.
- M. Van per Vin. Attelage. Correct mais
froid. — Van Hammèe. Au jardin. Beaucoup
de naturel et d’originalité. — Van Keirsrilgk.
I)e midi à une heure. Peinture forte, con-
sciencieuse à l’excès. Beaucoup de talent,
mais tendance à un certain alourdissement
dans les tons. — MM. Van Seben, Veltman,
Verreyden, Verhaeren, Vervoort sont des
artistes dont on regarde les œuvres avecia-
d’une façon proprette. Cette universalité de
dispositions nous a probablement privé d’un
artiste réel. — MM. Oyens continuent leurs
exercices pyrotechniques avec un succès qui
grandit à chaque représentation. Ce sont
aussi les véritables Alcides du Nord de la
peinture. On peut déplorer qu’il n’y ait point
chez eux la distinction dont l’art s’accom-
mode si volontiers,mais enfin,elle n’y est pas
et il paraît qu’on peut plaire sans cela. Voyez
Craesbeke! — Pantazis. Un pinceau qui se
forme. Ce peintre me paraît être du nombre
de ceux qui se disent que le talent vaut mieux
que le génie. A ce compte sa fortune est faite.
— Papeleu. Citons dans sa Marine un ciel des
mieux réussis. — Permeke. Très beau son
Inondation des Flandres. Je voudrais bien
savoir quel est le tableau qu’on pourrait lui
opposer comme force, justesse, perspective
effet et sentiment? J’en félicite de tout mon
cœur ce vaillant artiste. — Philippet. Un
artiste qui autrefois annonçait du génie. Le
chic, ce bourreau de l’âme, nous a dévoré
cet homme que nous avions salué au début
comme une apparition grandiose qui allait
jeter un vif éclat sur notre école. Les vents
malsains du jour ont soufflé sur nos espé-
rances et nous ne sommes plus qu’en pré-
sence d’un habile et adroit praticien. Hélas!
c’est la marque du siècle et le fléau du jour
et il n’y a guère que les âmes véritablement
fortes qui puissent y résister. Fiat ! Le siècle
prochain aura son sursum corda et sa résur-
rection ; pour nous, enterrons nos morts.—
MM. Pion, Platteel, Raeymakers (charmante
chose que sa Campinoise), Ravet, H ingel et
Reinheimer se font regarder avec plaisir et
font partie de ce noyau d’artistes qu’on aime
à analyser jusqu’au moment où on en vien-
dra à les discuter. Or, parmi ceux que nous
venons de citer,il en est plusieurs qui passe-
ront par là. — M. Ragot. Portrait. Très re-
marquable d’esprit et de facture mais le ton
éteint qui le domine nous déplait. — Rorbe.
Entente cordiale. Puissante nature d’artiste
que cet animalier dont la palette possède la
robusticité qui caractérise l’homme lui-même.
Ces deux animaux sont splendides et l’œuvre
respire un je ne sais quoi de fort et de sain
qui vous monte à la tête. — Robert. Picolino.
Charmante et douce physionomie traitée
avec soin et avec un dédain marqué du coup
de sabre qui fait s’épater tant de jeunes naïfs
s’imaginant qu’il suffit de vouloir ressembler
à Frans Hais pour le devenir. Chose cu-
rieuse! on n’a jamais vu, que je sache, des
figures striées en quelque sorte de raies
blanches, roses, rouges ou brunes. Or, on
admire dans Hais ce que la nature ne donne
qu’à des distances où elle devient du décor
et où on ne voit que les masses. On pousse
des cris d’admiration devant ces audaces
hors raison et on à l'air de vous insulter
quasi quand vous peignez, par exemple, une
ligure d’enfant ou de femme avec les finesses
de ton et de transparence que la nature y a
mises! Blaireau! vous crie-t-on, et tout est
dit. Puis le cortège des impuissants et des
imbéciles emboitent le pas et l’on va ainsi
s’étonnant que l’école dégringole. De temps
en temps un de ces égarés se repent, voit
clair, se rattrappe et se fait un nom, juste-
ment en revenant à ce qu’il avait brûlé jadis.
J’en pourrais citer une demi-douzaine de ces
veinards mais cela ferait trop de peine aux
autres et il est bon que ceux-ci restent de-
bout, ne fut-ce que comme gardes-fous —
Roelofs. L'abbaye de Groenendael. Bonne
et solide toile où l’on sent, comme partout
du reste, la main expérimentée et l’œil si
profond du maître. — Roffiaen. Toujours
d’une merveilleuse exactitude dans la repro-
duction des évaporisations des lacs et des
bois. Pinceau d’une esquise finesse dans
laquelle disparaît entièrement l’effort tech-
nique pour faire place à des résultats d’une
étonnante intensité comme lumière, jeu,
effet et chaleur.
