eu Ghèci et in àsiï.' 173
à mon insçu, d'une manière très-ingénieuse»
Ce cabinet où nous sommes n'existoit pas. Un
jour ce prince me demanda comment je me
trouvois dans mon hermitage : « A merveille,
lui dis-je ; il n'y manque qu'un petit cabinet
au milieu de mon bois de laurier ; mais j'at-
tends d'avoir conquis l'Asie , à la tète des
grecs, pour le faire bâtir >>. — « Pour exécuter
ce vaste projet vous attendrez, sans doute r
que je sois mort ». Cette plaisanterie finit làT
et je la crus oubliée. Huit jours après il me
fit prier de me rendre à son palais de très-
grand matin, où, sous divers prétextes, il me
retint toute la journée ; il me montroit sa
correspondance de Sparte avec son général
Lysander ; il m'arrêta à diner ; il eut la déli-
catesse de n'admettre à ce repas que deux de
ses conseillers intimes, personnages instruits
et d'un âge mûr. Notre conversation fut grave
et intéressante, car l'esprit de ce prince, vaste
et flexible, se prètoit à tous les tons. Nous
parlâmes de la vieillesse ; j'essayai de lui
prouver qu'elle avoit ses douceurs. « Un jeune
homme , sans doute, se croit plus heureux
qu'un vieillard, parce qu'il est entouré des
plaisirs ; mais si le vieillard ne regrette pas
ces plaisirs, si d'autres goûts lui en créent de
nouveaux , qu'a-t-il perdu ? L'agilité et la
à mon insçu, d'une manière très-ingénieuse»
Ce cabinet où nous sommes n'existoit pas. Un
jour ce prince me demanda comment je me
trouvois dans mon hermitage : « A merveille,
lui dis-je ; il n'y manque qu'un petit cabinet
au milieu de mon bois de laurier ; mais j'at-
tends d'avoir conquis l'Asie , à la tète des
grecs, pour le faire bâtir >>. — « Pour exécuter
ce vaste projet vous attendrez, sans doute r
que je sois mort ». Cette plaisanterie finit làT
et je la crus oubliée. Huit jours après il me
fit prier de me rendre à son palais de très-
grand matin, où, sous divers prétextes, il me
retint toute la journée ; il me montroit sa
correspondance de Sparte avec son général
Lysander ; il m'arrêta à diner ; il eut la déli-
catesse de n'admettre à ce repas que deux de
ses conseillers intimes, personnages instruits
et d'un âge mûr. Notre conversation fut grave
et intéressante, car l'esprit de ce prince, vaste
et flexible, se prètoit à tous les tons. Nous
parlâmes de la vieillesse ; j'essayai de lui
prouver qu'elle avoit ses douceurs. « Un jeune
homme , sans doute, se croit plus heureux
qu'un vieillard, parce qu'il est entouré des
plaisirs ; mais si le vieillard ne regrette pas
ces plaisirs, si d'autres goûts lui en créent de
nouveaux , qu'a-t-il perdu ? L'agilité et la