en Grèce et en Asie. 343
redemande ce qu'elle m'a prêté : je ne crains
point la mort, depuis long-temps je m'y pré-
pare. Mais elle est devant mes yeux, dans ma
pensée ; elle m'enveloppe de ses ombres ; ce-
pendant je l'envisage sans pâlir. Au reste, vous
saurez bientôt si ce pressentiment est un avis
des dieux, ou un mouvement de foiblesse et
d'erreur ». Elle passa le reste de la journée
avec nous et quelques amis, sans la moindre
empreinte de tristesse, mais ramenant souvent
la conversation sur l'essence de l'ame, son
immatérialité, sur les sentimens des philo-
sophes , relativement à son existence future.
« Où étoit cette ame, disoit-elle , avant sa réu-
nion à la matière ? que fait-elle pendant notre
sommeil, ou quand le corps est frappé de lé-
thargie ? pourquoi si débde, si nulle dans l'en-
fance , si affaiblie dans la vieillesse ? » On
voyoit qu'elle desiroit survivre à sa dépouille
mortelle, et qu'elle cherchoit à s'éclairer des
lumières des grands philosophes et à s'appuyer
de leur opinion (21).
Le troisième jour, terme fatal desa carrière,
selon son pressentiment, dés son lever je cou-
rus dans sa chambre, j'apperçus sur son visage
un peu moins de sérénité qu'à l'ordinaire. Elle
m'avoua qu'à son réved elle avoit eu le cœur
oppressé, en songeant qu'elle s'éveilloit pour
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redemande ce qu'elle m'a prêté : je ne crains
point la mort, depuis long-temps je m'y pré-
pare. Mais elle est devant mes yeux, dans ma
pensée ; elle m'enveloppe de ses ombres ; ce-
pendant je l'envisage sans pâlir. Au reste, vous
saurez bientôt si ce pressentiment est un avis
des dieux, ou un mouvement de foiblesse et
d'erreur ». Elle passa le reste de la journée
avec nous et quelques amis, sans la moindre
empreinte de tristesse, mais ramenant souvent
la conversation sur l'essence de l'ame, son
immatérialité, sur les sentimens des philo-
sophes , relativement à son existence future.
« Où étoit cette ame, disoit-elle , avant sa réu-
nion à la matière ? que fait-elle pendant notre
sommeil, ou quand le corps est frappé de lé-
thargie ? pourquoi si débde, si nulle dans l'en-
fance , si affaiblie dans la vieillesse ? » On
voyoit qu'elle desiroit survivre à sa dépouille
mortelle, et qu'elle cherchoit à s'éclairer des
lumières des grands philosophes et à s'appuyer
de leur opinion (21).
Le troisième jour, terme fatal desa carrière,
selon son pressentiment, dés son lever je cou-
rus dans sa chambre, j'apperçus sur son visage
un peu moins de sérénité qu'à l'ordinaire. Elle
m'avoua qu'à son réved elle avoit eu le cœur
oppressé, en songeant qu'elle s'éveilloit pour
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