MM. Rorcourt et Roseels ont exposé des
œuvres estimables. — E. Sacré. L'été. Si
cet artiste reste dans cette gamme claire et
gaie, s’il conserve cette distinction de touche
absolument nouvelle en lui, nous serons les
premiers à le prôner. Cette personnification
de l’Eté est vraiment charmante; quelques
faiblesses dans le dessin et le geste vulgaire
du bras droit, s’opposent à ce que nous en
fassions un éloge aussi complet que nous le
voudrions. — Sir Savile Lumley. Briquelterie,
sujet osé et ingrat que l’artiste a abordé en
vainqueur. C’est finement et peut-être un
peu mignardement touché, mais il n’est pas
nécessaire pour plaire d’avoir le débraillé
de... (cherchez vous même, ami lecteur). On
peut dans des conditions plus calmes avoir
encore un public d'élite. — MM. Sembach,
Schmidt et Sebes n’ont rien exposé de parti-
culièrement saillant. — M. E. Smits. Le pro-
cédé nous semble envahir cet artiste au point
de nous donner des inquiétudes et des soup-
çons. Des inquiétudes, parceque la folie du
procédé doit aboutir au maniérisme (et ici
nous n’en sommes plus très loin,'M. Smits).
Des soupçons, parceque certaine partie du
public se demande si cette maestria un peu
tourmentée ne cache point des faiblesses
.génialesou autres. Le fait est que jusqu’ici
la Marche des saisons et le Grand marché à
Borne, ne sont point encore dépassés, non
pas que ce fussent des œuvres sans défaut
mais il y avait là de viriles qualités que nous
ne retrouvons plus dans les œuvres pro-
duites depuis. — M. Speeckaest tient toujours
à ce réalisme qui parait le tourmenter
comme la robe de Nessus.—M.Stallaert. Les
rameaux. Fière et belle tête d’italienne,peut-
être un peu forte pour le cadre. — Starck.
Sujets orientaux traités avec une grande ap-
parence d’exactitude; touche adroite, sou-
vent spirituelle, intérieurs bien éclairés.Plus
de recherche que d’art. — Storbaf.rts. Cet
artiste a fini par acquérir une puissante ori-
ginalité et s’est créé dans l’école une place
spéciale où sa notoriété s’affirme chaque
jour davantage. Dans les accessoires son
dessin est exact, ferme et juste. Le coloris
d’une adresse merveilleuse et d’un effet qu’il
faut admirer. Les personnages sont moins
heureux mais le tout se sauve par une har-
monie sauvage et grise qui n’est pas déplai-
sante et une vérité d’accessoires que nul
dans notre école moderne n’a encore su
atteindre. M. Stobbaerts peint aussi des
chiens avec une crânerie étourdissante. Sans
doute c’est un artiste incomplet mais il s’im-
pose pas des qualités extraordinaires puisées
dans la contemplation des vieux maîtres du
genre. — Storm. Bouquet. Très énergique-
ment travaillé et dénotant une maîtresse
main, mais c’est à voir d’un peu loin. —
Stroobant. Vue de Bruges. Abbaye de Villers.
Toujours ce faire distingué et cette coloration
un peu brunâtre que comporte, à notre sens,
le genre du maître. — MelIe Alice Stroobant.
Lisière de la forêt de Soignes. Cette jeune
personne, élevée à l’excellente école de son
père,se révèle à nous avec une grande sûreté
de main et aussi avec de la distinction dans
le dessin.-— M. Tf.r Linden. Son paysage {No-
vembre) a la tristesse voulue et 1 eVieuxjardin
ne manque pas d’une certaine poésie. —
Tschaggeny. Etalon des Flandres. Sans doute
le portrait de quelque noble bête de stature
colossale et portrait conforme; nous ne sau-
rions nous expliquer autrement et la couleur
un peu étrange et l’extraordinaire dévelop-
pement musculeux de ce bel animal,admira-
blement dessiné du reste. Le Jaar, du même,
est une vue de Tongres d’un toucher char-
mant et frappé d’une lumière franche et fine
de l’asipecî le plus agréable.—Tscharner.
Paysagiste un peu monotone mais où il y a
un sentiment très-personnel de la poésie de
la nature. II y a toujours dans ses thèmes
une note mineure dominante qui porte à la
mélancolie,et dont il seraitbon de 11e pas abu-
ser. Rien ne lasse comme la même chanson,
fût-elle celle de Fortunio. — M. Vandenbosch
a fie bons Accessoires; B^LVandenkerckuove,un
Usuiier formant une jolie scène de genre où
il y a d’excellentes choses de détail ; M. Van
per Heciit, un Hiver accentué et un Etang où
se retrouvent les qualités et les défauts de
l’auteur : composition grandiose où la sim-
plicité veut s’introduire à tout prix ; touche
habile compromise par cette habileté même.
- M. Van per Vin. Attelage. Correct mais
froid. — Van Hammèe. Au jardin. Beaucoup
de naturel et d’originalité. — Van Keirsrilgk.
I)e midi à une heure. Peinture forte, con-
sciencieuse à l’excès. Beaucoup de talent,
mais tendance à un certain alourdissement
dans les tons. — MM. Van Seben, Veltman,
Verreyden, Verhaeren, Vervoort sont des
artistes dont on regarde les œuvres avecia-