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LA CHRONIQUE DES ARTS
Cette pensée de faire entrer le public dans les
collections des États et des particuliers, est tout
à fait dans le sens moderne et réalise sous une
autre forme ce qu’ont commencé les expositions
rétrospectives de Manchester, de Londres et de
Paris. L’art, l’industrie, l’érudition, la récréation
pure des yeux, sont également intéressés à l’en-
treprise de M. Édouard Lièvre, dont le succès est
assuré par avance.
#** Un violent ouragan, en jetant par terre un
pan de mur du château en ruine de Cerbastro,
dans la gorge d’Ucos, en Aragon, a mis à décou-
vert des caveaux funéraires qui remontent à l’é-
poque de la civilisation des Yisigoths. Des fouilles
faites avec intelligence ont donné des diadèmes,
des bracelets, des bagues et des épingles qui,
rapprochées'des couronnes du musée de Cluny,
nous permettent de juger l’art de l’orfèvrerie
chez les Yisigoths.
*** Les peintures murales de l’Hôtel des Inva-
lides, que M. Masson avait achevées cet été, ont
été débarrassées des planches qui les cachaient.
Ces peintures, qui couvrent la moitié du portique
de la cour d’honneur, à gauche, représentent les
grands épisodes de l’histoire de France, depuis
les temps les plus reculés de notre histoire jus-
qu’au couronnement de Charlemagne comme em-
pereur.
*** M. Le Carpentier, le doyen des collection-
neurs français, est mort cette semaine. Prochai-
nement, le marteau du commissaire-priseur
dispersera tous les objets curieux qu’il avait
réunis pendant une longue existence et qui avaient
été vus récemment au musée Rétrospectif. Cette
collection devait revenir au musée de Cluny,
mais cette disposition du testament ne peut être
exécutée par des raisons de famille.
*** Le duc de Blacas d’Aulps, numismate et
collectionneur distingué, est mort subitement à
Venise, le 10 de ce mois. Héritier des goûts de
son père, le ministre favori de Louis XVIII, on
lui doit plusieurs mémoires sur les monnaies an-
tiques et notamment la traduction de Y Histoire
des monnaies romaines de Théodore Momm-
sen, qu’il a enrichie de notes importantes. Dans
ces derniers temps, il travaillait activement à
écrire l’histoire de monnaies vénitiennes et il
se réjouissait à la pensée de l’offrir à ses amis
comme un souvenir de son séjour à Venise.
Mais son espérance fut vaine! Le jeudi 8 cou-
rant, il s’entretenait amicalement de ses travaux
avec M. Nicolo Barozzi, le savant conservateur
du musée Correr, et le samedi 10 il n’était déjà
plus.
*** L’abondance des matières, dans le prochain
numéro de la Gazette, oblige à renvoyer un ar-
ticle d’un de nos collaborateurs sur l’exposition
de la Société des Amis des arts de Lyon. Cette
exposition, qui ne renferme que peu d’envois
parisiens, est excellente au point de vue des œu-
vres des artistes lyonnais. Sans prétendre pré-
juger sur la critique, nous pouvons dès ce moment
citers les nom de MM. Allemand, Bellet du Poisat,
Carey, Appian, Ponthus-Cinier, Girardon, Roy-
bet, etc.
*** La Commission consultative des beaux-arts
près YUnion centrale est composée ainsi pour
l’année 1866 : M. Klagmann, président; MM. Da-
vioud et P. Mantz, vice-présidents; MM. Blondel,
Burette, Burty, Chalons d’Argé, Champfleury,
Gérôme, Gonelle, Lebègue, Lièvre, Louvrier de
Lajolais, Luchet, A. Millet, Minoret, Patrice
Salin, Parent, Cl. Popelin, Riester, Rousseau et
Roussel.
*** L’exposition de la Société des amis des
arts de Bordeaux promet d’être plus brillante
encore que dans les années précédentes. L’acti-
vité et le dévouement du comité sont vraiment
dignes d’éloges. Nous avons dit que le vice-pré-
sident, M. Charoppin, était venu tout exprès à
Paris et avait obtenu des premiers amateurs plus
de vingt tableaux importants de l’œuvre de
Troyon. Le secrétaire, M. Bonnet, vient encore
de faire une tournée définitive dans les ateliers,
en compagnie d’un de nos collaborateurs, et a
recueilli des tableaux de premier choix.
*** D’après une correspondance italienne, le
docteur Giuseppe Ortori vient de découvrir à la
bibliothèque Ambroisienne de Milan un ouvrage
très-important de Léonard de Vinci. C’est un ma-
nuscrit de 112 pages, sur parchemin in-folio,
qui traite scientifiquement de divers phénomènes
lumineux qui intéressent généralement ceux qui
se livrent à l’art de la peinture. Cet ouvrage va
être imprimé par les soins de lady Evelina Brigh-
ton, et grâce à des fonds fournis par elle. Bien
que la science ait fait de grands progrès depuis
Léonard de Vinci, les savants italiens ne doutent
pas que son livre ne produise une certaine sen-
sation.
*** La nouvelle église de la Trinité qui s^élève
à l’extrémité de la rue de la Chaussée-d’Antin,
à l’angle formé par les rues Blanche et de Clichy,
est à peu près terminée à l’extérieur, et de nom-
breux artistes travaillent en ce moment à sa dé-
coration sculpturale.
