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vinisé le personnage représenté par la statue, avant qu'on
songeât à la couvrir d'hommages religieux. En effet,
l'époque des plus anciens coïncide avec celle où l'on a
commencé d'appliquer au phénomène le mythe grec de
Memnon fils de l'Aurore.
Une autre circonstance importante s'explique aussi fa-
cilement : je veux parler de l'absence de tout nom égyptien,
parmi plus d'une centaine que l'on peut recueillir dans les
inscriptions du colosse. Rien de plus naturel. Comme
cétoit à l'application d'un mythe grec que le colosse devoit
sa célébrité, peu importoit aux Égyptiens la voix de Mem-
non. Pour eux, elle resta ce qu'elle avoit été pour les Grecs
avant qu'ils eussent imaginé le rapprochement mytholo-
gique, c'est-à-dire, une particularité curieuse, sans aucun
rapport avec la religion. Ils dévoient même être d'autant
plus portés à en rabaisser le merveilleux, qu'ils voyoient les
Grecs en abuser pour dénaturer l'objet d'une de leurs plus
grandes statues, et pour la transporter dans un ordre d'idées
religieuses et poétiques qu'ils ne pouvoient admettre. Je
ne serois pas surpris que le miracle eût continué à trouver
parmi eux des sceptiques, comme l'étoit encore Strabon, et
même des détracteurs qui cherchoient à rabaisser les effets
de cette voix merveilleuse. Les Egyptiens laissèrent aux
étrangers leur enthousiasme , mais ils ne se joignirent pas
à eux; tandis que ceux-ci s'extasioient sur Memnon et în-
voquoient tous les souvenirs de la poésie homérique pour
le célébrer dignement, eux, ils se renfermoient dans les
traditions de leur religion et de leur histoire, et ils per-
sistoient à ne voir dans ce phénomène qu'un jeu de la
nature; le colosse brisé, ainsi que l'autre placé à côté
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vinisé le personnage représenté par la statue, avant qu'on
songeât à la couvrir d'hommages religieux. En effet,
l'époque des plus anciens coïncide avec celle où l'on a
commencé d'appliquer au phénomène le mythe grec de
Memnon fils de l'Aurore.
Une autre circonstance importante s'explique aussi fa-
cilement : je veux parler de l'absence de tout nom égyptien,
parmi plus d'une centaine que l'on peut recueillir dans les
inscriptions du colosse. Rien de plus naturel. Comme
cétoit à l'application d'un mythe grec que le colosse devoit
sa célébrité, peu importoit aux Égyptiens la voix de Mem-
non. Pour eux, elle resta ce qu'elle avoit été pour les Grecs
avant qu'ils eussent imaginé le rapprochement mytholo-
gique, c'est-à-dire, une particularité curieuse, sans aucun
rapport avec la religion. Ils dévoient même être d'autant
plus portés à en rabaisser le merveilleux, qu'ils voyoient les
Grecs en abuser pour dénaturer l'objet d'une de leurs plus
grandes statues, et pour la transporter dans un ordre d'idées
religieuses et poétiques qu'ils ne pouvoient admettre. Je
ne serois pas surpris que le miracle eût continué à trouver
parmi eux des sceptiques, comme l'étoit encore Strabon, et
même des détracteurs qui cherchoient à rabaisser les effets
de cette voix merveilleuse. Les Egyptiens laissèrent aux
étrangers leur enthousiasme , mais ils ne se joignirent pas
à eux; tandis que ceux-ci s'extasioient sur Memnon et în-
voquoient tous les souvenirs de la poésie homérique pour
le célébrer dignement, eux, ils se renfermoient dans les
traditions de leur religion et de leur histoire, et ils per-
sistoient à ne voir dans ce phénomène qu'un jeu de la
nature; le colosse brisé, ainsi que l'autre placé à côté
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