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HISTOIRE DE LA DENTELLE.
Avant de quitter l’Espagne, nous devons dire quelques mots des
dentelles de Moresse que M. Francisque Michel (1) suppose être d’o¬
rigine ibérienne et fabriquées par les descendants des Maures qui
restèrent en Espagne et embrassèrent le christianisme. Ces dentelles
sont nommées dans la Révolte des Passements, déjà citée. Quelles
étaient ces dentelles, il serait difficile de le dire. Un des livres de mo-
dèles parle de Moreshi et d’Arabeshi (2); un autre est intitulé Livre
de Moresque (3) ; un troisième a pour titre Livre de seuillages, en-
trelatz et ouvrages moresques (4). Tout ce que nous savons à cet
égard, c’est qu’un travail composé de carrés variés de dentelle était,
à une certaine époque, l’occupation favorite des filles maures, et
qu’on trouve encore des restes de cette industrie, jaunis par l’âge,
dans les villes africaines de Tanger et de Tétouan. Ce travail se dis-
tingue de celui qu’ont produit des mains chrétiennes par l’absence
de tout animal dans le dessin. On sait que la représentation d’êtres
vivants est strictement interdite par le Coran.
PORTUGAL.
La dentelle de point se fabriquait en Portugal aussi bien qu’en Es-
pagne et y était tout aussi estimée. Il n’y avait pas de manufactures
proprement dites; ce travail occupait les loisirs des religieuses et de
quelques femmes qui exécutaient chez elles les commandes qu’on
leur faisait. Mais les lois somptuaires de 1749 mirent fin à tout luxe
des vêtements parmi les laïques; ceux qui exposaient en vente des
dentelles étaient bannis de la ville. En 1729, quand la princesse Barbe
de Portugal épousa, à dix-sept ans, Ferdinand, infant d’Espagne, elle
se rendit avant de quitter Lisbonne à l’église de la Mère de Dieu sur
les bords du Tage, et là offrit solennellement à la Vierge les bijoux
et la robe de riche point de Portugal qu’elle portait le jour de son
mariage. Ce point, d’après la description, était de la plus grande ma-
gnificence; la robe fut exposée sous verre aux yeux émerveillés jus-
(1) Recherches sur le commerce, la fabrication et l'usage des étofses de soie, etc., pendant
le moyen âge; Paris, 1839.
(2) Taglienti, 1530.
(3) Paris, 1546.
(4) Pelegrin de Florence, Paris, 1530.
HISTOIRE DE LA DENTELLE.
Avant de quitter l’Espagne, nous devons dire quelques mots des
dentelles de Moresse que M. Francisque Michel (1) suppose être d’o¬
rigine ibérienne et fabriquées par les descendants des Maures qui
restèrent en Espagne et embrassèrent le christianisme. Ces dentelles
sont nommées dans la Révolte des Passements, déjà citée. Quelles
étaient ces dentelles, il serait difficile de le dire. Un des livres de mo-
dèles parle de Moreshi et d’Arabeshi (2); un autre est intitulé Livre
de Moresque (3) ; un troisième a pour titre Livre de seuillages, en-
trelatz et ouvrages moresques (4). Tout ce que nous savons à cet
égard, c’est qu’un travail composé de carrés variés de dentelle était,
à une certaine époque, l’occupation favorite des filles maures, et
qu’on trouve encore des restes de cette industrie, jaunis par l’âge,
dans les villes africaines de Tanger et de Tétouan. Ce travail se dis-
tingue de celui qu’ont produit des mains chrétiennes par l’absence
de tout animal dans le dessin. On sait que la représentation d’êtres
vivants est strictement interdite par le Coran.
PORTUGAL.
La dentelle de point se fabriquait en Portugal aussi bien qu’en Es-
pagne et y était tout aussi estimée. Il n’y avait pas de manufactures
proprement dites; ce travail occupait les loisirs des religieuses et de
quelques femmes qui exécutaient chez elles les commandes qu’on
leur faisait. Mais les lois somptuaires de 1749 mirent fin à tout luxe
des vêtements parmi les laïques; ceux qui exposaient en vente des
dentelles étaient bannis de la ville. En 1729, quand la princesse Barbe
de Portugal épousa, à dix-sept ans, Ferdinand, infant d’Espagne, elle
se rendit avant de quitter Lisbonne à l’église de la Mère de Dieu sur
les bords du Tage, et là offrit solennellement à la Vierge les bijoux
et la robe de riche point de Portugal qu’elle portait le jour de son
mariage. Ce point, d’après la description, était de la plus grande ma-
gnificence; la robe fut exposée sous verre aux yeux émerveillés jus-
(1) Recherches sur le commerce, la fabrication et l'usage des étofses de soie, etc., pendant
le moyen âge; Paris, 1839.
(2) Taglienti, 1530.
(3) Paris, 1546.
(4) Pelegrin de Florence, Paris, 1530.