*** M. A. Essenwcin, savant archéologue alle-
mand, qui avait organisé dans la ville de Gratz
(empire d’Autriche), dont il était l’architecte, une
« Société pour la propagation des arts industriels »
[Chronique des arts, t. III, p. 241), vient d’ètre
LA CHRONIQUE DES ARTS
Cette pensée de faire entrer le public dans les
collections des États et des particuliers, est tout
à fait dans le sens moderne et réalise sous une
autre forme ce qu’ont commencé les expositions
rétrospectives de Manchester, de Londres et de
Paris. L’art, l’industrie, l’érudition, la récréation
pure des yeux, sont également intéressés à l’en-
treprise de M. Édouard Lièvre, dont le succès est
assuré par avance.
#** Un violent ouragan, en jetant par terre un
pan de mur du château en ruine de Cerbastro,
dans la gorge d’Ucos, en Aragon, a mis à décou-
vert des caveaux funéraires qui remontent à l’é-
poque de la civilisation des Yisigoths. Des fouilles
faites avec intelligence ont donné des diadèmes,
des bracelets, des bagues et des épingles qui,
rapprochées'des couronnes du musée de Cluny,
nous permettent de juger l’art de l’orfèvrerie
chez les Yisigoths.
*** Les peintures murales de l’Hôtel des Inva-
lides, que M. Masson avait achevées cet été, ont
été débarrassées des planches qui les cachaient.
Ces peintures, qui couvrent la moitié du portique
de la cour d’honneur, à gauche, représentent les
grands épisodes de l’histoire de France, depuis
les temps les plus reculés de notre histoire jus-
qu’au couronnement de Charlemagne comme em-
pereur.
*** M. Le Carpentier, le doyen des collection-
neurs français, est mort cette semaine. Prochai-
nement, le marteau du commissaire-priseur
dispersera tous les objets curieux qu’il avait
réunis pendant une longue existence et qui avaient
été vus récemment au musée Rétrospectif. Cette
collection devait revenir au musée de Cluny,
mais cette disposition du testament ne peut être
exécutée par des raisons de famille.
*** Le duc de Blacas d’Aulps, numismate et
collectionneur distingué, est mort subitement à
Venise, le 10 de ce mois. Héritier des goûts de
son père, le ministre favori de Louis XVIII, on
lui doit plusieurs mémoires sur les monnaies an-
tiques et notamment la traduction de Y Histoire
des monnaies romaines de Théodore Momm-
sen, qu’il a enrichie de notes importantes. Dans
ces derniers temps, il travaillait activement à
écrire l’histoire de monnaies vénitiennes et il
se réjouissait à la pensée de l’offrir à ses amis
comme un souvenir de son séjour à Venise.
Mais son espérance fut vaine! Le jeudi 8 cou-
rant, il s’entretenait amicalement de ses travaux
avec M. Nicolo Barozzi, le savant conservateur
du musée Correr, et le samedi 10 il n’était déjà
plus.
*** L’abondance des matières, dans le prochain
numéro de la Gazette, oblige à renvoyer un ar-
ticle d’un de nos collaborateurs sur l’exposition
de la Société des Amis des arts de Lyon. Cette
exposition, qui ne renferme que peu d’envois
parisiens, est excellente au point de vue des œu-
vres des artistes lyonnais. Sans prétendre pré-
juger sur la critique, nous pouvons dès ce moment
citers les nom de MM. Allemand, Bellet du Poisat,
Carey, Appian, Ponthus-Cinier, Girardon, Roy-
bet, etc.
*** La Commission consultative des beaux-arts
près YUnion centrale est composée ainsi pour
l’année 1866 : M. Klagmann, président; MM. Da-
vioud et P. Mantz, vice-présidents; MM. Blondel,
Burette, Burty, Chalons d’Argé, Champfleury,
Gérôme, Gonelle, Lebègue, Lièvre, Louvrier de
Lajolais, Luchet, A. Millet, Minoret, Patrice
Salin, Parent, Cl. Popelin, Riester, Rousseau et
Roussel.
*** L’exposition de la Société des amis des
arts de Bordeaux promet d’être plus brillante
encore que dans les années précédentes. L’acti-
vité et le dévouement du comité sont vraiment
dignes d’éloges. Nous avons dit que le vice-pré-
sident, M. Charoppin, était venu tout exprès à
Paris et avait obtenu des premiers amateurs plus
de vingt tableaux importants de l’œuvre de
Troyon. Le secrétaire, M. Bonnet, vient encore
de faire une tournée définitive dans les ateliers,
en compagnie d’un de nos collaborateurs, et a
recueilli des tableaux de premier choix.
*** D’après une correspondance italienne, le
docteur Giuseppe Ortori vient de découvrir à la
bibliothèque Ambroisienne de Milan un ouvrage
très-important de Léonard de Vinci. C’est un ma-
nuscrit de 112 pages, sur parchemin in-folio,
qui traite scientifiquement de divers phénomènes
lumineux qui intéressent généralement ceux qui
se livrent à l’art de la peinture. Cet ouvrage va
être imprimé par les soins de lady Evelina Brigh-
ton, et grâce à des fonds fournis par elle. Bien
que la science ait fait de grands progrès depuis
Léonard de Vinci, les savants italiens ne doutent
pas que son livre ne produise une certaine sen-
sation.
*** La nouvelle église de la Trinité qui s^élève
à l’extrémité de la rue de la Chaussée-d’Antin,
à l’angle formé par les rues Blanche et de Clichy,
est à peu près terminée à l’extérieur, et de nom-
breux artistes travaillent en ce moment à sa dé-
coration sculpturale.
*** M. A. Essenwcin, savant archéologue alle-
mand, qui avait organisé dans la ville de Gratz
(empire d’Autriche), dont il était l’architecte, une
« Société pour la propagation des arts industriels »
[Chronique des arts, t. III, p. 241), vient d’ètre